Chapitre XVII

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Ça fait plusieurs minutes maintenant qu'il a terminé son histoire. On dirait qu'il attend quelque chose, il reste là assis sur le lit, le regard allant de moi à la porte, de la porte au sol, puis aux murs, aux armoires, en bref il inspecte toute la pièce. Je suis toujours en train de m'interroger. J'ai envie de lui poser toutes mes questions, mais j'ai un peu peur de sa réaction, il est assez imprévisible. Surtout que je n'ai aucune idée de ce qui lui passe par la tête en ce moment.

Finalement il se lève et sort, sans que ni lui ni moi ne place un mot de plus. Je finis par m'endormir sur mes réflexions.

*****


Ce matin Ben est sorti plus tard que d'habitude et les filles ne sont pas allées à l'école. Je ne sais plus quand nous sommes, j'ai perdu la notion du temps. Mais soit c'est le week-end ou alors c'est un jour férié. Je suis à la cuisine, en train de réfléchir à comment sortir d'ici. La cuisine et ma chambre sont les seuls endroits où je peux rester sans être chassée.

- Dégage. Tu me bloque le chemin.

Sans même me retourner je reconnais la voix cassée de Michelle. En me mettant face à elle je me rends compte que qu'il y a au moins 10 mètres qui nous séparent. Comment est-ce que je lui barre le chemin ? Je n'en ai aucune idée. Je me recule tout de même, la laissant aller chercher un verre qui ne ressemble pas du tout aux autres dans un coin que je n'avais même pas remarqué. C'est normal qu'elle connaisse plus d'endroits que moi, elle est là depuis plus longtemps. Soudain une idée me vient. J'attrape le bol le plus proche et le plus sale et lui demande :

- Tu peux m'accompagner ou juste m'indiquer où se trouve l'ancienne niche ? Monsieur m'y a envoyé mais je ne sais pas où c'est.

- Qu'est-ce que tu veux faire là bas ?

- Déposer ce bol.

J'espère juste être crédible, sinon je suis foutue.

- Pourquoi ?

- Je ne pose pas de questions lorsqu'il m'envoie, je m'exécute seulement.

- Pourquoi t'envoyer dans un endroit que tu ne connais pas ?

Et toi, pourquoi me poses-tu autant de questions ? Je saisis tout de même la perche qu'elle me tend.

- Je devais y aller avec Chris, mais je ne le trouve pas. Si tu savais où il était ça pourrait t'épargner la peine de m'y accompagner.

Elle réfléchit un instant, pendant ce temps je croise les doigts et fais de mon mieux pour ne pas paraître aussi angoissée que je le suis.

- Mouais, dit-elle en sortant des clés de sa poche de pantalon. Je ne sais pas exactement dans quelle chambre il est, t'as qu'à te débrouiller.

Puis elle sort en me bousculant au passage. Mais je n'en ai plus rien à faire. Si je trouve Chris, je le sors de là, il me montre où est Yann, et ensemble on s'enfuit de cette maudite maison et de ses habitants. C'est beau. Trop beau. Et si Ben arrive bientôt ? Il faut que je me dépêche.

Sans plus tarder je me précipite à l'étage, devant la porte où je l'avais trouvé l'autre jour, et je tourne la clé dans la serrure. Elle ne correspond pas. J'essaye encore, toujours rien. Soit Ben a changé la serrure, soit il a mis Chris dans une autre pièce. Je m'engage alors dans une recherche intensive de la porte correspondant à la clé. Je fais du plus vite que je peux. N'importe quelle personne me voyant à ce moment aurait dit que j'étais folle. Ou désespérée. Ou folle.

Ça fait près de vingt minutes que je cherche, vingt minutes d'inquiétude et de coulées de sueurs froides. Alors que je commence à désespérer, et à me dire que cette clé n'est peut-être pas si utile, la toute petite porte grise en face de moi cède, à ma grande surprise. C'est la main tremblante que je pousse celle-ci, j'ai appris à avoir peur des pièces fermées à clé.

C'est une petite salle poussiéreuse et sans dessus dessous. Il y a des canapés renversés, des armoires cassées, des horloges et des tables partout et n'importe où. Lorsqu'on ajoute à ça la poussière, ça devient un endroit invivable. Je couvre mon nez de ma main avant d'avancer dans cette sorte de dépotoir.

- Chris tu es là ? C'est Moi Rachel. Si tu es là viens on va sortir d'ici.

Un bruit. Un tout petit bruit.

- Rachel ?

Je me retourne instinctivement vers la voix innocente de cet ange emprisonné. Il est dans de meilleures conditions que la dernière fois, si ce n'est la saleté sur ses vêtements.

- Viens là.

Je lui ouvre mes bras dans lesquels il vient se nicher en courant.

- Ça va ? Il ne t'a rien fait ?

Il recule sa tête pour me répondre, je constate qu'il pleure.

- Je suis tellement désolé, Rachel. Je t'ai trahi, j'ai dit que tu étais venue me voir. J'ai d'abord menti, mais il a dit qu'il allait me faire du mal et que de toute façon il savait déjà, que j'avais juste à avouer.

Je vois le petit garçon devant redoubler d'intensité de pleurs en se confondant en excuses.

- Chhh ça va, ne pleure pas, il ne m'a pas fait de mal. Ne t'inquiète pas.

C'est un demi mensonge, mais je veux seulement qu'il se calme. Ça a l'air de marcher.

- C'est vrai ?

Je hoche la tête et essuie ses larmes. Dans ce moment de silence, j'entends les ronflements d'une voiture que je reconnaîtrais entre mille. Il faut se dépêcher.

- Écoute, il faut qu'on s'en aille au plus vite. Tu connais un chemin pour sortir sans passer par devant ?

- Oui mais c'est un peu long.

Ben est déjà entré dans la maison, donc si on sort d'ici et qu'il s'en rend compte il va nous rattraper. Je ne peux pas remonter dans ma chambre, il va remarquer d'où je viens rien qu'avec mon odeur et la saleté sur mon habit. Je me précipite à la porte et la bloque avec ma clé, au cas où il viendrait ici.
" Alors, tu vas essuyer tes larmes, et si Ben vient tu ne m'as pas vue OK ? Ne regarde même pas dans ma direction sinon on est fichu tous les deux. Mais n'ais pas peur non plus d'accord ?" Sans attendre sa réponse je cours me cacher derrière un meuble abandonné le coeur battant et prie pour que Ben ne se rende compte de rien.

...
Qu'est-ce que vous pensez pour la suite ? J'espère que tout le monde va bien.
God bless you all
Kisses :-**

Adoptée et maltraitée [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant