Chapitre 2

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Les portes sont presque closes quand une main s'engouffre et les fait s'ouvrir à nouveau. Je souffle en baissant la tête ; il faut que je me reprenne. Je relève peu à peu les yeux. Il n'y a rien de si terrible à se retrouver avec un homme, seuls, dans un ascenseur... Et encore moins lorsqu'il s'agit du P.-D.G., Noah Beckham en personne !

— Vous ne m'avez pas entendu, Mademoiselle Lacour ?

Je sursaute quand il prononce mon nom et me redresse complètement. Je suis stupéfaite ! Je suis dans la boîte en tant que stagiaire et LE patron sait comment je m'appelle ! Il attend visiblement une réponse de ma part et me toise, bras croisés pendant que l'ascenseur commence son ascension.

— Désolée, Monsieur Beckham, j'étais perdue dans mes pensées.

Il hoche la tête et prend son portable dans sa poche et ne me jauge plus. Je me cale contre la paroi de l'ascenseur, j'ai les jambes tremblantes et la gorge sèche. Non seulement, je ne supporte pas d'être enfermée, mais l'être avec le P.-D.G. le plus séduisant et charismatique du design français n'arrange en rien ma situation. L'ascenseur s'arrête enfin, et telle une personne essayant de se sauver d'un immeuble en flammes, je m'élance pour sortir de cette boîte qui m'oppresse et bouscule, au passage, mon patron. Je bredouille à voix basse un « Désolée » avant de partir en courant en direction de mon openspace.

Noah Beckham me suit des yeux. Je peux sentir son regard posé sur moi et je me sens encore plus gênée. Ce n'est pas vrai ! Il va falloir sérieusement que je trouve une solution pour lutter contre cette phobie afin de ne plus passer pour la tarée de service. Sinon, c'est sûr, jamais Design & Co ne m'embauchera.

J'arrive à mon bureau et me mets directement au travail. Pas question de perdre une minute de plus, autant me faire discrète pour le reste de la journée. Barbara, la deuxième stagiaire qui travaille avec moi me fait un signe de la main pendant qu'elle continue de téléphoner à sa mère qui vit à l'autre bout de la France. C'est son rituel. Tous les jours, elle l'appelle en douce avant que notre boss tyrannique Cathy n'arrive. En parlant du loup, aujourd'hui Madame Pimbêche a sorti l'artillerie lourde : mini-jupe rouge, chemisier noir dont les boutons sont ouverts jusqu'à son soutien-gorge en dentelle rouge, chaussures à talons vertigineux et rouge à lèvres « écarlate ». Je vérifie vite fait son emploi du temps et je constate que c'est le jour de la réunion hebdomadaire avec le P.-D.G. Je comprends mieux son attirail aguicheur. Comme toutes les filles de l'entreprise, notre chère boss en pince pour le patron et fait tout pour se mettre en avant à chaque fois qu'elle en a l'occasion. Mais, visiblement, Noah Beckham reste insensible à son charme tapageur, puisqu'elle revient toujours avec un air penaud.

Cathy nous salue d'un bref hochement de tête et va s'enfermer dans son bureau. Il est tout juste neuf heures. La réunion est prévue dans une heure. Je n'ai qu'à lui apporter son café et prendre ses photocopies, et elle me laissera tranquille jusqu'au déjeuner, à moins qu'elle soit prise d'une lubie.

Je me rends dans le coin cuisine aménagé non loin de mon openspace et je prépare le café de Cathy, un café noir avec un nuage de lait et deux sucres. Enfin le nuage ressemble au plus gros cumulus qui existe tellement elle noie son café dedans, quelle horreur ! Ça s'appelle du caramel, et non du café ! Je ne comprendrai jamais les gens qui mettent du lait dans leur café. Pour moi, rien ne vaut un café noir sans rien qui modifie son arôme. Je me sers une tasse à mon tour et me dirige vers le bureau de Cathy. Je dépose au passage mon café sur mon espace de travail et je frappe à la porte.

— Entrez ! crie-t-elle, sans redresser la tête de son écran.

J'entre, la tête haute, mon plus beau sourire de façade fixé aux lèvres. Je la déteste, mais elle ne doit surtout pas le savoir. Je ne suis qu'une simple stagiaire et, sur sa demande expresse, je pourrais être virée du jour au lendemain avec perte et fracas, car je ne validerai pas mon cursus et que je devrais répéter mon année. Mon Dieu ! Même pas pour rire, je retourne encore un an à la fac ! J'ai déjà fait plaisir à Mattéo en poursuivant mes études et j'ai la chance d'avoir une mémoire photographique. J'apprends tous mes cours en les lisant une fois et je suis capable de réciter mot pour mot ce que j'ai lu, même des mois plus tard. La fac est une énorme perte de temps pour moi. Pas besoin qu'on m'explique mille fois les choses, j'assimile très rapidement et les journées de cours me paraissent une éternité.

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