Chapitre 12

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J'avais réussi à modifier mes notes d'examen en me faufilant dans les bureaux pendant une nuit, manipulant les machines pour échanger mes résultats avec ceux du premier de la classe, afin de décrocher mon probatoire. Lorsque les résultats sont tombés, tout le monde a été étonné de voir que moi, dernier de la classe, j'avais réussi, tandis qu'Adam, le premier, avait échoué. Ce genre de situation se produisait parfois dans les établissements, mais je ne savais pas si c'était toujours le cas. Bref...

Je m'apprêtais à entrer en terminale et j'avais décidé de mettre la maison de mes parents en location pour prendre un petit studio pour moi seul. Mais un soir, alors que la rentrée scolaire approchait et que j'étais à la maison, quelqu'un frappa à ma porte. Je pensais que c'était un voisin, étant donné que je vivais dans une grande cité avec plusieurs appartements et une trentaine de locataires.

Je me levai pour ouvrir et je trouvai Ama, qui ne répondit pas tout de suite, mais dont je pouvais entendre les pleurs. Je l'invitai à entrer et, après l'avoir laissée souffler et s'asseoir, je lui demandai ce qui n'allait pas.

Elle me dit alors :
"On m'a chassée de la maison."

Je m'étonnai :
"De chez toi ? Mais comment et pourquoi ?"

Elle répondit :
"Ma mère dit que je suis sorcière et qu'elle ne veut pas que je tue son mari !"

Pour rappel, Ama était orpheline de père. Elle avait tué son propre père, qui battait sa mère. Quelques années plus tard, sa mère s'était remariée à un homme qu'Ama n'avait jamais aimé. Elle avait commencé à aspirer son énergie en se transformant chaque nuit en serpent et en allant coucher avec lui. Sa mère, ayant consulté un marabout dans une autre contrée, apprit que c'était sa propre fille qui était en train de tuer son mari. Furieuse, elle rentra chez elle et, sans vouloir rien entendre, chassa Ama.

Je la consolai :
"Arrête de pleurer. Tu peux rester avec moi ! Je vis seul et ça ne me dérange pas !"
Elle me répondit, surprise :
"Ah bon ?"
Je lui rétorquai :
"Tu voulais vraiment rester sans abri ? Hahaha !"
Elle me remercia :
"Merci ! Je te le rendrai !"
Je lui répondis :
"Je t'en prie !"

Ainsi, Ama s'installa chez moi. Les gens commencèrent à penser qu'elle était ma copine. Même si, dans le monde de la nuit, elle en était une, dans la réalité des hommes, ce n'était pas le cas. Après quelques mois, l'ennui s'installa. L'école avait repris, mais c'était monotone. Alors, nous eûmes une idée brillante : rendre la vie infernale à nos voisins.

Au départ, la cité était calme et paisible, mais nous étions sur le point de la détruire. Ama se transforma en serpent et, chaque nuit, elle visitait les maisons de tout un chacun. Il y avait un jeune garçon, nouvellement embauché, qui travaillait tard chaque soir jusqu'à minuit sur sa machine. Aux alentours de 2h, Ama venait et modifiait tous ses chiffres. Trois mois plus tard, il fut renvoyé. Un autre homme vivait avec sa fiancée enceinte. Une nuit, Ama se rendit dans leurs toilettes et aspira la grossesse de la fiancée, comme elle l'avait fait avec ma mère.
Une famille vivait au premier étage, avec l'intention de construire rapidement leur maison pour quitter la location, mais chaque fois que l'homme tentait d'acheter du ciment ou des parpaings, un imprévu urgent se produisait. Si ce n'était pas sa femme malade, c'était ses enfants, ou encore sa mère au village qui avait besoin d'argent, ou son frère menacé de prison faute d'argent.

Une petite étudiante était arrivée, et Ama lui vola ses habits. Je m'occupai de mettre du poison dessus, puis Ama les remit dans sa valise une nuit. La jeune fille, qui était calme et posée à son arrivée, devint bientôt la plus grande prostituée du coin.
Je pourrais citer encore bien d'autres exemples, mais je vais m'arrêter à celui de la femme riche. Une femme financièrement stable venait de s'installer. C'était chez elle que nous prenions parfois de l'argent pour manger en journée. Dès qu'Ama découvrit où elle cachait son argent, elle le prenait chaque soir. La femme vivait seule et, pensant que des fantômes hantaient la maison, elle finit par déménager après trois mois.
C'est elle qui attira l'attention des autres, et certains locataires convoquèrent alors une grande réunion dans la cour.

Deux ans s'étaient écoulés depuis que l'on opérait ainsi. Cette nouvelle venue fut la dernière à arriver et la première à partir. Avant de s'en aller, elle avait donné des raisons, ce qui expliqua la réunion convoquée par celui que l'on considérait comme le plus ancien de la cité, avec l'accord du bailleur, qui était d'ailleurs présent.

Lorsque la réunion commença, chacun était invité à dire ce qui se passait chez lui. Les réponses étonnèrent tout le monde. Ama et moi faisions semblant d'être surpris. Cependant, certains n'avaient pas encore visité tous les appartements et d'autres affirmaient ne rien voir de particulier. Pourtant, au cours de la réunion, il sembla que les locataires avaient déjà leur suspect : le bailleur de la cité.

L'un d'eux prit son courage à deux mains et s'adressa au bailleur :
• Si c'est toi qui fais tout ce dont on se plaint, j'espère que tu vas arrêter ! Je ne veux plus avoir de problèmes chez moi ! Voilà, l'autre, sa femme n'arrive plus à accoucher, et la moindre grossesse finit en fausse couche le lendemain matin.

Le bailleur entra dans une colère noire et demanda si ce dernier avait des preuves de ses accusations. Celui-ci répondit :
• C'est chez toi qu'on vit ! Si la moitié de tes locataires se plaignent, alors tu es en partie responsable.

Lorsque certains commencèrent à soutenir le locataire, Ama et moi, de manière mystique, nous nous interposâmes pour envenimer le problème, transformant ce qui aurait pu être une simple dispute en une bagarre. Ce fut un jeu d'enfant, et en quelques minutes, une violente altercation éclata, avec des blessés, du sang qui coula. Un homme se fit une plaie au pied, une plaie qui, avec le temps, devint inguérissable. Il dut déménager pour guérir.

Après la bagarre, le bailleur donna un préavis à tous ceux qui n'étaient pas satisfaits. Nous restions, car nous attendions de nouvelles proies. Cela nous convenait bien, à Ama et à moi. Mais, avec le temps, les plaintes des locataires se répétèrent, et le bailleur commença à prendre cette histoire au sérieux. Dès qu'un nouveau locataire arrivait, il repartait aussitôt après avoir déposé ses affaires.

La cité acquit une mauvaise réputation, au point que les appartements commencèrent à se vider un à un. Cela nous mettait dans une situation difficile, n'ayant plus d'endroits où aller, à part voler ou nuire aux gens. C'est alors que je proposai à Ama de visiter d'autres lieux. Il y avait des maisons encore plus bas que notre cité.

Ama commença à y aller chaque nuit sous forme de serpent pour nuire à ces familles. Au début, tout se passait bien, mais un soir, alors que j'étais à la maison, j'entendis frapper à la porte.
• OUVRE MOI !!!! TERENCE OUVRE !!! Je reconnais la voix d'Ama ! Je lui ouvris, et elle entra sous forme de serpent, se dirigeant immédiatement vers les toilettes.

En même temps, j'entendis des bruits de personnes s'approchant de la maison, armées de gourdins, de machettes, de lampes et de torches.
• C'est ici que c'est entré ! C'est ici que c'est entré !

Je me mis devant la porte et leur demandai ce qu'ils cherchaient. Ils répondirent qu'ils avaient vu un gros serpent entrer dans la maison.
• Un serpent dans ma maison ? Non, vous vous trompez, je n'ai vu aucun serpent entrer ici !
• Si, monsieur ! On l'a vu entrer !
• Je vous dis non ! Vous pouvez entrer fouiller ! Je vis ici avec ma copine ! Et en plus, vous dites que ce serpent était énorme.

Ils eurent tout de même le courage d'entrer et fouillèrent sans rien trouver, avant de ressortir et de dire à ceux qui voulaient l'entendre que cette cité abritait un gros serpent.

Encore une fois, la faute revint au bailleur, qui restait le suspect numéro un. J'avais demandé à Ama de se calmer pendant un moment. Nous attendîmes quelques mois avant qu'elle ne recommence à se promener dans les maisons, à la recherche d'énergie, d'argent, et d'autres ressources qui pourraient nous aider. Pourtant, elle était déjà en train de se faire piéger.

L'envieux Où les histoires vivent. Découvrez maintenant