Chapitre VII : Le murmure des commérages

1.7K 128 23
                                    

Château de Versailles, salle à manger royale, 10 juin 1670, vers 19 heures

Louise, toujours pétrifiée par la peur se trouvait face à une assemblée d'un cinquantaine de personnes. Des courtisans triés sur le volet, qui avaient le privilège d'assister au repas du roi. Face à elle, se trouvait le roi en question, dans un habit resplendissant de mille feux. Il était au centre de la longue table qui était face à Louise. Dans cette foule, elle reconnut quelques visages familiers. Celui de la reine d'abord qui était assise à la droite du roi, un sourire au coin des lèvres. Encore à sa droite, Louise vit Marguerite, la première dame de la reine ainsi que trois autres dames de compagnie qu'elle avait aperçue à son arrivée. Elles semblaient hilares et se retenaient de rire. A la gauche du roi se trouvait une autre femme, que Louise devina être madame de Montespan. Elle la fixait d'un regard hautain et dédaigneux. A côté de cette femme se trouvait Arthur, l'homme qui l'avait prise pour une domestique. Elle décida de ne pas l'en blâmer car elle avait fait la même erreur. Il était beaucoup plus habillé que lors de leur première rencontre et il avait, maintenant la surprise passée, le regard sévère, ce qui étonna Louise. A la gauche d'Arthur se trouvait un courtisan qu'elle n'avait jamais vu et juste en face se trouvait sa sœur accompagnée de son mari. Eux, ne semblaient toujours pas remis de leur surprise. Enfin, elle vit son père, à droite de la table, presque vers le bout, qui la regardait avec une mine désolée. Elle lui avait fait honte, elle en avait conscience.

Ce fut au milieu dans ce climat d'extrême tensions, où les réactions divergeait, que l'on attendait la réaction du roi. Ce serait celle que tous les courtisans devraient adopter. Celle-ci hésitait alors entre l'amusement, l'irritation et l'étonnement. Fort heureusement pour Louise, le roi opta pour la première. Il se mit à rire et fut aussitôt imiter par la plupart des courtisans à l'exception d'Arthur et de sa sœur. Louise se détendit quelque peu et eu même l'audace de sourire. Puisque tout le monde le prenait à la rigolade, pourquoi pas elle ? Mais lorsque le roi prit la parole, le sourire de Louise disparut.

- Et bien, mademoiselle, vous avez le don des entrées spectaculaires. Puis-je savoir à qui nous avons l'honneur ?

Louise qui, avec la peur, avait oublié le protocole, se dépêcha de faire une révérence avant de bredouiller :

- Lou... Louise de Brissac, vôtre Majesté.

-Et bien, Mademoiselle de Brissac, prenez place.

Il prononça sa dernière phrase avec un grand sourire et Louise se retint de pousser un profond soupir de soulagement. Un valet apparut derrière elle et la conduisit jusqu'à sa place pendant que le murmure des commérages reprenait. Sauf que cette fois, il n'était plus centré que sur elle.

Elle essaya tant bien que mal de se faire oublier mais c'était peine perdue.

Elle fut installée à côté d'une fille de quinze ans environ et d'un homme d'une cinquantaine d'année à l'air simplet. Tous deux la scrutèrent lorsqu'elle s'assit mais ce fut la fille qui lui adressa la parole en premier :

- Bonsoir, je suis Elizabeth, duchesse de Cambridge.

Sans même connaître son titre, Louise s'était douté que cette jeune fille était anglaise. Son accent et sa tenue le démontrait. Elle remarqua alors qu'il n'y avait, pour la deuxième fois de la soirée, plus aucun bruit dans la salle. Tous attendaient sa réponse.

- Enchantée. Je suis Lou...

- Je sais.

Elizabeth n'avait pas dit cela méchamment, mais Louise ne put s'empêche de s'énerver. Cette petite fille venait de la ridiculiser devant toute la cour. Certaines personnes ricanèrent mais les conversations reprirent ce qui allégea les épaules de Louise. La duchesse de Cambridge continua :

Versailles Où les histoires vivent. Découvrez maintenant