Chapitre IV : Sa Majesté la Reine

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Média : La Reine de France, Anne d'Autriche

Château de Versailles, 10 juin 1670

Louise fut très impressionnée par la taille du petit salon de la reine. Il était, au contraire de son nom, très grand. La reine se tenait au centre, assise sur un immense fauteuil orné de fleurs de lys. Sur une petite table à sa droite était posé une tasse de chocolat. A sa gauche, on voyait en effet un nain à la peau noire. Comme sa sœur le lui avait conseillé, Louise ne montra pas sa surprise. Tout autour de la reine se trouvait une vingtaine de femmes à la peau mate. Certaines discutaient, d'autres jouaient aux cartes ou brodaient. Mais toutes cessèrent leurs activités lorsque la porte s'ouvrit. La reine posa d'abord un regard doux sur Marie puis il se fit plus hautain lorsqu'il passa sur Louise. Les deux sœurs s'inclinèrent dans une profonde révérence.

Marie-Thérèse d'Autriche, malgré sa petite taille, avait l'allure d'une reine. Sa robe, couleur bleu roi agrémentée de fleur de lys dorée, tombait royalement à ses pieds. Ses cheveux blonds ressortaient sur ses épaules dénudées. Des rubis ornaient son buste. Louise se sentit intimidée face à une si importante personne. Pourtant sa sœur prit la parole sans aucune gêne dans la voix :

- Vôtre Altesse, je tenais à vous présenter ma sœur de trois ans ma cadette, Louise de Brissac. Elle sera l'une de vos dames de compagnie.

La reine fit un léger signe de tête qui signifiait qu'elle avait compris et qu'elle saluait Louise. Mais son regard n'avait pas changé. Elle fit alors un léger mouvement et une dame à la droite de la reine s'approcha. Marie-Thérèse d'Autriche lui chuchota quelque chose dans l'oreille et la femme acquiesça. Puis, elle prit la parole :

- Sa Majesté vous souhaite la bienvenue dans son château et espère que vous y passerez un bon séjour. Suivez-moi, je vais vous conduire à vos appartements.

La jeune femme parlait avec un fort accent espagnol. Louise fit un révérence et suivit cette femme. Avant de sortir de la pièce, elle jeta un dernier regard à sa sœur qui lui fit comprendre qu'elle viendrait la rejoindre après s'être entretenue avec la reine.

Louise suivit l'espagnole dans de nombreuses allées et elles arrivèrent finalement à sa chambre. Elle était située dans l'aile ouest du palais. La femme s'arrêta et informa la jeune fille :

- Vos bagages ont étés apportés. L'espagnole parlait d'une voix stricte et ferme. Vous devez être au près de la reine dès sept heures du matin pour son bain quotidien jusqu'à dix-huit heures et sa toilette du soir. Vous l'accompagnerez également tous les jours à la chapelle et vous prierez avec elle comme toutes ses dames de compagnie. Est-ce clair ?

Louise ne put que répondre un petit "Oui, madame" face à tant d'autorité. Cette espagnole devait lui être bien inférieure de par le rang mais elle dégageait tant de puissance qu'elle n'osa pas la contrarier. La femme retourna alors au près de la reine, un sourire satisfait sur le visage. Quant à Louise, elle pénétra dans sa chambre et fut surprise de la taille encore une fois. Mais cette fois, ce n'était pas une bonne surprise. Ses appartements étaient tout simplement minuscules. Elle avait seulement la place pour circuler entre un lit, une commode et une table de chevet. La salle de bain subissait le même sort. Une baignoire ainsi qu'un robinet prenaient le fond de la pièce et un paravent occupait tout le reste de la place. Que cela allait la changer du château de Brissac. Même si elle avait vécu pendant dix ans dans un couvent où il y avait autant de place qu'ici, Louise était tout de même habituée à plus de confort. Où allait-elle mettre toutes ses robes volumineuses ? Un coup à la porte l'empêcha de se poser plus de questions.

Sa sœur entra sans attendre son accord et fit une mine désolée devant ses appartements.

- Je suis désolée pour ces appartements. Mais Versailles n'est pas très grand et en plein travaux. J'ai moi-même vécu dans une chambre similaire à celle-ci avant d'épouser François-Antoine.

- Rassure-moi, tu ne vis plus comme ça ? Demanda Louise.

- Non, bien sûr que non. Je vis dans les appartements de mon mari qui sont beaucoup plus spacieux et décorés. D'ailleurs beaucoup nous l'envie. Le roi en a fait cadeau à François-Antoine car il lui a prêté énormément d'argent pour la guerre contre la Hollande. Mais là n'est pas la question. La reine m'a chargée de te dire que tu as ta soirée de libre. Tu ne commencera à lui tenir compagnie que demain. Marguerite t'a t-elle tenu au courant des horaires ?

Ainsi cette espagnole à la mine sévère se nommait Marguerite. Louise acquiesça.

- Très bien, continua sa sœur. Cependant, il te faut te changer et te laver car ce soir, tu es invitée au souper du roi.

- Invitée ? Par qui ? Je ne connais personne ici.

- Mais bien sûr que si. Tu me connais moi, et c'est mon mari qui a tenu à t'inviter.

Cela étonna fort Louise car elle ne pensait pas que François-Antoine la portait dans son cœur.

- En quel honneur m'a t-il invitée ?

- C'est justement de ça dont je voulais te parler. Il faut que tu me promettes de jouer la comédie au souper. Je ne suis censée le révéler à personne avant ce soir. Mais je ne voulais pas te le cacher.

- Bien sûr, tu peux compter sur moi.

- Louise, je suis enceinte.

Louise, face à cette nouvelle n'était pas si surprise. Sa sœur et François-Antoine étaient mariés depuis deux ans déjà, un enfant était forcément la prochaine étape. Cela ne l'empêcha pas de rayonner de joie.

- Quelle merveilleuse nouvelle ! Et tu comptes l'annoncer ce soir au souper ? C'est pour cette raison que François-Antoine m'a invitée ?

- En effet. Cela fera plus grande impression. Le roi- et toi par la même occasion - l'apprendra alors par la bouche de mon mari et non par celles des courtisans. Je suis si heureuse Louise ! Je te souhaite de trouver un bonheur pareil !

Louise le souhaitait aussi ...

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