L'excitation ressentie en arrivant à Barcelone n'est rien face à celle qui s'empare de moi lorsque j'atterris à Paris. Paris ! Je suis à Paris! Au diable les boutiques de fringues, le Louvre, ou Saint-Germain-des-Prés. Moi, je n'ai qu'une obsession : voir la tour Eiffel en vrai. En préparant le voyage, Samuel m'avait demandé où je voulais résider. Il m'avait révélé posséder un grand appartement boulevard Suchet, dans le très chic XVIe arrondissement, où son voisin de palier n'était autre qu'Arthur, le producteur et animateur de télé. La suggestion était tentante mais je voulais d'abord m'assurer d'un détail important. «De chez toi, on voit la tour Eiffel?–Non, mais chez moi, c'est chic, avait-il répondu, un brin vexé.–Alors non. Je préfère aller à l'hôtel.» En réalité, cette pirouette dissimulait mal mon renoncement à devenir sa compagne officielle. J'étais la maîtresse,je devais donc loger à l'hôtel, comme toutes les maîtresses, et y attendre la visite impromptue et clandestine de mon amant. Au-delà, et même si l'appartement du boulevard Suchet était moins une demeure de famille qu'une vaste garçonnière, je ne voulais pas revivre l'épisode de Barcelone et sentir le fantôme de Georgette flotter autour de moi. À cela, s'ajoutait le plaisir égoïste de résider dans un bel établissement : le room service, le personnel au petit soin, le confort... Je veux bien renoncer à être la «légitime», mais je refuse de tirer un trait sur mon statut de princesse. Carine m'avait parlé de son séjour au Concorde Lafayette–renommé depuis Hyatt Regency –un hôtel quatre étoiles de la porte Maillot où elle avait posé ses valises lors d'un passage à Paris. Elle m'avait raconté la vue incroyable sur la tour Eiffel depuis sa fenêtre. J'avais dit à Samuel qu'à défaut d'avoir la même chambre, je voulais la même vue. Il avait accepté sans poser de questions. Serge, un des «hommes» de Samuel à Paris, vient me chercher à l'aéroport. Il est 23 heures, il fait nuit depuis longtemps, et le trajet entre Roissy et la capitale n'a de toute façon rien de transcendant. Mais le simple fait de me savoir dans la ville lumière suffit à mon enchantement. En arrivant àl'hôtel, je réalise que le standing de la chambre est loin de celui de ma suite barcelonaise. L'essentiel est ailleurs. En ouvrant les rideaux, je l'aperçois immédiatement, grandiose,majestueuse, rayonnante: la tour Eiffel! Je tressaille de bonheur. J'ai besoin de le faire savoir. Serge me tend la carte Sim française qu'il a pris soin d'acheter pour faciliter mon séjour. Mon premier réflexe est d'appeler au Cameroun pour faire des jaloux. Ma cible prioritaire: Carine. «Tu ne devineras jamais où je suis. À la Concorde Lafayette !–Àla Concorde? Tu veux dire au Concorde?–Oui voilà.–Pour la frime on repassera.» Je ne sais pas quand et comment Samuel viendra me voir. Ses deux frères vivent dans la capitale, tout comme nombre de ses amis. J'ai envie de passer du temps avec lui. Il me manque. Mon séjour à Barcelone a révélé une passion intacte. Je le revois un matin, dans notre chambre, en train de filmer avec mon portable mon premier petit-déjeuner de star dans un grand hôtel. Mon regard pétillant se perdait entre les délices qui s'offraient à moi et la vue époustouflante sur la Méditerranée. Je ne savais plus où donner de la tête. «Nathalie Koah à Barcelone!» se moquait-t‑il, singeant mon enthousiasme. Ces moments de complicité sont rares mais si intenses qu'ils font de moi une femme capable d'accepter des compromis contre tous mes principes. Moi, Koah, la femme de caractère, belle et fière, qui mène la gentmasculine par le bout du nez, me voilà dans une chambre d'hôtel parisien à attendre que l'homme aimé daigne se montrer. Mais ici, cette attente paraît plus facilement supportable. Je parle la langue parfaitement et sans accent ou presque. Deux membres de ma famille vivent en France, l'un en banlieue parisienne, l'autre à Nantes, une ville que je ne connais pas. J'appelle ce dernier, un oncle dont je suis proche, le lendemain de mon arrivée, pour savoir comment je peux lui rendre visite le jour même. «Tu ne te rends pas compte, Nantes est à deux heures de train de Paris»,s'esclaffe-t‑il. Paris n'est pas la France semble-t‑il. Forte de ce constat, je me ravise et décide d'aller voir un de mes cousins à L'Haÿ-les-Roses, à une poignée de kilomètres de Paris. Je sors à peine de l'hôtel lorsque Samuel me téléphone. «Je suis à Paris, m'annonce-t‑il.