Les sentiments abstraits d'une fille abstraite

La théorie des ricochets

Les deux mains se lancent et se relancent à un rythme irrégulier. Les cailloux tombent et retombent eux à un même rythme, certains ricochent et d'autres tombent directement.

Il y a ceux qui font croire à un joli départ mais qui se mettent néanmoins à ne ricocher qu'une simple et piètre fois, avant de se noyer dans les profondeurs d'un lac, au reflet d'un coucher de soleil d'été. L'été c'est habituellement associé à la chaleur. Pourtant ce lac n'a rien de chaud ou même de rassurant, il est froid, hautain, rempli de solitude et les cailloux se perdent là, sans jamais avoir pu bondir. Ils meurent.

Puis il y a ceux qui iront ricocher sur encore trois bonds. L'espoir les fait certainement vivre, c'est comme ça qu'ils réussissent à faire ces trois autres bonds, au lieu de directement tomber. Mais une fois ces soudains et distincts bonds effectués, ils se mettent à tomber, et nous il ne nous reste plus que nos souvenirs pour nous remémorer le son qu'ont fait leur trois bonds. C'était violent mais c'était beau, c'était plein d'ingéniosité à sa manière. Ça avait même sa part d'élégance.

Puis il y a ceux qui font tellement de bonds qu'on a l'impression de ne jamais en voir la fin. Par rapport aux autres qui tombaient directement ou peu de temps après, ceux-ci sont presque obligés, contre leur gré, de continuer à faire des sauts. Ils veulent la fin eux, ils veulent que ça s'arrête parce que c'est trop, c'est trop de pression. Pourtant ils continuent à faire des sauts sans plus savoir comment s'arrêter, ils continuent, encore et encore et ils tombent finalement au plus profond, plus profondément dans ce lac solitaire, froid et hautain. Là on ne se remémore plus le son qu'ils faisaient quand ils étaient à leur hauteur, car ils ont juste finalement déçus en s'arrêtant si brusquement. On ne se met même plus à retenir quand ils bondissaient, mais uniquement leur longue et interminable chute. Ils sont juste... Morts.