Chapitre 16

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Bien que ses cicatrises étaient entièrement guéries, Wilfrid se sentait de plus en plus lourd et mal. Pour rajouter à son supplice, personne ne le détacha du matelas et Elios venait lui rendre visite plusieurs fois par heure ; lui parlant sans cesse de sa sentence. Et plus le moment du châtiment arrivait, plus Elios semblait excité.

Wilfrid se réveilla après s'être une nouvelle fois endormi. Les yeux encore lourds, Wilfrid se sentit soulevé et traîné dans les longs couloirs du palais. Même s'il mit un peu de temps à retrouver ses repères, l'adolescent réussit à reconnaitre le chemin dans lequel on le traînait. Il n'avait emprunté ce chemin qu'une seule fois. Mais il le reconnaîtrait entre des millions. Pour lui plus un chemin le fait souffrir plus il s'inscrivait dans sa mémoire. Et celui-là l'avait presque tué de douleur. Son cœur cognait de plus en plus fort dans sa poitrine. Alors que les souvenirs lui revenaient en mémoire, tel une violente gifle.

Maintenant, il n'avait plus dix-sept ans mais onze. Il n'était pas traîné mais courait derrière son père. Il n'avait pas mal mais peur. Ce n'était pas pour lui qu'il avait peur mais pour son frère, mort quelques heures plus tôt. Il se voyait rentrer dans la petite salle qui avait pour seul meuble une machine étrange constituée de deux sièges en fer, reliés à une grande colonne en verre par des tuyaux. Dans le grand tuyau transparent une pierre verte flottait de haut en bas, lançant des éclairs blancs.

Wilfrid ferma les yeux essayant vainement d'oublier ses souvenirs trop douloureux en cet instant. En les rouvrant, les souvenirs s'étaient dissipés. Il était de nouveau dans son corps. Devant une porte en bois. Qui s'ouvrit violemment. Derrière se tenait Délianor qui l'attrapa au niveau du bras. Il le traîna jusque sur un siège en fer. Le même que dans son souvenir. Le grizzly lui attacha les poignets au siège à l'aide de grosses sangles.

Le démon était à présent tout à fait réveillé et conscient du reste de son entourage. Il voyait que son père se tenait devant lui à environ vingt mètres. Un guérisseur à ses côtés. Elios était assis sur l'autre siège et lui souriait. D'un sourire glaçant.

-Comment vas-tu mon cher Wilfrid ? demanda tranquillement le fantôme.

-C'est quoi ce cirque ? murmura l'adolescent.

-C'est ton châtiment voyons, dit-il comme s'il s'agissait d'une évidence.

-Quoi ? chuchota Wilfrid.

-Réfléchis, tu verras que tout te sautera vite aux yeux. Tu n'es pas aussi stupide que ce que les gens imaginent.

Wilfrid réfléchit. Mais, comme son frère lui avait dit, l'évidence lui sauta bientôt aux yeux. Cette machine servait à l'échange de corps. Si lui était assis sur l'un des sièges et Elios sur l'autre. Cela ne signifiait qu'une seule chose. Il comprit aussi pourquoi Elios était aussi impatient à l'approche de sa sentence. Ils allaient échanger les corps. Enfin, si on peut appeler corps l'espèce d'enveloppe fantomatique de son frère.

-Je vois à ton air outré que tu as compris.

-Tu ne vas quand même pas...

Sa phrase resta en suspend car le guérisseur s'était approché et avait mis un casque sur la tête du démon et sur celle d'Elios. Puis il s'approcha de la colonne de verre, actionna un levier. Sans dire un mot.

Wilfrid sentit une grande douleur le traverser de part en part. Il avait l'impression qu'on lui arrachait la peau, que ses os fondaient, que ses muscles pourrissaient.

Wilfrid fit la seule chose qu'il pouvait faire. Pousser un cri. Un cri déchirant et douloureux.

Les ailes blessées d'Angel Où les histoires vivent. Découvrez maintenant