–C'est vrai? Comment ça?–Je suis arrivé aujourd'hui en jet.–Oùes-tu?–Àl'hôtel. Mais toi, tu n'y es pas.» Le ton de cette dernière phrase n'est pas des plus chaleureux et refroidit instantanément mes ardeurs. Je dois vite rattraper le coup. «Mais je ne savais pas que tu étais là! Je suis à quelques centaines de mètres du Concorde. J'arrive.–Non, ce n'est pas la peine.–Arrête, c'est bon, j'arrive je te dis. » Je le sens en colère, pour la première fois. Je ne vois pas ce qu'il peut me reprocher. C'est plutôt moi qui, à cet instant, devrais lui faire un sermon. Il vient à Paris, et ne prend même pas la peine de me prévenir. Manifestement, je ne fais pas partie de ses plans initiaux. J'ai l'impression d'être une sorte de pause-café entre deux rendez-vous. Je fais demi-tour pour le rejoindre. Il est là, dans le hall de la réception. Son regard accusateur confirme mon jugement sur son état d'esprit. «Tuallais où? me lance-t‑il sans autre forme de politesse.–Chez un cousin.–Alors voilà, tu es à peine arrivée, et tu es déjà en train de te balader par-ci par-là. C'est pour ça que tu voulais venir à Paris en fait. Tu voulais voir des gens. Tu ne peux donc pas rester en place?» Je rêve. Il est en train de me faire une scène de jalousie. À moi, celle qui doit rester dans l'ombre et accepter la présence d'une autre femme dans sa vie. Pendant qu'il passe l'essentiel de son temps avec Georgette, je vais simplement rendre visite à un cousin, mais la coupable, c'est moi. J'ai envie de pointer du doigt cette absurdité, mais le voir s'énerver pour la première fois me fait l'effet d'un anesthésiant. J'essaie de calmer le jeu.«Écoute, je ne savais pas que tu étais à Paris, ça change tout bien entendu. J'irai voir mon cousin une autre fois.–Non, tu peux y aller. De toute façon, j'ai prévu d'aller dîner dehors.–D'accord.» Ma fierté reprend le dessus. Je tourne les talons et quitte l'hôtel sans disserter. Cette fois, c'est moi qui suis en colère. Le procès est d'autant plus grotesque qu'il se garde bien, lui, de me dire où il va dîner et avec qui. Je me demande si c'est une provocation de sa part, ou le signe qu'il considère être libre de ses faits et gestes tandis que je me dois de lui rendre des comptes. Il me rappelle quelques heures plus tard alors que je suis chez mon cousin, et m'annonce qu'il rentre à Barcelone le soir même. J'ai envie de laisser éclater ma frustration en direct, mais je ne veux pas faire de scandale en public. Une fois rentrée à l'hôtel, je lui envoie un texto pour qu'il me contacte dès son atterrissage. L'appel qui suit est l'occasion d'enfin vider mon sac. «Je commence à en avoir marre. J'ai passé deux semaines à Barcelone où je t'ai vu à tout casser quatre fois. Et là, on a l'occasion de se voir, mais tu ne me préviens pas que tu es à Paris, et tu repars aussitôt. » Il reste impassible, comme si mes remarques ne le concernaient pas.«Bon. Tu n'as qu'à rester encore deux ou trois jours à Paris et tu reviens me voir à Barcelone.» Sa proposition me coupe dans mon élan. La tension redescend d'un coup. J'accepte, un peu stupéfaite. À ce moment de notre relation, Samuel sait qu'il me tient à sa merci. Il comprend, à travers mes reproches, que je suis amoureuse, et que je suis prête à tout pardonner contre un instant passé dans ses bras. Il profite de cette faiblesse pour mener la danse. Et y voit l'occasion de tester sans plus attendre les limites de ma soumission. Pendant les préparatifs de mon nouveau voyage à Barcelone, les coups de fils reprennent, plus apaisés. Les discussions s'orientent peu à peu vers des échanges à caractère sexuel. On se chauffe à distance, on fait monter le désir en prévision de nos retrouvailles. Parfois, Samuel s'interrompt, puis évoque ses propres expériences sur un ton professoral. «Tu sais, j'ai déjà fait beaucoup de choses dans ma vie sur ce plan-là. Je suis quelqu'un qui s'ennuie très vite. Je peux avoir toutes les filles que je veux. Mais toi, tu es différente, je sais que tu m'aimes vraiment. J'aime être avec toi, mais notre relation sera plus forte encore si tu réussis à entrer dans mon monde. Tu deviendras alors incontournable dans ma vie.» J'ai le sentiment qu'il me prépare psychologiquement à quelque chose. Mais quoi? Ses insinuations sonnent aussicommeunesorted'appât, voire un chantage: si je veux devenir sa favorite, je dois me montrer à la hauteur des défis qu'il me lancera. Je ne pose pas davantage de questions. Je n'ai peur de rien, sinon qu'il m'abandonne. Je serai prête. Samuel me met en relation avec l'un de ses bras droits à Paris, un garçon nommé Sonor, qui s'occupe des préparatifs de mon voyage. Je le rencontre à l'hôtel pour la première fois. C'est un ami d'enfance d'Eto'o. Il a la trentaine déjà bien tassée. C'est un grand Camerounais costaud au visage passe-partout. Il occupait un poste de bagagiste à l'aéroport de Douala jusqu'àcequelacarrièredeSamuelexplose. Comme d'autres de ses proches, il a alors profité des largesses de son ami, désormais riche et soucieux d'offrir une vie meilleure à ses compagnons d'infortune, pour devenir l'un de ses hommes à tout faire. Leur job: gérer toute la partie non sportive de sa vie afin qu'il puisse se consacrer à 100% au football. Sonor s'occupe des hôtels et des billets d'avions, pour lui comme pour ses invités. Il joue les hommes de compagnie ou endosse le rôle de banquier, distribuant argent et cadeaux au nom de son illustre patron. Ces petites mains de l'ombre, Samuel en possède dans chacune des villes où il réside régulièrement: Douala, Yaoundé, Barcelone, Paris, et Majorque. Mais de tous, c'est de Sonor dont il est le plus proche. Il ne s'agit pas d'un simple employé, c'est son frère, son confident. Là oùd'autres ne partagent avec la star qu'un repas de temps à autre, Sonor a un accès total, direct, et permanent à son boss. Il est dans tous les coups, dans toutes les combines, partageant tous ses secrets, même les plus intimes. Son influence est telle qu'il est l'un des rares à pouvoir maîtriser Samuel, à calmer son caractère chaud et tempétueux. Lui, au contraire, est un sphinx, un sage, une force tranquille. Mais son pouvoir, réel, n'est pas illimité. S'il peut tenter de le raisonner, il ne se risque que rarement à le contrarier. Je quitte Paris par un vol direct accompagnée de Sonor. Une suite avec lit à baldaquin à 500 euros la nuit m'est réservée à l'hôtel Omm, un établissement luxueux et design situé en centre-ville, tout près de la légendaire Casa Milà et du Camp Nou, le stade du FC Barcelone. La «force tranquille » occupe une chambre au même étage. Un match a lieu le soir même. Pour la première fois, Samuel m'invite à y assister. Je prends ce geste comme une preuve, si ce n'est de son amour, au moins de son attachement grandissant. Je ne suis plus la poupée que l'on garde enfermée dans une cage dorée. Cette marque d'affection me ragaillardit, et c'est le cœur léger et les yeux pleins d'étoiles que je me rends au stade à pieds, toujours en compagnie de son bras droit. C'estlagrandeépoqueduduoEto'o-Messi. Les deux attaquants squattent alors les sommets du football mondial. Assise au bord de la pelouse, je retrouve d'autres proches dunuméro 9, parmi lesquels David, le cadet de Samuel. Je profite à fond du spectacle, les yeux rivés sur mon héros. Je ne me rappelle plus de l'affiche, mais ce soir-là, Samuel est éblouissant. Lorsqu'il marque son premier but, une vague d'émotion et de fierté me submerge. À l'instar du stadetoutentier,jemelèvedemonsièged'un bond, sautillant comme une puce, hurlant jusqu'àl'asphyxie. Gourde comme je suis, j'ignore que à peine mes fesses ont quitté le siège, il s'est refermé automatiquement. Et voulant me rasseoir, je m'affale par terre provoquant l'hilarité générale. Je suis partagée entre l'amusement et la honte. J'ai l'impression que chaque spectateur m'observe en chuchotant : «Regarde cette fille, elle ne va jamais au stade!» Après quelques secondes, les rires bienveillants qui m'entourent finissent par me contaminer. À la mi-temps, je suis conviée à monter jusqu'à la loge VIP. Là, une poignée de privilégiés choisis par les joueurs ou le staff peut profiter de rafraîchissements et d'un buffet offert par le club. Sonor ne m'a pas suivie, mais d'autres amis et son petit frère sont présents. Nous allons au bar commander un verre. Je m'installe sur un tabouret collé au comptoir. En tournant la tête, j'aperçois une femme assise sur le canapé voisin. Son visage ne m'est pas inconnu. Elle porte une paire de cuissardes qui remontent jusqu'à une jupe noire plissée, et un chemisier blanc très classe.Elle est grande, avec beaucoup de prestance. Un bébé et une fillette de trois ou quatre ans l'accompagnent. Mon sang se fige dans mes veines. Georgette est là, à trois mètres de moi. Je sens son regard qui me fixe. J'ai envie de courir me cacher sous un tapis. Ses yeux continuent de chercher les miens. Je dois rester naturelle, ne pas montrer la panique qui me serre le ventre. Je me tourne vers David pour engager une conversation sans aucun intérêt. J'ai l'impression qu'un projecteur braque ses lumières sur moi. Les secondes s'égrènent à la vitesse d'un escargot. Je la sens se lever pour aller aux toilettes. Son chemisier me frôle. Mes tempes se mettent à chauffer sous l'effet de la nervosité. Reste calme. À son retour, le coup de sifflet de l'arbitre annonçant la reprise du match retentit. Je suis la première à me lever. En quittant la salle, je ne peux pas m'empêcher de jeter un dernier regard dans sa direction. Elle est en train d'enfiler un superbe manteau de fourrure avec une grâce majestueuse. Quelle élégance, quel charisme! En regagnant mon siège, je suis un peu KO. Davantage que de la gêne ou de la honte, c'est de l'intimidation que j'ai ressentie face à elle. Cette pensée me fait mal. Comment être à la hauteur? Je reprends mes esprits. Je ne suis pas Georgette mais je plais à Samuel. Il doit trouver quelque chose en moi qu'il ne trouve pas en elle. Peu importe quoi. Je m'en contenterai.Àla fin de la rencontre, Sonor et moi rentrons à l'hôtel. Samuel m'y rejoint une heure plus tard. Sa présence me surprend. Si sa compagne officielle est à Barcelone, pourquoi ne passe-t‑il pas la soirée avec elle? Il entre dans ma chambre, et me tend un sac plastique. À l'intérieur, je découvre son maillot du match encore fumant, gorgé de sueur. Je redeviens pendant une seconde la groupie adolescente que j'étais, et le remercie. Nous allons dîner dans le quartier gay de la ville où Messi réside. Je me régale d'un plateau de fruits de mer pendant que Samuel se contente, comme souvent, d'un bon steak. De retour à l'hôtel, il s'assoit sur mon lit, demande à Sonor de nous rejoindre, et commande des bouteilles de champagne au room service. Son ami et moi descendons quelques coupes, Samuel s'abstenant, comme d'habitude, de boire de l'alcool. Il nous observe nous enivrer, l'air satisfait. Puis meglisse à l'oreille : «Tu sais, j'aime bien regarder ma copine faire l'amour à un autre homme.» J'avais senti ce moment venir. Tous les indices étaient là. Sonor qui me suit partout, nos discussions sibyllines sur son goût pour l'adrénaline, sa crainte de l'ennui, son besoin de me faire entrer dans «son monde». Pas besoin de dessins. Samuel a une hygiène de vie irréprochable, il ne boitpas, ne se drogue pas. Cette source d'extravagances qu'il medécrivait ne pouvait venir que de ses pratiques sexuelles. J'enchaîne les coupes de champagne pour me donner du courage. Je n'ai aucune envie de coucher avec Sonor, mais je ne veux pas décevoir mon homme. Sa façon de m'amener à accepter ce scénario a été très habile. Il ne menaçait pas de me quitter, pire que ça, il laissait entendre qu'il m'aimerait moins, qu'il perdrait la flamme, que je ne serais plus à ses yeux qu'une fille parmi d'autres. Il ne me promettait pas la haine, mais l'indifférence. Cette pensée est une torture. Je bois sans m'interrompre. J'ai déjà vidé sept ou huit coupes de champagne. Je n'arrive plus à analyser la situation. Ça va se faire. Ça se passera bien. Ça passera vite. Trou noir. À ce jour, je n'ai toujours aucun souvenir précis de cette nuit. Je me rappelle simplement d'une image de moi en train de faire l'amour. Avec Samuel? Avec Sonor? Avec les deux? Je n'en sais rien. Le lendemain matin, c'est au côté de Samuel que je me réveille. J'ai l'impression d'avoir un marteaupiqueur dans le crâne. Lui affiche un sourire radieux. «Mais qu'est-ce qui t'a pris de boire comme ça? Tu vois Sonor boire, alors tu bois comme lui? Mais lui, il tient bien l'alcool, contrairement à toi, me lance-t‑il hilare.–Qu'est-ce qui s'est passé hier soir? J'ai tout oublié.–Net'inquiètepas.C'était unesupersoirée. Tuétais déchaînée, on ne pouvait plus t'arrêter. J'ai un décrassage avec l'équipe tout à l'heure, je vais me préparer.–D'accord. Mais j'ai fait quoi exactement?» Sa réponse me surprend:–«J'ai pris des photos. Je te ferai voir plus tard.»
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