Arabesque (tome 1) : Entre deux danses

Partie 12 : Douzième Pointe

Pov Shira :

Les jours suivants furent brillamment sombres : assez courts pour me faire regretter les minutes, trop longues pour vraiment les apprécier.
Mon petit génie apprenait vite.

Je me doutais qu'elle ne voyait sûrement aucun intérêt à faire tous ces exercices mais je pouvais déjà constater un changement : elle respirait d'une façon plus régulière après les séances et sa concentration s'était nettement améliorée. Je m'étais vite rendue compte que c'était là son talon d'Achille : penser à autre chose la déconcentrait au point de perdre tout moyen.
Si une situation pareille venait à se reproduire, elle aurait dorénavant la force nécessaire pour se plonger pleinement dans son seul et unique objectif : danser.

Je ne faisais bien sûr pas tout cela par pure bonté d'âme.
J'étais trop égoïste pour cela.

Ces séances m'apportaient un certain répit, il m'était même arrivé de les attendre avec impatience.

Au début, la voir souffler comme un bœuf en m'assassinant du regard m'amusait.
Maintenant que Maryane avait grimpé les échelons de mon parcours du combattant personnalisé, nous pouvions avoir de réelles conversations.
D'ordinaire muette et asociale, je me laissais aller avec plaisir, appréciant de connaître certains aspects de sa vie...

Je m'étais attendue à être mitraillée de questions or, il n'en était rien.
Ne pas en savoir plus sur moi n'avait plus l'air de la déranger.

Heureusement...

J'aperçus certaines facettes de sa personnalité qui m'avaient presque fait sourire.
Sa ténacité, par exemple.

Cette fille était têtue...Une ânesse le serait moins.

J'avais commis l'effronterie de lui faire débattre le meilleur groupe de musique qui soit.
Madame pensait que Téléphone surpassait Kyo qui, selon moi, valait tous les groupes existants.

Dernière danse est une vrai pépite...

Comme tous les autres titres d'ailleurs.

Nous nous étions donc lancées dans le plus long débat musical au monde, chacun essayant de rallier l'autre à sa cause.
Une tâche impossible pour sûr, mais je m'en fichais.

La voir s'énerver était rafraîchissant: la peau rougie jusqu' au bout des oreilles. Je m'étais attendue à voir de la fumée sortir...J'appris donc qu'en cas d'agacement, elle pointait furieusement son index en ma direction et plissait ses yeux.

Je trouvais ça mignon.

Qu'est-ce que j'ai avec ce mot ? Ça fait quand même deux fois que je l'utilise...Je dois me ramollir.

J'avais découvert de petites choses insignifiantes sur elle qui me paraissaient pourtant lourdes de sens : sa couleur préférée, le turquoise, en passant par ses sensibilités autres que la danse...

Tout me paraissait important.

En la voyant si épanouie, je pris enfin ma décision : je ne laisserai personne me briser à nouveau.

Il ne me restait donc qu'à partir...et le plus tôt serait le mieux.

Je me laissais jusqu'à demain soir, une fois que la compétition de Maryane commencerait.

Une ombre pour une ombre...

Adeline avait sûrement vendu la mèche, mais qu'importe.

Ils pouvaient tous aller au diable !