9- Ma première expérience homosexuelle.

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_ Ok, souffle Eleanore ! Tu vas  juste braquer un magasin de luxe !  Me murmure-je à moi-même.


Je lève la tête, l'enseigne est ostentatoire et tout ça m'écœure. Dire que mes parents et moi, on trime comme des malades et on n'est même capable de s'offrir un vêtement de cette marque. 
Je m'excite et m'énerve doucement. Mes veines roulent et je sens la chaleur parcourir mon corps. J'aime cette sensation. Je souris de ce délice.

J'ai un masque chirurgical, héritage de l'épidémie, des lentilles, une perruque, un bonnet et un maquillage outrancier des yeux.

Je pose le pied sur le seuil , les deux colosses à l'entrée s'apprêtent à m'ouvrir la porte quand je sursaute et baisse les yeux.
Le chat noir de la dernière fois, frôle mes mollets et ondule entre mes jambes. Je m'accroupis.

_ Qu'est-ce que tu me veux, toi ?

Il m'analyse de ses yeux perçants et une voix raisonne en moi :

_ Suis-moi !

Non ? Ce fichu chat n'a pas parlé ! Non, je ne virerai pas folle dingo à Ste Marie...
Mais les propos sont réitérés malgré l'absence de mouvement de la bouche de l'animal.

Je me redresse, plisse ma robe pull noire et faisant un nouveau pas, je l'entends encore.
Alors, je tourne les talons.

Je suis le félin, deux rues plus loin :

_Putain ! J'suis en train de louper le casse de ma vie, sac à puce...

C'est à ce moment-là qu'une ombre s'empare du chat, le soulève et des traits se dessinent.
La silhouette se solidifie, des courbes se forment divinement, une jambe puis deux se parent d'un legging moulé sur la peau et une opulente poitrine pointe sous un corset de cuir noir. Le visage qui se penche sur moi est d'une beauté époustouflante : lèvres pulpeuses d'un rouge sanguinaire, grands yeux en amandes d'un noir absolu, petit nez coquin comme une jolie ferme sculptée et une épaisse chevelure bouclée longue jusqu'à l'arrière des genoux de cette femme sublime.

_ Qu'allais-tu faire petite intrépide ?

Je l'observe, fascinée. Quelque chose chez elle est terriblement troublant et effrayant. Alors sans répondre à sa question, je demande :

_ Vous êtes qui ?

Elle sourit, révélant deux rangées de dents droites, brillantes et aiguisées. Elle tourne autour de moi, pose sa main douce et chaude sur mon épaule et glisse un de ses doigts de mon cou jusqu'à mon menton qu'elle relève.

_ Mais je suis qui tu veux.

Je déglutis et elle ajoute :

_ Alors comme ça, tu es en colère ?

_ Euh ...

_ Tu es en colère contre les injustices ?

Je me soustrais de son contact et recule :

_ Qu'est-ce que vous me voulez ?

_ Je ne sais pas. Que pourrais-tu m'apporter ?

Une rage bout en moi et je me contrôle. Cette femme est insupportablement agaçante et insupportablement sexy.

_ Bon! Ça suffit ! Vous voulez quoi au juste ?

_ Et si tu travaillais pour moi ?

_ Bordel! Encore du travail ! Vous croyez quoi ? Que j'vais bosser 24h/24 ? J'suis pas un putain de robot !

Elle m'examine, s'approche et je recule... Ses lèvres s'étirent dans un sourire et des images érotiques me viennent en tête. Je réalise soudain que cette envie charnelle féminine ne me ressemble pas. Je suis l'objet de mon propre désir.

Elle se met à rire, s'étire devant moi et me tend la main :

_ Belle !

Je hausse un sourcil et elle continue :

_ Zébute.

Je suis sur le point de rire quand elle fait claquer quelque chose à ses pieds. Mes yeux sont attirés au sol et je constate que traînent sur l'asphalte deux longues ailes dont le cartilage se termine par des dards argentés luisants. J'avale ma salive et elle me crache :

_ Que croyais-tu ? Qu'il fallait une queue pour être un démon ?

Je secoue la tête dans la négative et elle tend sa main vers ses ailes pour me préciser :

_ J'ai des tas d'autres attributs ! Mais tu ne les verras que si tu me choisis.

Elle est tentante avec son look de dominatrice irrésistible. J'inspire profondément, mes idées se remettent en place. La fraicheur de ses ailes vibrantes m'incitent à une réponse :

_ J'suis plus du genre à choisir.

_ Tu y seras contrainte... Bientôt, ma chérie. 

Elle se hisse, droite sur ses ailes et je me tords le cou pour la regarder. Ses boucles brunes virevoltent autour d'elle et elle fond sur moi. Je reste immobile devant ce spectacle éblouissant. Elle m'entoure de ses ailes, souffle sur ma chevelure et m'oblige à planter mon regard dans le sien. De petites flammes roses dansent sur mes bras et illuminent le cocon sombre qu'elle forme. Son corps sent la braise, le feu de cheminée crépitant et soudain, elle cale ses ergots dans ma nuque et pousse mon visage vers elle. 

Sa bouche cogne la mienne. Elle est brûlante. Je sens le feu gagner mon coeur et elle glisse insolemment sa langue entre mes lèvres. Ce contact ne me déplait pas du tout et j'en suis la première surprise. Son haleine est atrocement douce comme un chocolat chaud à la cannelle. Cette image est plutôt marrante, je souris de ce plaisir délicat.  Pressée, elle passe sa main dans la cambrure de mes reins, me colle contre elle et son baiser devient furieusement fiévreux. 

Mes veines me picotent, mes articulations scintillent et des étincelles jaillissent de mes doigts. L'ardeur avec laquelle elle s'évertue à m'embrasser commence à m'énerver. Je suis pressée et excédée à la fois. Des flammes dansent au bord de mes ongles. 

Ses mains glissent sur mes fesses, je me cambre d'instinct et elle se met à baiser mon cou. Je ne sais pas pourquoi, je refuse ces gestes. Je cligne des yeux, comme si le réveil venait de sonner, plaque mes mains contre ses hanches et la repousse violemment. 

Mon sang devient lave, je lâche un jet de flammes puissants sur ses ailes pendantes et lui lâche :

_ Je n'ai pas dit oui. 

C'est ainsi que j'ai vécu ma première expérience homosexuelle.

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