Chapitre 7 - Tourne-disque

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« Tourne, tourne
En rond, en enfer,
Vif de cette main de fer
Tourne, tourne,
En ce jour de fête. »

La pièce était silencieuse. Seul le battement violent de son cœur se faisait entendre. Ses mains tremblaient. L'écran devant lui n'avait pas bougé, n'avait pas changé. Les mots étaient toujours les mêmes. Les photos étaient toujours là. Et rien de tout cela n'était un rêve, mais bien la réalité.
Baekhyun se mit à secouer lentement la tête de gauche à droite.

- Non...

Ce n'était pas possible. Il passa une main dans sa chevelure, tira dessus. Ses yeux s'humidifièrent. Ils étaient rivés sur l'écran et ne le quittaient pas. Ce n'était même plus la peur qui avait pris place en lui, c'était une sorte de désespoir. Il se mit à secouer plus vigoureusement la tête. Il ravala le nœud qui se formait dans sa gorge et se leva soudainement de la chaise. Le meuble racla le parquet en un long grincement.
Ils ne l'avaient donc jamais quitté des yeux.

Baekhyun recula, fit un, puis deux pas en arrière, jusqu'à ce que son dos rencontre le mur. Il se laissa glisser contre, le regard toujours fixé sur l'ordinateur. Les images qu'il venait de voir défilaient dans sa tête. Il ramena ses jambes contre son torse et expira douloureusement. Sa main droite tremblante et froide glissa dans la poche de son manteau et en sortit son portable. Il quitta l'écran d'ordinateur des yeux et regarda celui de son téléphone. Une larme dévala sa joue et s'écrasa sur son fond d'écran.

Il avait l'impression que toute sa vie n'avait été qu'un mensonge. Il avait en fait toujours porté les chaînes qu'ils lui avaient mises depuis son viol. Et cela prouvait que ses antécédents n'avaient jamais fait parti du passé, mais bien du présent et du futur. Baekhyun se sentait manipulé, malmené comme une poupée de chiffon. Il avait cette impression que sa vie n'avait toujours servie qu'aux autres, que les autres en avaient toujours abusé et que son corps, sa vie toute entière ne lui avait jamais appartenu un seul instant. Désormais, il avait grandi, mûri, vieilli, il avait changé. Autour de lui, le temps avait avancé, mais lui restait bloqué dans le temps. Comme un tourne-disque défaillant qui répéterait le même son sans arrêt.
Il se sentait ainsi, ni plus ni moins. Il se sentait usé, sali, presque trahi en quelque sorte.

Il émit un long soupir, la lèvre inférieure tremblante, et passa lentement une main sur son visage. Puis il passa sa langue sur ses lèvres sèches et porta son regard vague devant lui, se perdant dans la pièce. Il espérait pouvoir clore les paupières, les rouvrir et se rendre compte que toute sa vie n'avait été qu'un rêve, même si cela voulait dire renoncer à Chanyeol.
Peut-être que sa vie aurait pu être normale. Être un étudiant comme les autres, trouver du travail, puis fonder une famille, une vie comme tout le monde rêvait d'en avoir. Une vie sans encombres, sans trop de soucis. Mais tout avait pris un tournant violent, tout avait dérapé.

Non, c'était faux, rien n'avait jamais été normal, depuis le début, depuis toujours. C'était la société, le monde dans lequel il vivait qui avait pris un tournant malsain depuis longtemps. Sans la violence, sans la prostitution, sans les dettes, sans cette haine qui obnubilaient l'être humain, il n'aurait jamais eu à vivre tout cela. Qui portait la faute de son malheur, du malheur de tous les autres misérables qu'il avait connus ? Et surtout, qui y contribuait en majorité ?
La réponse était toute faite.

Baekhyun avait toujours cru et avait toujours été convaincu que les gens qui lui avaient fait du mal n'avaient fait que perpétrer les gestes qu'ils avaient subis eux-mêmes. La violence n'était qu'un cercle vicieux tant qu'elle était entretenue. Il en avait eu la preuve avec Minseok. Si Baekhyun pensait ainsi, ce n'était que parce que c'était des choses vraies, qu'il avait observées et constatées. C'était parce qu'il avait été témoin de ses propres yeux de la violence que subissait Minseok par son père. Il ne faisait que croire ce qu'il voyait, ce qu'il avait vécu. Cependant, il savait qu'il y avait également des gens qui ne faisaient que goûter à la violence. Qui expérimentait sans en avoir eu l'expérience propre. Des gens qui violentaient simplement pour assouvir leurs besoins, leurs vices et plaisirs. Et c'était particulièrement cela qui répugnait Baekhyun. Cette envie de faire du mal pour connaître ce que cela leur provoque. Alors qu'ils avaient eu une famille aimante et présente.

Envol d'un papillon de nuit [TOME 2]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant