Tristesse nostalgique

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Des regards, des chuchotements. Voilà ce dont elle avait droit continuellement au lycée.

Elle les ignorait royalement, c'était moins difficile que de faire comme si ne rien était quand elle se faisait tabasser dans cette ruelle.

Tant qu'on ne lui faisait pas de mal, elle pouvait aisément les ignorer.

Le seul problème était qu'elle pouvait croiser Thomas n'importe où. Comment éviter un élève de son propre lycée ?

Cléa continua d'avancer, la tête haute, entre les élèves qui s'écartaient instinctivement sur son passage. Ils ne voulaient rien avoir à faire avec elle, de peur d'avoir affaire à Thomas.

Ah, Thomas...

Cléa l'avait rencontré il y a longtemps, au collège. Il venait de déménager à côté de chez elle, et les parents de la jeune fille lui avait demandé d'aller accueillir les nouveaux arrivants avec des gâteaux, ce qu'elle avait fait, de mauvaise grâce.

C'est Thomas qui lui avait ouvert quand elle avait sonné à la porte.

Ses cheveux bruns, plutôt longs, l'avait d'abord intriguée. Puis elle avait posé son regard dans ses yeux noisette, et elle s'était dit qu'ils pourraient peut-être devenir amis.

Et à partir de ce jour ils se voyaient régulièrement. Il était allé au même collège qu'elle, puis au même lycée. Elle avait redoublé sa Seconde, puis il avait redoublé sa Terminale.

Quand elle avait su cela, Cléa avait pleuré. Tout avait déjà basculé à ce moment-là, sa relation avec Thomas aussi.

Elle ferma son casier, ainsi que ses yeux. Ce n'était pas le moment de ressasser le passé. Après tout c'était fait, il fallait qu'elle vive avec maintenant.

La jeune fille se retourna et s'en alla vers son cours de maths, ignorant à nouveau les regards qui la suivaient.

Vivement que la journée se termine.

*

La sonnerie retentit, signe que tous les élèves étaient maintenant libres d'aller où bon leur semblait. Beaucoup iraient à des fêtes, organisées par les élèves les plus influents de l'école. Thomas en faisait partie.

Le week-end était là, et chacun avait sa façon d'en profiter.

Pour Cléa, c'était une bouffée d'air frais, s'insinuant dans ses poumons tel un antidote à sa tristesse et sa colère perpétuelle. Elle se leva de sa chaise en première, désireuse de sortir avant tout le monde. Quand elle passa la porte de la salle, ses affaires dans ses bras, elle sentit l'ensemble des regards des élèves de sa classe la suivre. Ce n'était pas agréable, mais elle préférait cela à sortir en dernière. Une fois, on l'avait attendue à la sortie.

Elle ne referait plus jamais cette erreur.

Cléa passa la porte du lycée, arrivant dans la cour déserte.

Le vent tiède de cette fin d'été l'aida à se détendre, et c'est d'un pas rapide mais sûr qu'elle passa les grilles, quelques instants plus tard. Elle était libre, enfin.

Elle ne prit pas le chemin pour rentrer chez elle, l'idée de se terrer tel un animal apeuré dans son appartement ne l'enchantait pas du tout. Puis elle voulait profiter de la chaleur encore agréable de ce mois de septembre, car elle savait que l'hiver arriverait de toute façon, bien trop vite à son goût.

Alors ses jambes la menèrent instinctivement au parc, cet endroit était plutôt petit, et peu fréquenté. Il n'y avait qu'un toboggan ridicule qui n'intéressait pas les enfants, préférant la balançoire de l'autre côté de la rue.

Mais Cléa aimait ce parc pour une raison évidente. Un cerisier immense trônait au milieu, étendant ses branches autour de lui, semblant créer un bouclier protecteur à celui qui voudrait s'asseoir sur le banc posé juste en dessous. La jeune fille aimait bien cette vision, car c'était ce qu'elle ressentait quand elle prenait place sur ce petit banc, le blanc originel de sa peinture s'étant lentement transformé en gris sale au fil des années.

Mécaniquement elle s'assit sur le côté gauche du banc, laissant la place pour une éventuelle personne, malgré le fait qu'elle avait toujours été seule ici.

Elle sortit les crayons et le papier de son sac et commença à dessiner.

La jeune fille ne sût pas depuis combien de temps la mine de son crayon courrait sur la feuille quand une voix masculine l'interrompis.

-Bonjour ?

On entendait clairement le point d'interrogation à la fin de sa phrase, comme s'il n'était pas sûr qu'elle l'ait entendu, ou qu'elle daigne lever la tête pour lui répondre. Mais pourtant Cléa releva effectivement la tête, étonnée que quelqu'un lui adresse la parole.

Un jeune homme de son âge, ou à peu près, était debout devant elle, et semblait un peu gêné. Il avait des cheveux coupés courts, et de beaux yeux bleus profond. Il n'était pas spécialement grand.

-Je peux m'asseoir ? demanda-t-il avec un sourire gêné et en montrant le banc du doigt.

Cléa décida qu'il devait être sympathique et lui retourna son sourire.

-Bien sûr, répondit-elle simplement.

Puis elle ramena son regard vers son dessin, mais il ne mit pas longtemps à reprendre la parole.

-Comment tu t'appelles ?

-Cléa, répondit-elle doucement.

Elle se demandait qui pouvait bien être ce jeune homme, s'il habitait la ville il devait savoir qu'elle n'était pas une personne fréquentable. Loin de là.

-Et toi ? osa-t-elle pourtant demander.

-Léo.

La jeune fille l'observa un instant. Elle était sûre que la plupart des filles de son lycée l'aurait qualifié de beau, charmant, sexy, ou n'importe quoi dans ce genre. Mais ce n'était pas ce qui attirait Cléa, en fait elle ne savait pas vraiment ce qui l'attirait chez un garçon.

Puis il posa une autre question.

-Que dessines-tu ?

Cléa se demanda un instant si elle lui avait tapé dans l'œil, d'une façon ou d'une autre, et que c'était une technique pour faire le premier pas. Mais elle chassa cette pensée idiote et préféra lui tendre la feuille.

Le regard bleu du jeune homme se posa sur le papier.

Cléa avait simplement voulu dessiner le cerisier, vu par une personne qui passait dans la rue, en face d'elle. Et sur le banc, elle avait ajouté une jeune fille assise, en train de dessiner. Cette fille la représentait évidemment. Et elle avait peur qu'il trouve cela un peu narcissique.

Mais ce qu'il dit ensuite était à l'opposé de ce qu'elle pensait.

-Elle semble tellement seule, dit-il.

-C'est parce qu'elle l'est, répondit Cléa.


Voilà le chapitre 2!

J'espère qu'il va vous plaire! (n'hésitez pas à me dire si c'est le cas ou pas!)

Bisous à tous, je vous aime!!

CrazyIsBeauty


Sous le cerisier [en pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant