15.Jake

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Merci beaucoup à @chloedomp pour ce superbe dessin! Et dire que tu ne voulais pas que je le mettes!

***

Je me réveillais avec une douleur dans la nuque qui lançait jusqu'à mes omoplates. Je m'étirais le dos avec un gémissement plaintif et une silhouette apparut dans mon champs de vision.
Gabriel dormait dans le fauteuil d'à côté. Sa tête retombait en arrière contre le dossier et sa bouche entrouverte m'offrait une vue d'enfer sur son épiglotte.
Je souris en tâtonnant la petite table du salon et trouvais rapidement mon téléphone. Gabriel sursauta brusquement lorsque le flash s'enclencha et je vis ses yeux noirs se posaient sur moi.

-Tu ne vas pas m'emmerder dès le réveil, quand même?grogna-t-il.
-Et! J'ai mal partout à cause de toi, m'offusquais-je faussement en croisant les bras sur mon torse.

Mon frère leva les yeux au ciel, comme s'il avait deviné à l'avance que je me serais plaint au réveil. C'était bien possible, Gabriel était doué pour anticiper mes réactions. Je me rappelais que, quand j'étais beaucoup plus petit, il comprenait même ce que je taisais aux autres. J'eus le temps de le voir monter l'escalier d'un pas lourd avant qu'il ne disparaisse dans sa chambre, probablement pour filer sous la douche.

-Ne prends pas trop ton temps, Gabriella, le narguais-je, comme d'habitude.

Ces cris me vinrent étouffer et je rigolais en me servant des céréales. Gabriel pouvait toujours jouer au brute avec les gens, mais j'étais probablement le seul qui le voyait tel qu'il était. Mon grand-frère, quoi qu'il en dise.

Papa arriva dans la cuisine avec des yeux encore tout plissés par la fatigue. Je regardais ses sourcils froncés formaient de petit canaux. S'il continuait comme ça, il aurait plus de rides qu'un Sharpai avant ses cinquante ans.

-Ça va, Papa?
-Ton frère est rentré tard, cette nuit?», demanda-t-il, légèrement inquiet.

Je secouais la tête de gauche à droite, le couvrant une fois de plus. Mais ce n'était pas trop grave, j'espérais bien qu'il en fasse pareil pour moi lorsque j'aurais Madelyne dans la poche. Je l'inviterais à des pique-nique nocturnes bien meilleurs que ceux des tocards dans les séries américaines, promis! Et puis, Gabriel avait besoin de sa liberté. Mes parents savaient qu'il n'aurait plus supporté d'être en cage.

-T'inquiète papa, Gaby, il gère!», m'exclamais-je en lui faisant un sourire rassurant.
-Ne l'appelle pas comme ça, tu sais qu'il déteste ce surnom, me gronda-t-il gentiment.

Gabriel redescendit à cet instant et j'observais sa tenue d'un œil d'expert. Il avait encore une fois pris deux vêtements au hasard. Et, à tout les coups, il avait été pioché ses chaussettes dans le panier de linge sale! J'étais probablement le seul garçon à m'en soucier mais un jour, je lui ferais un petit relooking, à notre Gaby. Parce que là, même ses groupies finirait par fuir. Je reposais mon bol dans l'évier et sentis une tape sur l'arrière de mon crâne lorsque je passais près de mon grand frère.

-Mais qu'est-ce que j'ai fait?!
-T'as pensé trop fort, JackyChan, ça me suffit, se contenta-t-il de répondre en mâchouillant une tartine.

Je partis me préparer sans répondre. Qu'aurais-je pu dire? Je plaidais coupable.
Mais je savais aussi que Gabriel avait besoin qu'on lui rappelle parfois certaines choses. Ce surnom, par exemple. Il ne l'aurait jamais avoué à voix haute, aurait probablement tabassé un inconnu qui l'aurait utilisé.... Mais s'il me laissait l'employait de temps en temps, c'était parce qu'il aimait ça. Il aimait redevenir l'ancien lui.
Et, merde, j'adorais ça aussi.

J'aimais mon grand-frère, même s'il me voyait seulement comme un morveux qui lui collait aux basques.

Il partit avant moi, son skate à la main. Il avait un petit sourire sur les lèvres et je me demandais quelle fille pouvait bien faire ce miracle. Ce n'était pas Vanessa, elle ne lui avait jamais rien apporté d'autre que des emmerdes.
Peut-être... Peut-être était-ce cette longue silhouette brune que j'avais entraperçu à ses côtés au gala du début d'année? J'aurais aimé que Gabriel m'implique un peu plus dans sa vie, même si sa fierté mal placée et son orgueil l'empêchait de se remuer l'arrière-train.

Fragiles (sous contrat d'édition) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant