34.

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Chez moi, étrangement, mes parents sont déjà là. Vu la tête surprise qu'ils affichent, je sens mal les prochaines secondes qui vont s'annoncer. Je ravale difficilement ma salive, baisse la tête dans l'espoir de me faire toute petite, et mon dernier espoir est que le sol m'engloutisse.

— Elsa, tranche la voix de mon père, tu ne crois pas t'être foutue de nous ?

Je n'ose pas relever le regard, le carrelage gris de la cuisine devient si intéressant à fixer. J'aimerais juste qu'au lieu de balancer sa phrase superficielle, mon père m'annonce tout de suite ce qui ne va pas. Je n'ai pas envie qu'ils ne perdent plus de temps à me faire des reproches. En plus, je leur ai tellement menti que je ne sais même pas par où commencer, ni quel point de ma vie peut poser problème.

— Elsa, reprend durement ma mère, je ne crois pas que l'on t'ait éduquée ainsi. Je n'en reviens pas !

Je sens sa voix s'affoler, et ose lever les yeux, étonnée par une telle colère mêlée de... Tristesse ?

— Ton attitude est tout simplement insupportable depuis quelques jours ! crie ma mère. Et avec ce que l'on vient d'apprendre... Tu nous déçois Elsa !

Apparemment, mon insolence est le délit du jour. Ils me saoulent. Ils ne voient pas que je vais mal ? Ils ne peuvent pas se rendre compte que leur fille a plus besoin d'écoute et de réconfort que de leurs foutues réprimandes inutiles ?

Hugo arrive soudainement dans la cuisine, alerté par le bruit et probablement apeuré par la dispute entre mes parents et moi. Jamais on ne s'était disputés avec les parents. Aujourd'hui, tout change à une cadence trop rapide, comme des montagnes russes. Je ne veux pas que mon frère voie ça, je ne veux pas que ma vie l'empoisonne comme elle le fait sur moi. Je veux qu'il reste innocent, comme j'aurais aimé le rester le plus longtemps possible.

— Elsa, va dans ta chambre, il faut qu'on parle ! Yohan, occupe-toi d'Hugo, je vais tirer les choses au clair avec ma fille !

Quand ma mère ose prononcer le prénom de mon père, l'heure est grave. Une boule se forme dans mon ventre, je suis morte de peur de l'intérieur. Ma mère me jette un regard dur et montre l'escalier du doigt, et j'obéis faiblement. Pourquoi aujourd'hui encore, les autres arrivent autant à contrôler chacune de mes actions ? Là ce que j'aimerais, c'est dire non, lui demander qu'est-ce qu'ils ont encore contre moi, et surtout, je leur crierais qu'ils me laissent tranquille avec mon enfer de vie, que je ne veux plus les voir eux, ni personne. Que dans ce monde d'incompris, je souffre et je suis à un point si bas que personne ne peut m'aider.


Je m'assois sur mon lit, tandis que ma mère ferme la porte et se tient debout, face à moi et bras croisés sur la poitrine. Son regard est tellement accusateur que je sens déjà le malaise qui m'imprègne. Je crois que je peux signer mon arrêt de mort.

— Je ne fais pas y aller par quatre chemins Elsa ! Pourquoi tu nous as menti pour samedi dernier, pour ta fête stupide où tu te rendais ? On te faisait confiance et toi...

Je suis abasourdie. Comment a-t-elle pu connaître la vérité ? Qui lui a dit ? Elle m'ordonne de lui répondre, mais je suis incapable de prononcer un traître mot. Ma mère est rouge de colère, moi je dois l'être de honte.

— Elsa, que tu ailles à une fête avec ton petit copain Enzo, ok. Que tu m'envoie un message disant que vous restez là-bas, pourquoi pas. Mieux vaut parfois jouer la prudence plutôt que rentrer au milieu de la nuit.

Je lève la tête vers ma mère. Ses yeux sont larmoyants. Comme les miens. Je lui en veux de remuer le couteau dans la plaie, alors que je n'arrive même pas à cicatriser de mes blessures.

La théorie des montagnes russes - Tome 1.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant