13 : Confidences

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(Pdv Olivia)

L'échange de regards durait, durait sans faillir. Jay ne pouvait plus détourner les yeux de ce petit garçon, fruit des entrailles de son frère. Il semblait d'ailleurs dans le visage du bambin quelques marques de la famille Marchal : le nez droit, les grands yeux sombres et le regard perçant, scrutateur. Un enfant aussi jeune pouvait-il vraiment avoir un regard si adulte ? Leur communication était télépathique, leurs émotions indéchiffrables.

Après quelques instants, Mademoiselle Clark s'accroupit près de Zach afin de se mettre à son niveau puis lui prit les mains pour qu'il porte son attention sur elle un court instant.

-       Jay n'est pas ton papa, Ezéchiel.

-       Si !

Alors le petit ange se mit à bouder, croisant les bras sur son ventre rebondi de poupon. Je crus reconnaître Jay dans les mimiques de l'enfant. Lui et Daniel devaient vraiment se ressembler comme deux gouttes d'eau. Mademoiselle Clark se releva, tremblante. Elle se tourna vers moi, un sentiment d'impuissance dans le regard. L'aiguille faisait son bout de chemin sur l'horloge devant nous et une bonne vingtaine de minutes s'était passé dans ce silence religieux. Soudain, une sonnerie retentit, me vrillant les tympans au passage.

-       C'est l'heure de pause. Les enfants sortent dans la cour pour prendre un peu l'air, m'expliqua la directrice.

Elle m'indiqua du regard les deux hommes qui continuaient leur duel de regard sans faillir. Elle ne devait pas avoir très envie de se frotter à l'homme ivre et hagard qui occupait la chaise en face de son petit orphelin protégé. Je m'approchai donc et posai ma main sur l'épaule de Jay, me voulant rassurante.

-       Je suis désolée Jay mais Ezéchiel doit y aller.

Je l'entendis déglutir difficilement et les yeux de Zach larmoyèrent. Les adieux semblaient déchirants. Il se leva et prit dans ses bras l'enfant qui entoura son cou des siens. Ensuite, il lui murmura à l'oreille les seules paroles qu'il prononcerait aujourd'hui dans cette bâtisse, choisissant avec soin ses mots.

-       A bientôt Zach. On se reverra bientôt, c'est promis.

Il embrassa le front de son neveu tout en le reposant à terre puis, sans adresser un geste à la directrice que je remerciais de tout mon cœur, il s'avança vers la sortie. Il titubait toujours un peu, portait sa veste sur une épaule. Il poussa la porte sans m'attendre, alluma une cigarette et la mit au coin de ses lèvres avant de marcher jusqu'à la voiture sans prononcer une parole. Son visage était encore plus inexpressif que celui des Statues Moai.

-       Merci, dit-il en s'asseyant en fin dans la voiture dans laquelle j'attendais patiemment qu'il ait fini de fumer.

-       Eh bien ... de rien ! répondis-je alors, craignant tout de même une réaction tout à fait opposée la minute suivante.

-       C'est la dernière trace de Daniel sur cette Terre. Je protégerai ce gamin. Pour mon frère et pour Jenna.

Il tourna enfin la tête vers la vitre et regarda les arbres défiler tout le long du chemin, laissant la musique combler un malaise palpable. Puis il s'endormit, laissant Morphée dissiper les dernières effluves d'alcool. Lorsque nous arrivâmes chez lui, Jay était tout à fait en forme et plein d'énergie. Avant même que je n'eus coupé le moteur, il se rua hors de l'habitacle et vint m'ouvrir la portière.

-       Gentleman, lui souris-je.

-       Et pas que !

-       Quoi d'autre ? demandais-je, un soupçon de défi dans la voix.

Killer LoveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant