C H A P I T R E Quatre

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Problème
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« En mariage ? Il t'a demandé en mariage ? » S'exclama Anna, à la fois ravie et ébahie.

Elsa hocha de la tête, contrite. Assise dans le boudoir du palais, Anna s'occupait tranquillement de lui coiffer les cheveux quand elle avait fini par tout raconter.

« Elsa ! C'est merveilleux !

- Merveilleux ? S'offusqua sa soeur. En aucun point ! Ce mariage ne ferait que lui apporter mon "influence" comme il lui a plu de me dire !

- Si tu m'as bien tout rapporté dans les moindres détails, alors c'est on ne peut plus faux. N'a-t-il point évoqué l'attachement qui le liait à toi ? Il était sans doute si apeuré de te faire une telle proposition et que tu la refuses qu'il t'a donné tous les arguments possibles et favorables à votre union. » Dit Anna d'un ton docte en lançant un regard à sa soeur dans le miroir qui leur faisait face.

Elsa, sceptique, se contenta de soupirer. Elle avait vécu cette demande comme une trahison, et le poids qui grandissait sur son coeur ne cessait d'enfler. Pourquoi le Prince, non, désormais le Roi William avait-il décidé de rompre leur amitié d'une manière si brutale ? Pourquoi avait-il fallu que ce soit la mort de l'un de ses proches qui le pousse à la lui faire, cette proposition ?
Peut-être aurait-elle fini par accepter un jour...

Elle s'extirpa du siège, interrompant Anna dans son geste, et s'avança jusqu'à la fenêtre encadrée d'un bois d'ébène où elle passa tendrement ses doigts. L'époque de la neige arrivait, amenant avec elle le froid et la glace, opacifiant les carreaux du palais et enfermant le Royaume dans un écrin gelé.

« J'aimerais que la joie m'emporte comme elle semble le faire sur toi » Dit-elle tout en fixant des yeux la houle qui malmenait les arbres à l'extérieur. « Cependant ce n'est pas le cas, et je ne peux me forcer à cela.

- Elsa, si tu ne l'aimes vraiment pas, si la seule chose que tu éprouves pour lui n'est que cette faible affection, alors ne l'épouse pas. »

« Même si cela empêche ton bonheur ? » Songea Elsa avec douleur. Elle n'en dit rien, embrassa sa sœur et partit au conseil quotidien qui l'attendait.

Réunis autour d'une table ronde où, en sa qualité de Reine, elle se plaça sur le plus grand siège, les conseillers ainsi qu'associés du Royaume devisaient à voix basse, inquiets.

Elsa se racla la gorge pour leur rappeler sa présence, et tous se dressèrent, alertés.

« Je constate l'absence du Pr... Roi d'Enedia, fit remarquer Elsa en fixant l'emplacement vide de William avec soulagement.

- Il ne devrait pas tarder, Votre Majesté. Son Altesse Royale a eu quelques empêchements. » Lui répondit-on.

Mais un homme arriva, annonçant à tous que William avait quelques soucis de dernière minute à régler et qu'il ne pourrait être présent. Bien, se dit Elsa, satisfaite. Elle n'aurait pas à l'éviter des yeux durant toute la durée du conseil.

« Nous ferons part des décisions prises par le conseil au Roi William plus tard. Annonça-t-elle. Des sujets à aborder avant que je ne commence ? »

Elle leva la tête vers les femmes et hommes qui l'entouraient. Tous parurent se ratatiner sur leur siège. Elle fronça les sourcils.

« Puis-je savoir ce qu'il vous arrive ?

- Votre Majesté, c'est que... Le problème qui vient de nous tomber sur les bras est si lourd qu'aucun de nous n'a le courage de vous en parler.

- Me parler de quoi ? »

Décidément, cette journée allait de mal en pis. Elsa se prépara à la pire des nouvelles, et elle ne fut pas déçue :

« Nous avons reçu les résultats du Trésor de la couronne, votre Majesté, et ils sont on ne peut plus inquiétant.

- Inquiétant ? Je pensais que de ce côté là, nous étions à l'abri ! » S'écria Elsa, surprise.

Ils se lancèrent un regard désappointé.

« Nous le croyions aussi, c'est pour cela que nous avons été véritablement étonnés en voyant qu'il restait bien trop peu pour un Royaume de notre envergure ! » Reprit la conseillère d'une voix blanche.

On lui tendit une feuille où était inscrit un nombre conséquent de chiffres. Elsa suivit une ligne du doigt et se sentit pâlir. Aussi peu ? Comment était-ce possible ? Ses parents avaient pourtant tout fait pour mettre le Royaume hors de danger financièrement ! Était-ce... De sa faute ?

« Que pouvons-nous faire pour échapper au désastre ? S'enquit-elle en quittant la feuille des yeux.

- Il y a plusieurs solutions. Augmenter les taxes des habitants, arrêter les constructions d'école prévues, supprimer les emplois inutiles...

- Non ! S'épouvanta Elsa en pensant aux conséquences qu'auraient ces actes. N'y en a-t-il pas d'autres ? D'autres qui ne concerneraient en aucun cas le peuple ? »

Ils secouèrent négativement la tête de concert et Elsa, abasourdie, s'enfonça sur sa chaise. Qu'allaient-ils faire ?

La solution lui vint aussi rapidement qu'elle la dégouta. Elle serra les poings mais ne pût empêcher quelques flocons de s'échapper du plafond pour se poser sur les conseillers.

« Je sais comment résoudre ce problème. Maintenant, n'en parlons plus, voulez-vous. » Dit-elle en ignorant volontairement leurs regards curieux.

À la fin de la journée, elle s'échappa de la salle du conseil ainsi qu'aux questions de ceux qui l'entouraient dans la charge du Royaume. Elle avait autre chose à affronter, une personne qu'elle n'avait pourtant pas envie de voir mais qui lui était nécessaire.

Elle se plaça devant la porte, se permit une grande inspiration, et toqua.

L'homme lui ouvrit rapidement et parut surpris de la voir.

« Elsa ?

- William. Je crois que notre conversation de la veille n'a pas été terminé. »

Déconcerté, il voulut la laisser entrer mais elle refusa. Les mots honnies finirent par sortir, enfermant Elsa dans une promesse qu'elle n'avait pourtant jamais songé à tenir.

Dangereuse (Jelsa)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant