Airstronomy ( EN COURS D'EDITION SORTIE 2018)

IV

- « Maïa ! Les hommages commencent ! » cria ma mère de l'étage inférieur

Avec rapidité je replaçai le carnet à sa place. La porte se referma quelques secondes plus tard sur la pièce laissée à l'abandon dans un silence pesant. Refermer cette porte à double tour signifiait plus pour moi qu'un simple verrou sur une porte en bois. C'était une sorte de cadenas que j'avais placé sur mon cœur et qui maintenait mes émotions dans un sommeil léthargique. Les souvenirs restaient là à l'abri du monde extérieur, dans un coin de ma maison et n'en sortaient pas. Cette porte était une réelle protection, un mur érigé qui me permettait d'avancer le pas moins lourd.

J'accrochais machinalement la clef autour de mon cou. Cette pièce représentait ce que j'avais de plus précieux au monde. Chaque objet embaumait l'air de souvenirs passés, un héritage familial qui resplendissait dès que j'entrouvrais la porte. Chaque fois c'était les souvenirs de mon enfance qui voletaient dans l'air, jaillissant en un faisceau fantôme de la surface de chaque objet.

Après avoir descendu les quelques marches qui me séparaient du salon, je vins m'installer à coté de ma petite sœur qui scrutait l'écran avec attention.

La télévision retransmettait la cérémonie à l'écran : De grands drapés blancs étaient suspendus dans les airs d'un bout à l'autre des buildings et des gerbes de fleurs ornaient les marches de la place centrale qui flottait sur les eaux.

L'arrivée d'Ethel Douarton, notre dirigeant politique fit immédiatement sensation. Devant nos yeux ébahis, il arriva dans hélicoptère blanc fendant les nuages en répandant une vague de silence sur la foule. Tel un prophète sorti tout droit d'une livre sacré il posa un pied par terre et afficha un sourire figé.

Quelques minutes plus tard : la mine concentré et les mains serrées il prit la parole sous un soleil clément.

- « Mesdames, Messieurs ...

Si nous sommes réunis en ce jour c'est pour commémorer la mémoire de nos ancêtres et la catastrophe qui ébranla le monde il y a cent ans.

C'est avec une profonde émotion que le Canada souhaite rendre hommage à l'ensemble des citoyens qui ont trouvé la mort en ce jour funeste. Nous sommes tous touchés de près ou de loin par cette tragédie c'est pourquoi je demande à l'ensemble de la population de respecter une minute de silence. »

Un gong retentit, et un silence encore plus pesant s'installa progressivement sur la ville comme un manteau noir. Les cris cessèrent instantanément et des milliers de personnes s'agenouillèrent pour prier. Je scrutais toujours avec attention la télévision dans un silence de plomb. Un vol d'oiseau traversa l'écran à ce moment là et un frisson me parcourut.

Le gong retentit à nouveau et les conversations reprirent leur place naturellement comme si rien n'avait eu lieu. La mine sombre, le président ajouta :

- N'oublions jamais que « Celui qui ne connaît pas son passé est condamné à le revivre ». 

 Soyons forts et soudés pour que jamais cela ne se reproduise. 

Le gouvernement sera toujours là pour assurer la sécurité de son peuple. Ensemble nous pouvons créer un monde meilleur ! . Finit-il tout en brandissant son poing vers le ciel.

Une acclamation générale se dégagea de la foule qui se mit à scander son nom. Ethel avait une très bonne popularité dans la population depuis son élection récente. Les sondages le donnait vainqueur partout et les gens l'appréciaient. C'était un dirigeant froid mais juste, qui n'avait pas peur de prendre les décisions comme son père : Altaïr qui l'avait précédé avant lui. Il savait faire appliquer la loi et l'ordre régnait dans les rues de la capitale ainsi que dans tout le pays.

Il devait ça en partie à une milice organisée et omniprésente prête à appliquer les décisions à la lettre et à régler les conflits entres les citoyens avant qu'ils ne dégénèrent.

Malgré cela, cela faisait plusieurs semaines qu'un vent nouveau soufflait dans Toronto...imperceptible presque invisible.