Je n'ai encore rien dit

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J'ai toujours tout fait en fonction des autres.
Penser, m'habiller, suivre, faire.
Je n'ai jamais rien fait en fonction de ce que MOI je voulais, parce que j'ai tout simplement peur. Je n'ai jamais dit à qui que ce soit à quel point je me sentais mal, ou peut-être qu'une partie.
Je suis persuadée, que personne n'a jamais ressenti ce que je ressens en ce moment même.
De la haine, du manque, de la tristesse, le besoin de liberté, de l'amour...
Tous ces sentiments mélangés me font littéralement perdre l'esprit.
Je sais plus ce que je dois faire, j'ai peur, peur de tout.

Je cherche toujours à planifier tout, parce que j'ai peur de l'imprévu. Je cherche toujours à trouver quelque chose d'intéressant à dire avec les personnes qui comptent le plus pour moi, parce que j'ai peur.
Tout ce que je fais, ce que j'écris, ce que je pense je vais directement te le dire. Parce que je sais que je cherche toujours à me cacher, mais avec toi... C'est différent.

J'en ai marre.
Marre de ne jamais savoir ce que je veux;
Marre de ne jamais savoir pourquoi je suis triste;
Marre que toutes mes amies me voient comme la fille qui n'éprouve que les sentiments de joie et de tristesse.

Combien de fois est-ce que j'ai pleuré en 5ème ?
Combien de fois, je suis passée pour la sensible ou pour la fille totalement débile qui ne pense qu'à s'amuser ?
Je n'étais pas cette fille-là, et je ne le suis toujours pas. Mais comment je peux nier, ce que pour elles j'ai toujours été ? C'était tellement plus facile d'être la fille toute joyeuse, mais tellement difficile d'avoir tous les regards portés sur moi lorsque je me mettais à pleurer.
Combien de fois j'ai cherché à me trouver des passions, mais combien de fois j'ai baissé les bras ?
Je n'ai rien vécu de spécial dans ma vie, absolument rien.
Je suis juste Camille Santos, grande rêveuse de 13 ans qui ne fait rien de sa vie à part : Téléphone, téléphone, manger, téléphone.
Combien de fois on m'a boosté pour que je sorte, que je fasse quelque chose de ma triste et stupide vie ?
Des centaines de fois.
Combien de fois j'ai baissé les bras ?
Des centaines de fois, également.

Puis toi, toi tu fais tellement de choses, et moi je me sens toute nulle à côté. Tu cherches à vivre, à être heureuse, tu profites de chaque moment, tu sors, tu dors chez des amies...
Toi et elle, vous m'avez toujours dit que moi aussi je pouvais faire tout ça mais en ce moment, c'est elle qui me le dis tout le temps.

Je pourrais... Mais non.
Je voudrais... Mais non.
Je suis mon propre ennemi, et j'en suis parfaitement consciente.
Mais je peux pas m'en empêcher, dès que je me lance pour faire quelque chose... Je pense aux avis des autres. Ce qu'ils penseront de moi... Et ça, ça me ramène souvent à la réalité.
Oui, après tout... Je ne suis que la petite Camille.

J'ai toujours l'impression qu'on se fiche de moi, donc je suis devenue susceptible. Et ça depuis énormément longtemps, beaucoup, beaucoup de temps.
C'est peut-être pour ça qu'en plein milieu de la cour de récré, je me mettais à pleurer pour simplement quelques phrases. "Tu es grosse", "regarde la grosse là-bas".
Je n'ai jamais su riposter. Juste pleurer en me morfondant le plus dans ma tristesse.
Et le soir en rentrant, n'en parler à personne. Ni à toi, ni à ma famille, ni à ma sœur quand elle n'était pas déjà au courant.

Quand on me fait une mauvaise blague, je me sens bête. J'en rigole pas comme d'autres le feront, non moi je me sens totalement stupide d'être tombée dans le panneau.
Pourtant, le sens de l'humour je l'ai, mais quelques fois il déraille.

Je sais qui je suis, et je l'ai bien compris.
Je suis
Camille la susceptible;
Celle qui se force à rire quelques fois, celle qui comprend beaucoup de choses mais qui se fait passer pour l'enfant imbécile et dépendante de CM2.
Celle qui fait tout en fonction des autres, celle qui aimerait mais ne fait pas.
Celle qui baisse toutes les deux minutes les bras;
Celle qui dépend de l'humeur des autres. Celle qui se laisse abattre, celle qui se laisse faire, celle qui reste silencieuse en ne disant jamais rien de ce qu'elle pense.

Je me suis dit que j'allais changer en cette année de 4ème, mais vous savez quoi... J'ai déjà baissé les bras.

Et je n'ai encore rien dit.

Les sentiments abstraits d'une fille abstraiteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant