Nouveau-Départ

Chapitre dix-neuf

Adeline me conduisit vers un étroit couloir au fond duquel se trouvait une unique porte. J'étais dans l'incompréhension la plus totale. Mes souvenirs devaient me jouer des tours car, cette porte autrefois, avait été une sorte de « garage » où les Tellier entreposaient tout, sauf leur voiture. Je me rappelais encore d'ailleurs, de la disposition des meubles dans cette pièce, autrefois. Mes yeux restèrent fixés sur cette porte, dominés par la peur d'enfreindre une règle fondamentale et de pénétrer sa safe place sans son accord. Je ne pus me résoudre à bouger ne serait-ce que l'un de mes orteils. Pendant ma guerre morale, je sentis un bras se glisser dans le mien. Cela eut le mérite de me sortir de ma torpeur, pour reporter mon attention sur la femme au sourire contagieux, qui était désormais à mes côtés. Adeline, évidemment. Sa main se fraya un chemin jusqu'à la mienne, paume contre paume.

- Alors ma chérie, tu hésites ? Je peux comprendre... mais tu sais, je peux te promettre que tu n'as pas à appréhender sa réaction. J'en viendrais même à me demander, si il ne serait pas ravi de te faire rentrer dans son univers. C'est toi Nadia, sa Nana, comme il l'a toujours dit ! Si tu ne possèdes pas l'autorisation d'y rentrer alors je peux t'assurer que personne n'en aura le droit.

Ces mots me procurèrent un peu de courage. Elle avait raison après tout. Sa mère déjà, ne pouvait pas pénétrer son univers, alors si moi non plus je n'en avais pas le pouvoir, personne ne le pourrait, jamais. J'inhalais une grande bouffée d'air, me gonflant à bloc de détermination. Je croisais le regard motivant d'Adeline, qui était justement, ce qu'il me manquait pour m'aventurer dans cette dimension parallèle. Je mis ensuite mes jambes en action et me retrouva en un rien de temps, devant la fameuse porte. Sa poignée me faisait face, m'invitant à entrer sans plus de sérénades. Quand je fus enfin préparée psychologiquement à la réaction de Félix et à ce que j'allais y découvrir, j'essuyais mes mains moites sur mon pantalon et appuyais délicatement sur celle-ci.

Je m'infiltrais prudemment dans cette pièce qui m'était jusqu'ici inconnue. Mes yeux se promenaient dans les moindres recoins, essayant péniblement d'identifier des éléments malgré l'obscurité environnante. Seulement des leds violettes situées aux quatre coins des murs, éclairaient faiblement la pièce. Lorsque mes yeux s'y adaptèrent complètement, je pus à ce moment-là voir distinctement ce qui décorait cette pièce.

Des dizaines, non, des centaines de clichés recouvraient les murs. Au centre, traînait plusieurs tables, agencées de manière à ce que Félix puisse avoir accès à son matériel rien qu'en se retournant. J'aperçus aussi non loin de là, posé sur une mini bibliothèque un lecteur de vinyle avec évidemment plusieurs d'entre eux, jonchant ses étagères. Comme ça m'étonne...

Je continuais ma progression, m'incrustant au milieu des tables et commençait à examiner son milieu de travail. J'avais un nœud dans la gorge, je ne pouvais m'empêcher de me dire qu'en étant là, je violais son intimité. J'effleurais du bout des doigts toutes ses machines et un frisson me parcourut.

- Bouh !

Je bondis de frayeur en infligeant une lourde claque à l'individu qui s'était tapé l'incruste derrière moi. Visiblement mes capacités d'auto-défense sont toujours aussi efficaces. Malheureusement je m'en voulu aussitôt quand l'apparence de cet inconnu qui se tenait la joue en geignant se dévoila :

- Putain Nana, c'est moi... et dire que c'est censé être mon endroit et pourtant c'est moi qui me prends une raclée... aïe !

- Oh mince, Félix ! Je suis désolée, c'était un réflexe... tu sais très bien pourtant que je déteste que l'on me surprenne comme ça ! Alors forcément, celle-là, elle est partie !

J'indiquais ma main d'un coup de menton. Le malheureux couvrait son nez de sa main droite, son visage déformé en un rictus de douleur. Je m'approchais alors de lui, comme attirée irrésistiblement. Il faut avouer qu'il est tout de même vachement sexy en ayant mal.