T1: « Toi ! Qu'est-ce que tu fais là ? »

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Assise dans notre petite twingo rouge ridicule à côté de mon frère, je tente patiemment de me calmer face aux bouchons évidents auxquels nous faisons face en ce jeudi soir. Quelle idée de circuler en fin d'après-midi aussi... On le savait, on connaît le trafic comme notre poche, mais il a quand même fallu qu'on le fasse.

À ce rythme là, on ne va plus arriver chez nos parents avec une demi heure de retard, mais avec une heure, voir plus tellement ça n'avance pas. On aurait mieux fait de faire ce repas ce midi, tout aurait été plus simple. En plus, pour je ne sais quelle raison Thomas est tout frêle, sûrement de l'anxiété vu son passif, mais c'est jamais arrivé sans aucune raison, chose qu'il essaye de me faire croire. Je suis pas n'importe qui, je sais reconnaitre un mensonge ou non sortir de sa bouche. Faut dire aussi que j'ai très vite remarqué ses mains crispées autour du volant, pour le coup c'est pas très discret, on ne me cache rien, du moins pas lui, je le connais trop bien. Mais connaissant ma patience dans ce genre d'épreuve, je préfère m'abstenir d'une énième remarque à son égard au risque de lui créer une crise, ou tout simplement démarrer une dispute.

- Encore un feu rouge ? Putain ça fait la deuxième fois qu'on se le prend, c'est quoi ce karma de merde là, criais-je dans notre petit habitacle.

- Calme toi, ça sert à rien de gueuler, ça avancera pas plus vite, obtempérait mon frère dans un souffle lassé.

- Non, je vais pas me calmer, personne ne sait conduire ici, et le gars de devant s'impose pas, on va jamais passer bordel ! Et toi t'es aussi tendu qu'un string pour Dieu sait quelle raison. Je tourne ma tête vers lui alors qu'il essaye de déglutir discrètement, tout en resserrant son emprise sur le volant. Il disjoncte, moi aussi par la même occasion. Adieu mes précédentes résolutions du moment.

- Je dois te dire quelque chose... m'annonce-t-il d'une petite voix, alors que ma curiosité finit par surpasser tout autre sentiment en moi.

- Fait toi plaisir. Oh ! Mon extasie face aux mouvements devant nous me monte à la tête. Il est passé ! Colle-le, vas-y colle-le comme ça on passe aussi, on s'en fout de l'autre, mes pauvres bras s'agitent dans tous les sens.

- C'est important, à l'entente du ton qu'il a prononcé je me suis raidie sur place, me coupant toute envie de m'exciter sur mon siège.

- D'accord...

Il a complètement arrêté la voiture au milieu de la route, sous mon air paniqué face à cette situation incompréhensible en plein croisement routier, et a retiré le contact avant de dramatiquement se tourner vers moi.

- Qu'est-ce que tu fais ? On embête tout le monde là, les gens kla...

- Je te promets que ça va bien se passer, il me coupe, je te promets que tout finira bien sœurette, n'ait pas peur, il a prit ma main dans la sienne et l'a fortement serré.

Dans la continuité de ma vision, c'est avec horreur que j'ai pu voir un énorme poids-lourd s'élancer à toute vitesse sur nous.

- Oh mon Dieu, avance Thomas. Avance ! On va avoir un accident, la panique me prend définitivement de court sans pour autant oublier ses dernières paroles.

Mais au lieu de m'écouter, son autre main libre vient se poser sur mon cœur avec douceur.

- On se reverra.

Mais je n'ai pas eu le temps de répliquer, la monstruosité de ce camion nous a percuté de plein fouet, nous propulsant sur plusieurs mètres. Tout s'est enchaîné très vite, les airbags se sont déclenchés, m'évitant des gros coups contre le tableau de bord alors qu'on faisait des tonneaux jusqu'à percuter la voiture de devant qui a amorti la chute plus que brutale. En l'espace de deux secondes j'ai cru voir la fin, me procurant des pensées obscures et tristes pour ma famille.

Mais une fois le choc passé, le manque d'air s'est très vite manifesté en plus d'avoir l'impression de me noyer dans mon sang. Mon torse est secoué de spasmes, par je ne sais quel miracle j'ai l'air encore en vie et consciente. J'arrive à entendre quelques personnes autour de moi s'agiter. Je crois que les pompiers sont en route. Il vaut mieux. Ils vont avoir du travail vu l'état dans lequel je suis. Et Thomas ? Comment va-t-il ? Je n'arrive pas à le voir, ma tête me fait trop mal pour que je la tourne. Il s'est prit le poids-lourd en pleine tête, c'est lui qui a le plus morflé, les secours doivent s'occuper de lui en premier. Moi je vais bien, j'ai pas besoin d'aide.

Et comme si on m'avait entendu, une lourde fatigue s'est abattue sur moi... Bien que j'ai lutté aussi fort que possible, j'ai fini par me laisser emporter par ce sommeil profond sur les sinistres images de cet accident.

Ce qui me semble être de longues heures se sont écoulées, et c'est avec hâte que j'ai inspiré une grosse bouffée d'air fraîche. Je me sens revivre, enfin. Très rapidement j'ouvre les yeux, mais une lumière bleue éblouissante me brûle la rétine, par réflexe je cache comme je peux cette luminosité avec mes mains. Lorsque je me suis adaptée à l'environnement, je détaille ce qui m'entoure, et c'est avec grande surprise que je remarque que je ne suis pas à l'hôpital comme je suis supposée l'être compte tenu de la dernière situation, mais par terre dans une salle qui m'est inconnue.

Étrange.

Alors je me redresse vivement, tout en remarquant que je n'ai plus aucune blessure de l'accident, et je cherche du regard quelque chose qui pourrait m'être familier, mais c'est sans succès.

Visiblement je ne suis pas seule, un peu plus loin je peux distinguer six personnes en pleine discussion. Personne n'a l'air de m'avoir remarqué, en même temps je suis cachée derrière un très grand cristal bleu, qui est d'ailleurs magnifique et étrangement attrayant.

Dans un élan de courage, je parviens comme je peux à me mettre debout sur mes deux jambes, dans le but d'approcher ces personnes pour leur demander où je suis. Mais après une très longue contemplation, je comprends rapidement que ce ne sont pas des personnes lambdas vu leurs accoutrements atypiques. Je dois être dans le coma, ou quelque chose du genre, c'est impossible.

Et alors que je pensais être discrète, une paire d'yeux curieux s'est posée sur moi. C'est un jeune homme avec un air un peu timide mais gentillet. Il porte une sorte de corne sur le front, de quoi vraiment me perturber.

Mais lorsque ses yeux se plissent dans ma direction, cela semble alerter les autres, puisque cinq autres paires d'yeux se posent sur moi, dont plus précisément une femme à l'air dur et méfiant, à moitié renarde.

Sans réfléchir, elle pointe son sceptre vers moi et m'interpelle de façon virulente.

- Toi ! Qu'est-ce que tu fais là ? Et qui es-tu ?

Je tente de sourire pour apaiser son inquiétude et pour leurs faire comprendre que je suis gentille, mais ça ne doit pas trop fonctionner vu leurs regards sombres qui me font comprendre que je ne suis pas la bienvenue.

Je suis tout d'un coup très intimidée.

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Lisa [Eldarya (EZAREL)~SLOW UPDATE~]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant