Fragment cinq.

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- J'ai répondu à ton interrogation, répond à la mienne maintenant.

Neilina fronça les sourcils et releva sa manche droite. "Create" se dessina sur son poignet et elle sourit à la vision de ce mot qui représentait toute sa vie. Sa passion pour le dessin, la raison pour laquelle elle était née. Son père était tatoueur, sa mère était gérante d'une galerie d'art et d'ici la fin de l'année, Neilina dessinerait ce qui serait des futures couvertures d'ouvrages. Secrètement, la jolie blonde espérait que sa cadette se lance dans l'édition. Ensemble, elles pourraient monter une entreprise et changer la vie de centaines de gens. Mais elles n'en étaient pas là. Les années lycées d'Aileen étaient encore loin ! La tatouée regarda une dernière fois son illustration et porta son regard sur Harry dont le poignet gauche était encore visible.

- Ma passion pour le dessin, voilà ce qu'il représente, lâcha-t-elle. Toi, tu chantes. Moi, je dessine. C'est pas qu'une orientation, un futur job ou un métier ou y a de l'avenir. C'est un besoin vital, pour moi. De créer, de dessiner. Je venais d'entrer en école d'art et ça m'a parut important de l'avoir sur moi. Tu sais, pour ne pas perdre mon but des yeux.

Harry garda le silence et approuva d'un signe de tête. Neilina savait que, de tous, il était le mieux placé pour comprendre de quoi elle parlait. Il s'était fait tatouer une phrase pour montrer aux gens qu'ils n'arriveraient pas à le changer, qu'il chantait par passion et qu'il mettrait un terme à sa carrière si sa notoriété le transformait. Il était passionné, tout comme elle. Neilina lui sourit discrètement et descendit sa manche. Les chansons d'Aerosmithcontinuaient de défiler alors que le brun continuait d'arpenter l'étagère. Il y avait tellement de disques en tout genre qu'il ne savait pas lequel choisir. Quel groupe serait approprié à la situation ? Parmi les trois-cent disques (minimum) qui se trouvaient sous ses yeux, il devait bien avoir une chanson qui parlait d'un chanteur abandonné qui rencontrait une dessinatrice qui se moquait sans cesse de lui. Et s'il n'en existait pas, il faudrait qu'il en écrive une. Harry posa son regard dans la catégorie des « E » et fût surpris d'y voir un disque orange qu'il ne connaissait que trop bien. Il s'en empara et le montra à Neilina, un sourcil arqué et un air interrogatif collé au visage.

- Ed Sheeran, lut-elle sur la pochette de l'album. Tu as un problème avec lui ?

- Non, aucun. Je suis juste surpris que ton père écoute ce genre de chanteur.

- Ce n'est pas celui de mon père mais le mien et oui, il lui arrive de l'écouter. On écoute aussi Adele. Et parfois même, Lady Gaga.

Harry reposa le disque à son emplacement initial et se mit sur la pointe des pieds pour atteindre un carton qui se trouvait au-dessus de l'impressionnante étagère musicale. Le brun s'en empara et le déposa sur la table du salon, sous le regard attentif de Neilina. Elle s'avança vers lui et l'ouvrit.

- Il n'y a que des cassettes, expliqua la blonde. Mon père n'avait pas tellement d'argent quand il était gamin donc son père ne pouvait lui acheter que des cassettes. Il a commencé cette collection avec son frère, un peu avant de rencontrer ma mère.

Il l'aimait bien, cette fille. Cette carapace qu'elle possédait mais qui se brisait très facilement. Neilina ne le détestait pas, Harry en était sûr, maintenant. Elle était un peu brut, un peu trop envahissante et sans doute un brin trop direct mais au moins, on ne pouvait pas lui reprocher sa sincérité. Elle disait ce qu'elle avait sur le cœur. Toujours. Et chacun de ces disques avaient une histoire que Neilina aurait pu lui compter s'il le demandait. Mais Harry était bien trop réservé pour oser lui poser à nouveau une question. Alors, il dévoila une multitude de ses tatouages en retirant le polo que lui avait prêté la jeune femme et qui devait sans doute appartenir à son père. Le regard de Neilina se posa sur le torse amaigri du brun avant d'être attiré par un tatouage présent sur son bras. Même deux.

- Les étoiles n'ont pas une symbolique homosexuelle ? Demanda Neilina en continuant d'épier le bras droit de Harry. Je ne suis pas homophobe, ça m'est égal de ce que tu fais de ton corps. Je me disais juste que... Vous êtes cinq dans votre groupe... Que des hommes... Vous avez des besoins et vous passez pas mal de temps sur les routes alors...

Cette fois-ci, Harry la dévisagea. Il avait monté ce groupe alors qu'ils étaient tous de parfaits inconnus mais désormais, ils étaient cinq meilleurs amis, cinq frères. Comment avait-elle pu s'imaginer qu'ils se passaient quelque chose entre eux ? Zayn sortait avec Perrie, Liam avec Danielle, Louis avec Eleanor et Niall... Certes, il restait Niall. Et il était loin d'être laid mais... Pourquoi Diable pensait-il à cela ? Jamais Harry n'aurait une quelconque relation avec l'irlandais. Tous deux étaient hétérosexuels.

- Non, on ne couche pas ensemble, finit par admettre Harry avant de se concentrer sur le tatouage à l'origine de cette discussion. Cette étoile à cinq branches. Elle représente chacun des membres du groupe. Louis, Liam, Zayn, Niall et moi.

- Je suis censée être touchée par ta déclaration envers tes amis ? D'ici trois-quatre ans, un nouveau groupe aura pris votre place et on n'entendra plus parler de toi, ni de ton groupe.

- Peut-être mais notre amitié perdurera, s'empressa de la contrer le brun.

Mais Neilina n'était nullement impressionnée par l'homme d'un mètre quatre-vingt trois qui se trouvait devant elle. Il paraissait tellement fragile que si elle soufflait dessus, elle était certaine qu'il se briserait et les morceaux de son âme seraient emmenées par le vent. La tatouée se redressa, croisa ses bras sur sa poitrine et fit face au brun.

- Arrête de croire en cette amitié, Harry. Oui, vous êtes supers potes mais ça, c'est parce que vous n'avez vécu que le meilleur. Qu'en sera-t-il quand les producteurs vous tourneront le dos ? Quand vos fans seront lassés ? Quand la vente de vos CD chutera ? Tu ne sais pas de quoi sera fait demain et tu ne peux pas être certain que tes amis sont ton futur donc ne t'avances pas trop. Tu as déjà effacé un tatouage et tu risques d'en effacer un second.

Elle faisait référence à la phrase qui se trouvait sous l'étoile et que Harry avait tenté de faire effacer. Won't stop till we surrender. Certes, les rayons étaient efficaces et d'ici une dizaine de séances, le tatouage serait complètement invisible mais il avait existé, à un moment donné. Et Harry continuerait d'y penser, sentant encore la douleur qui avait déchiré sa peau quand le tatoueur avait retranscrit cette phrase sur sa peau. Ce tatouage existerait même quand il ne sera plus présent.

- Tu ne sais rien de ce tatouage, murmura le bouclé avec un regard vide, l'esprit embué par des pensées plus sombres les unes que les autres.

- Alors, raconte-moi.

36 blacklightsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant