Jour +151 et une minute : Clément.

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Elle est belle. Mon dieu, qu'elle est belle ! Elle l'a toujours été, évidemment ; mais là, heureuse et reposée, à l'abri des regards et des complots... Elle resplendit.

J'ai envie de la serrer dans mes bras de la faire tournoyer dans les airs, de l'embrasser et de lui faire l'amour. Je sais bien que je ne peux pas penser ça, que je devrais plutôt me dire que je veux me cacher ici pour le reste de ma vie tant qu'elle est avec moi – et je le pense aussi ! Mais là, tout de suite, ce que je souhaite, c'est me fondre en elle, et que nous ne formions plus qu'un devant l'Éternel. Comment ai-je jamais pu la laisser partir ? Comment j'ai pu croire que je pourrais sortir avec quelqu'un d'autre (quelqu'un comme... Maëlys ?).

Je l'aime. Je l'aime, je l'aime, je l'aime...

" Bonjour ", j'articule, et cela sonne de manière fort pathétique, surtout après la douceur de sa voix à elle. Elle est de ces filles que tout le monde se tait pour écouter avant même qu'elle ouvre la bouche... Elle est de ces filles que les artistes prennent pour muse, elle aurait pu – elle aurait dû – inspirer tous les plus beaux poèmes, les plus beaux tableaux, les plus beaux films.

Et moi, à côté d'elle, je n'arrive même pas à m'en tenir à ce que j'avais prévu. J'aurais dû le lui dire. J'aurais dû l'embrasser comme je l'avais prévu, j'aurais dû...

Et puis, un type se pointe. Grand, beau, bronzé. Heureux. Pas étonnant qu'elle soit si resplendissante si quelqu'un comme lui s'occupe d'elle... Serais-je jaloux ? Je ne l'ai jamais été. Et puis, je n'ai pas le droit de lui en vouloir. Après tout, j'ai bien reçu sa lettre... et j'ai été bête. Au début, j'avais simplement refusé de la lire. Puis, quand je l'avais enfin fait, j'avais tout de suite deviné où elle était partie, bien sûr, mais le fait qu'elle ne m'ait rien dit, qu'elle ne m'ait pas prévenu, qu'elle n'ait même pas tenté de m'appeler... J'étais énervé. Jaloux. De mon propre meilleur ami, ce qui est le comble... J'avais compris et accepté ses raisons, mais que les révélations aient éclaté ou pas, il n'en restait pas moins que notre relation était... dangereuse. Que je ne pouvais pas garder ma vie et être avec elle. Alors j'ai essayé de sortir avec Maëlys, en me disant que je pourrais peut-être l'aimer comme j'aime April... Ça n'a pas marché.

Et là, je regarde dans les yeux de la femme que j'aime et je comprends très bien pourquoi aucune autre relation ne pourrait marcher.

Personne n'a ces yeux de chats, couleur de jade, clairsemés de poussières d'or... Personne n'a cette chevelure, personne n'a cette voix, personne n'a cette douceur, personne n'a cette gentillesse, cette manière de rêver les yeux ouverts...

Elle me voit enfin... Ses yeux s'éclairent. Elle est si merveilleuse !

Elle s'approche de moi, sa longue robe un peu translucide vole autour d'elle, comme si elle courrait, alors qu'elle marche bien trop lentement. Autour de ses poignets chantent de fins bracelets d'or et de cuir lorsqu'elle prend mon visage entre ses mains pour m'embrasser ; je lui rends son baiser, et je suis l'homme le plus chanceux du monde. Et puis, lorsqu'elle s'éloigne de moi après ce baiser d'une infinie douceur pour m'observer, elle rit, c'est comme entendre des oiseaux chanter, et je reste bouche-bée devant tant de musicalité. La musique est partout aux oreilles de qui veut l'entendre, et je n'entends plus que cela... Je ne sais pas quoi dire, de toutes façons. Que peut dire un mortel à Aphrodite ?

- Tu as perdu ton plâtre, elle remarque, et je cherche quelque chose de spirituel à répondre, mais rien d'autre ne vient que :

- Je t'aime.

Elle reste stupéfaite quelque seconde, puis elle rit. Elle ne m'a pas souvent signifié qu'elle m'aimait en retour ; et si elle s'était trouvé un marocain ? Si je n'étais plus qu'un lointain souvenir à ses yeux ? Si elle ne m'avait embrassé qu'en souvenir du bon vieux temps ?

Elle ne me répond pas. Elle prend le livre que je feuilletais, et me le tend ; ça ne veut rien dire, mais je comprends. Les livres qu'elle lit lui donnent la vie, lui apprennent l'amour. Et elle sait aimer, désormais.


April By Night 2 : Ain't No Sunshine.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant