C H A P I T R E Sept

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Le Refuge
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Elsa se laissa emmener par les inconnus sans opposer la moindre résistance. Elle se sentait vidée, harassée, et à la seule pensée d'un endroit confortable prêt à l'accueillir, elle s'en trouvait réconfortée, même si elle courait peut-être tête baissée dans un traquenard.

Jack, conscient que dans son épuisement, elle en était d'autant plus dangereuse, ne consentit pas à lâcher sa main et garda toujours un œil vigilant sur elle.

Les autres individus - seulement deux - composaient le cortège : de ce qu'Elsa avait compris, tout ce beau monde était censé trouver et ramener au Refuge les gens comme elle, possédant d'étranges pouvoirs qui leur était dur à contrôler. L'homme qu'elle avait attaqué l'avait d'ailleurs repéré bien plus tôt, lorsqu'elle avait gelé une voiture - le monstre de ferraille - et l'avait suivi discrètement pour éviter qu'elle ne blesse d'innocents citoyens.

« Le Refuge est là pour contenir ceux qui sont considérés comme dangereux pour la société, ceux qui possèdent des pouvoirs dont personne ne doit connaître l'existence » lui expliqua Jack alors qu'ils dévalaient rues et avenues au trot. « Mais c'est aussi leur foyer, leur point de repère quand ils ont été abandonné. »

Elsa trouvait ce concept formidable, même si elle aurait aimé que sa magie soit autant acceptée dans ce monde que dans le sien.

La jeune femme remarqua rapidement que plus ils s'éloignaient du centre de la ville - toujours d'après ce que Jack, peu désireux de laisser le silence s'installer, lui avait dit -, plus les rues s'élargissaient. Les maisons s'abaissaient mais leur taille augmentait et la verdure apparaissait fréquemment sur les bordures des trottoirs gris.

Ils arrivèrent finalement devant un grand bâtiment qui fit froncer les sourcils de la jeune femme, tant elle était peu habituée à une pareille architecture. Tandis que Jack, dont la vue lui était ordinaire, l'aurait décrit comme un manoir sobre mais moderne, Elsa le voyait tel un étrange établissement couleur argile qui jurait avec le Palais de nacre dont ses yeux avaient l'habitude. Ils passèrent le portail et le jardin plongé dans l'obscurité les séparant de l'entrée puis pénétrèrent sans plus de cérémonie dans le Refuge, ne laissant même pas à la Reine d'Arendelle l'occasion de le contempler plus longtemps.

« Je te ferais visiter demain. Je pense qu'il faut que tu sois pleinement reposée pour apprécier le Refuge... Et aussi pour nous conter ton histoire. » Lui confia-t-il d'un ton amusé.

Elsa, gênée, ferma rapidement la bouche en se rendant compte qu'elle baillait ouvertement et sans retenue, ce qui n'était pas dans ses habitudes mais que Jack avait bel et bien remarqué.

La mention de son histoire la fit se raidir. Qu'allait-elle bien pouvoir leur dire, alors qu'elle-même ne savait pas où elle se trouvait et ce qu'il avait bien pu lui advenir ? Comment expliquer quelque chose d'inexplicable ?

Pendant qu'ils parcouraient les couloirs du Refuge, baignés d'une lumière tamisée pour éviter de heurter la sensibilité de leur rétine, Elsa décida qu'il était temps de retirer sa main de la poigne sévère du jeune homme maintenant qu'ils étaient à l'intérieur, et il la laissa faire sans protestation.

Bientôt, le groupe se sépara au détour d'un couloir : Cindy - c'était le nom de la brune - ainsi que Henry, portant sur son dos l'homme qu'Elsa avait assommé, partaient pour l'infirmerie tandis que Jack conduisait la jeune femme à l'endroit où elle pourrait se reposer.

« Restons discret, les autres dorment » lui chuchota-t-il malicieusement alors qu'ils avançaient, suivant le chemin tracé par un tapis bleu. « Quelle surprise ils auront demain... »

Elsa, captivée par la palette d'émotions qu'il dévoilait en un rien de temps, ne put qu'hocher de la tête en laissant un sourire effleurer ses lèvres lorsque son regard se posa enfin sur les vêtements du jeune homme. Ce qu'il remarqua, et s'en excusa aussitôt :

« Je ne m'attendais pas à ce qu'on m'appelle à une heure pareille de la nuit pour me dire que, attention, alerte rouge, un individu extrêmement dangereux mais très élégamment vêtue menaçait la ville ! Forcément ce n'est pas comme si j'avais eu le temps de me changer pour te défier sur ce point-là. » Dit-il d'un ton goguenard.

Puis il poussa un soupir et murmura plus bas : « Me voilà en pyjama devant une jolie fille, la honte non ?

- Ça peut toujours se rattraper ! » Rit Elsa, touchée qu'il la voie comme "une jolie fille".

Il lui lança un sourire éblouissant alors qu'ils arrivaient enfin en face d'une porte aux contours ciselés.

« C'est ici, lui signala-t-il inutilement en désignant l'entrée. Je te préviens, il n'y a pas de lumière à l'intérieur, excepté quelques lueurs. Tu utilisera mon hamac pour cette nuit, demain ils t'en attribueront certainement un. »

Puis il jeta de nouveau un coup d'œil à ses vêtements et grogna, fronçant de manière comique son nez.

« Tu ne vas pas dormir comme ça, non ?

- Je n'ai rien d'autre... Chuchota-t-elle, désolée, en baissant à son tour ses yeux vers sa robe déchiquetée.

- Je vais te donner un t-shirt et un bermuda, ça devrait faire l'affaire. » Soupira-t-il. « Attends-moi deux secondes, je reviens. »

Il revint effectivement peu de temps plus tard, portant dans ses bras les affaires qu'il tendit à Elsa. Elle les accepta avec étonnement, sans oser lui dire qu'elle ne savait absolument pas ce qu'était un hamac, un t-shirt ou même un bermuda. Ils auraient bien l'opportunité d'en parler plus tard, de toute manière.

Après qu'elle se fut changée dans une petite salle attenante, Jack ouvrit la porte avec délicatesse et appliqua un doigt sur ses lèvres pour lui faire comprendre de ne pas trop faire de bruit. Elle acquiesça, compréhensive, et imita sa démarche muette en pénétrant dans la pièce sombre.

Jack émit un discret sifflement, et un changement imperceptible se fit sentir dans l'air ; comme si quelque chose volait ou bougeait. Elsa, bien trop fatiguée, effaça les quelconques possibilités de son esprit.

« C'est prêt, lui souffla-t-il à l'oreille. Fais de beaux rêves, Elsa d'Arendelle.

- À toi aussi... Jack Frost. »

Elle distingua dans la pénombre quelques couvertures et un oreiller, et se glissa avec délectation dans ce qui lui paraissait semblable à un lit. Elle s'endormit plus vite qu'une masse, ne se doutant pas de la surprise qu'elle aurait au réveil.

Étant donné que je sais que le dernier chapitre n'était pas trop facile à comprendre, est-ce que celui-ci vous a aidé à éclaircir certains points ? Le Refuge, tout ça tout ça ? x)

Dangereuse (Jelsa)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant