23.

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J'arrive chez moi, à bout de souffle. À vrai dire, j'ai couru à toute vitesse dans la ville, comme si j'étais poursuivie par une bête féroce. Je devais ressembler à une folle. 

Enzo ne s'est pas manifesté, ne m'a même pas suivi, ni envoyé de message. C'est étrange, mais il semblait autant perdu que moi face à ma réaction. Je crois que de toute façon, il ne comprendrait pas. On est proches, mais je m'obstine à laisser une distance entre nous qui me rassure. Pourtant, je devrais lui faire confiance, non ? Ce n'est pas la base dans une relation ?

Mais depuis ce jour où Baptiste a décidé de vouer une haine inimaginable comme moi, je me suis renfermée. Je ne veux plus blesser les autres. Mais surtout, je ne veux pas qu'ils me brisent. Je suis assez détruite ainsi.

Je grimpe les quatre marches menant à ma porte et entre chez moi, dans une maison silencieuse et quasi-déserte. Seul mon petit frère est présent, agenouillé dans le salon à dessiner.

Je le regarde en fronçant les sourcils, tandis qu'il continue son œuvre d'art, représentant un dragon. Enfin, on dirait plus une patate avec deux ailes, mais je ne veux pas le décevoir. Je sais que c'est un dragon car la patate crache du feu. 

Hugo se détourne soudainement vers moi, et me sourit de toutes ses dents. Enfin moins une prémolaire, qu'il a perdue il y a trois jours. Mais le trou n'est pas très visible. Il me montre fièrement sa feuille :

— Tu as vu mon dessin ?

— Oui, joli dragon dit donc.

— Mais Elsa, c'est pas un dragon ! C'est super patate. Une patate avec des supers pouvoirs et qui peut voler. En plus, elle peut cracher du feu, rétorque-t-il comme si c'était une évidence.

Ah. J'aurais dû suivre mon instinct premier, même s'il avait une dimension assez... incongrue. Après avoir observé l'œuvre abstraite et débordante d'imagination de mon frère, je lui demande pourquoi il est tout seul à la maison. Mes parents ne le laissent jamais seul.

— Ils sont chez la voisine. Tu sais, la dame qui a un chien pas beau. Comme elle.

— Hugo ! je le reprends.

— Bah quoi, c'est vrai. Papa il l'a même dit avant de partir.

Mes parents, source d'éducation pour mon petit frère.

— Mais papa et maman ont dit que j'étais grand et que je pouvais rester un peu tout seul si je ne faisais pas de bêtises et dessinais, continue Hugo, fier de lui (et de ses nouvelles responsabilités).

— Ok. Je vais dans ma chambre.

Hugo semble vouloir ajouter quelque chose, puis finalement, retourne son attention sur son dessin. Probablement une nouvelle idée qui a percuté son âme d'artiste.

— Et c'est bien, tu es un grand garçon très sage ! le félicité-je en montant les marches.

J'ouvre la porte de ma chambre, et un cri de surprise se fait entendre. Mon cœur en palpite à un rythme effréné.


Je ne m'attendais pas du tout à le voir ici. La silhouette de Valentin, qui était de dos en regardant par la fenêtre se tourne doucement vers moi.

— Que fais-tu là ? Et comment es-tu entré ? m'écrié-je, encore sous la surprise.

— Je t'attendais. C'est ton petit frère qui m'a fait entrer.

Je souffle d'exaspération. Il ne manque plus que ça.

— C'est Hugo. Il fait entrer n'importe qui, il ne fait pas attention, soupiré-je. Je lui dirais parce que c'est dangereux.

La théorie des montagnes russes - Tome 1.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant