Chapitre 4

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Marie Onkola est née le vingt-trois Mai mille neuf cent quatre-vingt sept dans un village situé proche de la capital du Sénégal. Elle était l'aînée de trois cadets ; deux frères et une sœur. Étant donné qu'elle était l'aînée, elle avait été à l'école jusqu'à ses quinze ans car ses parents étant de pauvres commerçants, ils ne pouvaient plus payer les frais de scolarité exorbitants, ni envoyer ses cadets à l'école. C'est ainsi qu'elle s'était résolue à trouver un mari pour alléger le poids qu'elle était devenue pour sa famille comme le faisait toutes les filles de son âge. Les temps étaient durs et les parents voulaient avoir des filles afin de pouvoir les marier et recevoir la dot. Aujourd'hui dans la société occidentale, cela horrifierait mais dans certaines cultures africaines, cela est toujours une pratique courante. Confier sa fille à la famille d'un homme en échange d'argent et de cadeaux. Néanmoins, ses rêves ont été bousculé la nuit du samedi dix neuf mars deux mille trois. Ses parents l'ont réveillé en chuchotant au milieu de la nuit.

-Marie, debout! Il faut partir!

-Hein!? Maman on va où?

-Lève toi d'abord, et fait tes bagages.

-D'accord maman.

Son père était à la porte de sa chambre pendant qu'elle se changeait et préparait ses affaires pour une destination inconnue. Ils sont sortis de la maison où se trouvait un taxi miteux, dont le bruit du moteur hantait encore ses cauchemars à ce jour. Le taxi était de couleur jaune moutarde, avec des roues sans gentes, les sièges étaient tout sauf confortables et l'odeur de moisi qui y régnait promettait de lui arracher quelques vomissements. Sans parler du chauffeur bien sûr qui était déjà désagréable. Ce taxi au fond du quel ses parents allaient sceller sont sort. Son père lui dit au revoir d'un ton sec, en lui disant de bien travailler et de gagner de l'argent pour les sortir de la misère. Sa mère quant à elle avait semblé plus émotive, en fermant la portière gauche de ce taxi, elle avait fermé la porte du cœur de sa fille à jamais.

On dit souvent que la nuit est maîtresse des actes et désirs les plus farouches, les plus viles mais également les plus douces. Malheureusement pour Marie, cette nuit allait être la nuit dont le souvenir ne s'effacera jamais, on aurait dit que le Diable en personne s'était donné pour mission de la persécuter, et que la mort dansait toujours un peu plus proche d'elle sans jamais la toucher. Dans les profondeurs de la nuit, le taxi s'enfonçait, tout comme la peur dans le cœur de Marie augmentait, elle quittait tout de sa vie au Sénégal, sans savoir où elle allait, assise près d'inconnus, elle se demandait si le sort n'avait pas en réserve un petite once de bonne fortune pour elle. Elle était loin d'imaginer les terribles secrets du rêve de ses parents.

Sur le chemin, Marie a posé des questions au chauffeur sur où ils allaient au milieu de la nuit mais il refusait de donner une réponse. Elle a donc essayé de se lier de ce que l'on pourrait appeler amitié avec la fille plus proche d'elle. Elle paraissait avoir deux ou trois années de plus que Marie. Elle a demandé à la fille où elles allaient et la réponse lui était venue comme un choc. "On va en France." La France? Pourquoi la France? Comment? Par quels moyens? Marie n'était pas dupe, elle savait qu'il y avait deux moyens pour aller en France, soit par avion mais cette piste était à écarter pour une famille pauvre. Soit par les bateaux de fortune des passeurs et les chances d'arriver à destination sont bien inférieures aux chances de mourir sur la route. Elle n'aimait pas du tout cette idée et réfléchissait déjà à un moyen de rentrer chez elle. Néanmoins, en repensant aux sacrifices financiers qu'ont dû faire ses parents pour qu'elle puisse aller dans ce pays dont les échos de fortune et de bonheur semblaient si attrayants elle s'est décidée à continuer le voyage en essayant d'éviter la mort à tout prix. Ce serait bien idiot de mourir alors qu'on allait "au pays des blancs".

Arrivés au port, il y avait déjà quatre personnes assises dans un de ces bateaux de fortune. Tous avec un petit sac, comme si cela représentait l'infime partie de leur vie qu'ils vont laisser derrière. Il y avait parmi les passagers trois hommes et quatre femmes dont le groupe de Marie. Celui qui semblait être le capitaine du bateaux ordonna le silence. Le chauffeur de taxi se dirigea vers celui qui allait diriger le voyage et lui a remis l'argent de ses nouveaux passagers. Il esquissa un sourire et se tourna vers nous pour un discours.

"Les amis, nous allons partir maintenant en direction de la France. Je dois vous prévenir que le voyage est risqué. Si vous n'avez pas le cœur dur, vous allez mourir. Mon bateau possède un bon moteur (elle rit en me disant cela car en fin de compte ils ont fait presque la moitié du voyage sans ce "bon moteur").

Près d'une heure plus tard, tout était prêt pour le voyage, la jeune femme qui était assise près de Marie s'appelait Lisa. Elle avait vingt ans et elle a décidé de faire ce voyage parce qu'elle en avait marre de la pauvreté de sa famille, pour elle tous les moyens étaient bons pour arriver à ses fins. Elle se projetait déjà dans la prostitution.


Le Revers d'un Rêve.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant