3.Une nouvelle vie

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Environ onze ans s'étaient écoulés depuis le jour tragique où mes parents avaient été assassinés. Depuis cet instant, je ne vivais plus, je survivais. Je m'étais réfugié dans un bâtiment en ruine à Londres, une structure partiellement brûlée lors d'un incendie dévastateur. Les murs noircis et les fenêtres brisées laissaient entrer le froid glacial de l'hiver, ajoutant une couche supplémentaire à la misère dans laquelle je vivais.

Comme chaque jour, je quittai mon refuge, dissimulé sous une cape à capuche qui cachait mon visage. La capuche était tirée bas sur mon front, masquant mes traits, ne laissant entrevoir que l'éclat sombre de mes yeux. Je me dirigeai vers la place centrale de Londres, où le marché battait son plein.

Les rues pavées étaient bondées de monde, une marée humaine en perpétuel mouvement. Les étals étaient débordants de fruits exotiques, de viandes fraîches, de tissus colorés, et d'épices dont les arômes flottaient dans l'air. Les marchands criaient leurs prix, essayant d'attirer les clients, tandis que les acheteurs se bousculaient pour obtenir les meilleures offres. Le marché était un véritable kaléidoscope de couleurs et de bruits, chaque coin regorgeant de vie. Des enfants couraient entre les jambes des passants, riant aux éclats, tandis que les charrettes chargées de marchandises avançaient difficilement à travers la foule compacte.

J'étais devenu une sorte de voleur et d'assassin, une vie sans gloire ni honneur. Je ne travaillais que pour l'argent ou parfois pour assouvir une vengeance, mais jamais je n'avais trouvé le moindre indice sur l'assassin de mes parents. Mes recherches avaient toujours été vaines, comme si rien ne s'était passé, comme si ma famille n'avait jamais existé.

Aujourd'hui, j'avais un contrat d'assassinat à remplir. Ma cible n'était ni riche ni particulièrement influente, mais il n'avait pas réglé ses dettes envers la famille Ferro. Sa seule chance de survie aurait été de me proposer un contrat plus lucratif, mais cela n'arriva pas.

Je marchais à travers la foule, qui ne se souciait guère de moi. Les gens étaient trop occupés à commenter les faits divers de la semaine. J'entendis des bribes de conversation :

"Il y a un assassin sanguinaire qui rôde dans Londres...

-On dit qu'il a tué plus de trente-six personnes...

-Ce sont tous des gens de la classe moyenne ou des nobles...

-A-t-il fait de nouvelles victimes ?

-Je ne crois pas...

-J'ai peur qu'il vienne me tuer ; on dit que ceux qui l'ont vu... sont six pieds sous terre."

Ils parlaient de moi, de la peur que j'inspirais, mais jamais ils n'auraient imaginé que je pouvais être parmi eux, les frôlant sans qu'ils s'en aperçoivent. C'étaient pour la plupart des nobles, étalant leur fortune avec arrogance, et je détestais ces gens qui imposaient leur loi par l'argent.

J'aperçus enfin ma cible, visiblement nerveuse. Elle se faufilait entre les étals, jetant des regards inquiets autour d'elle. Je m'approchai d'elle discrètement et la bousculai, dissimulant ainsi ma lame qui pénétra dans son corps. J'étouffai son cri avec un vieux morceau d'étoffe pour éviter d'attirer l'attention. Malgré mes précautions, je remarquai un jeune noble à quelques mètres de moi, observant chacun de mes gestes. Au début, je pensais qu'il ne m'avait pas repéré, mais son regard ne me quittait pas.

La victime s'effondra au sol dans un bruit sourd, mais les passants n'y prêtèrent guère attention, trop occupés par leurs propres affaires, ce qui me permit de m'éloigner aussi calmement que je n'étais arrivé. Pourtant, ma journée était loin d'être terminée ; le soleil venait à peine de se coucher, et je devais encore trouver une maison à cambrioler pour rentabiliser ma journée.

Je finis par repérer à la nuit tombé, un appartement au troisième étage, dont la fenêtre était restée ouverte. C'était probablement une résidence secondaire d'un noble, utilisée lors des saisons estivales pour participer aux mondanités de Londres.

L'immeuble était luxueux, avec une façade en pierre blanche ornée de balcons en fer forgé. Les fenêtres étaient hautes et étroites, laissant entrevoir des rideaux de soie brodés de motifs complexes. Je m'attaquai à l'escalade de la façade, une tâche devenue facile après tant d'années d'entraînement. Atteignant la fenêtre, je me glissai silencieusement à l'intérieur.

La pièce était une chambre luxueusement meublée, un véritable écrin de richesse. Les murs étaient tapissés de velours bleu, et un grand lit à baldaquin trônait au centre, drapé de soie dorée. Sur les meubles en acajou, des chandeliers d'argent étincelaient faiblement à la lumière de la lune, et des tapis persans recouvraient le sol de bois massif. L'air était imprégné d'un mélange de parfum de lavande et de cire d'abeille.

Un enfant dormait dans le grand lit. Je m'approchai discrètement des tables de chevet, à la recherche d'objets de valeur. Sur l'une d'elles, je remarquai deux bagues, l'une en or finement ciselé, l'autre ornée d'un cristal bleu profond qui scintillait mystérieusement dans l'obscurité. Alors que je tendais la main pour les saisir, l'enfant se réveilla, ses grands yeux bleus me fixant avec surprise.

C'était le même enfant qui m'avait observé plus tôt au marché. Je réagis rapidement, me suspendant par la fenêtre pour me cacher, espérant qu'il se rendormirait rapidement afin que je puisse fuir sans être repéré.

Mais les choses ne se déroulèrent pas comme prévu. Le jeune noble appela un de ses domestiques. Quelques secondes plus tard, j'entendis quelqu'un frapper à la porte de la chambre. Je ne pouvais rien voir, mais je ressentis une étrange sensation, comme si mon esprit me hurlait de fuir, de me méfier de cette aura démoniaque.

J'entendis à peine le jeune noble parler, mais je distinguai des pas qui se rapprochaient de la fenêtre. Je me plaquai contre le mur, retenant ma respiration.

Deux mains gantées frôlèrent les miennes, et j'entendis une voix grave s'adresser au jeune noble.

"Jeune maître, je ne vois aucun intrus ici, vous avez dû rêver.

- Je ne rêve pas ! J'ai vu un voleur dans ma chambre. Il était sur le point de voler mes bagues. Tu es un majordome incompétent, il aurait pu me tuer.

 - Monsieur, il a dû partir. Je ne vois personne et je ne ressens aucune présence aux alentours. Sachez que si votre vie était en danger, je l'aurais perçue.

- Très bien, je l'espère. Je te donnerai mon âme une fois ma vengeance accomplie. En attendant, tu me protégeras, tel est notre contrat.

- Yes, my lord."

La fenêtre se referma, me permettant enfin de m'enfuir. Pourtant, quelque chose continuait de me tourmenter.

Pourquoi parlaient-ils de contrat et d'âme ? Et cette aura que j'avais ressentie, si noire, qu'était-elle ? Et pourquoi le majordome parlait-il de "ressentir" une présence ? Ce noble cachait sûrement un secret. Peut-être détenait-il des informations sur la mort de ma famille. Mais je devais être prudent, car ce majordome dégageait un mauvais pressentiment.

Sebastian x Lecteur (Temps perdu)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant