VII.

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En remontant vers les escaliers pour recharger mes bouteilles d'air comprimé dans ma chambre, je croise ma sœur dans la cuisine.

- Tu ne manges pas avec nous ? me demande-t-elle l'air déçue.

De mes mains je lui indique que je préfère rester la soirée au calme et que la cérémonie m'a coupé tout appétit. Je lui montre également mon Oxycaptor qui clignote pour qu'elle comprenne que la technologie me tiendra en otage pour la soirée. Il faut que je recharge mes bouteilles.

Un soupir sort de ses lèvres appuyé d'une mine inquiète. Je la prends dans mes bras quelques secondes pour dissiper ses craintes avant de filer vers ma chambre.

Nous avons toutes les deux tissé un lien particulier qui s'est renforcé avec les années et notamment après la mort de notre Père.

J'avais toujours eu une attitude paternelle envers elle, et voulais sans cesse la protéger du monde qui l'entourait, en la plaçant au centre d'une bulle réconfortante, dont je gardais l'entrée. 

Je voulais lui éviter de souffrir et de la confronter au monde hostile. Mais en même temps, je savais qu'un jour ou l'autre, il faudrait que je la laisse grandir. Je devais la préparer à l'avenir, lui montrer la réalité en face et ne pas l'enfermer dans un monde aseptisé.

Mais c'était plus fort que moi. Sa surdité la rendait vulnérable et je me sentais responsable d'elle. J'allais devoir l'endurcir maintenant.

La pièce où je dormais était vaste mais quasiment vide. Un lit trônait en face de la grande baie vitrée qui laissait passer les lumières de la ville. La nuit était en train de tomber lentement, tel un voile d'encre qui s'épaississait chaque minute

Après avoir rebranché mes bouteilles au réseau Oxy par un tuyau métallique flexible accroché au mur,  je m'allonge sur mon lit en jetant un œil sur la ville qui s'endort. 

Le ciel s'obscurcit et l'agitation faiblit au fil des minutes dix étages plus bas. J'aperçois les gondoles tout en bas, qui s'entrecroisent dans les profondeurs sombres de la ville. Des milliers de lanternes bleues rayonnent telles des lucioles dans la nuit noire. Parfois je repère une gondole-taxi avec sa lumière jaune qui clignote à intervalles réguliers. 

Dans la cité tout a une couleur et chaque couleur une signification, rien n'est laissé au hasard.

Tandis que le jour s'endort et que la lune monte dans le ciel, mes yeux papillonnent jusqu'à se fermer complètement sur un jour meilleur comme Persée l'avait fait 100 ans plus tôt.


Airstronomy ( EN COURS D'EDITION SORTIE 2018)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant