Chapitre 1

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Je suis assise à mon bureau, écrivant la leçon projetée sur le mur, quand une femme entre pour nous distribuer ce prospectus. Elle se tient droite, et a les cheveux tirés en arrière. Elle aurait sûrement put inspirer le respect si elle n'avait pas sa main droite verte. A moi, elle m'inspira plutôt le dégout. Le vert est la couleur la plus basse possible (jusqu'à maintenant). Ce sont les gens avec des capacités intellectuelles et physiques quasi inexistantes.

Une fois, pour une visite scolaire, nous étions allés visiter un village vert. Moi, qui, pour l'instant, vis dans une ville rouge avec ma mère, j'en reste traumatisée. Les maisons, étaient à même le sol, les murs penchaient de façon étrange, et le toit pouvait nous tomber dessus à tout moment. A part les Machas ils n'avaient rien qui puisse avoir à faire, de près ou de loin, avec le Monde moderne. D'ailleurs, les verts sont si peu intelligents, qu'ils ont besoin d'énormément de M. dans leur village, et ils ne peuvent pas avoir un véritable métier. Ils se contentent, comme cette femme, de faire quelque petits travaux par-ci par-là, mais rien qui puisse leur servir à long terme.

Un M. est une créature crée par le gouvernement il y a quelques années, afin de préserver la paix et la prospérité dans le Monde. Ils se chargent de surveiller les villes, et punissent les crimes. Ils sont partout. Depuis leur création, les criminels se font bien plus rares, car ils les attrapent tous. Moi, je les appelle les hommes-robots car, bien qu'ils possèdent un corps humain, je ne les ai jamais vu éprouver le moindre sentiment.

Je pris donc le prospectus et le lu. Pas de trop gros changements. L'augmentation des heures d'utilisation des Macs a augmentée, ils ont rajouté une nouvelle couleur (blanc, encore plus bas que vert... Je me demande où ils vont vivre. Déjà que les verts causent des problèmes dû à leur infériorité mentale et physique, les blancs devront être sous surveillance 24h sur 24 -car oui, plus notre couleur est basse, plus nous avons besoin de surveillance. D'ailleurs, dans notre ville rouge, nous n'avons presque pas de M. pour nous surveiller- ), et le couvre feu est avancé à 21h. Je trouve ça dommage, car j'aimais beaucoup me balader la nuit jusqu'à minuit. Tant pis.

Quand le cours se termine, je plie ma tablette portative, que je glisse dans ma poche, et je sors de la classe, avec tous mes camarades.

J'ai l'après-midi libre, car demain est le premier jour de ma 17ème année. On m'attribuera ma Couleur, puis, quelques jours plus tard mon métier et mon partenaire génétiquement adapté, avec qui je devrais passer le reste de mes jours.

Avant de partir, je passe au distributeur de pilules nutritives. Je vois beaucoup d'autres élèves, mais je ne parle à personne, car je ne croise aucun de mes Choisis.

Les Choisis sont des personnes amicalement compatibles avec nous. Ils nous sont octroyés après notre Premier Test, à l'âge de deux ans. Chaque personne possède vingt Choisis, qui le restent jusqu'à notre 17ème année. Passée cette date, nous pouvons communiquer avec tout le monde. Mais nous gardons toujours un certain lien avec eux.

Alors que je marche en direction de ma maison, je croise Matt, un de mes Choisis, qui a passé son test ce matin. Je vois qu'il a la main rouge. Je brûle d'envie de lui demander comment se passe le test, afin d'apaiser ma conscience, mais je sais que c'est interdit. Je n'aimerais pas qu'il ait des problèmes à cause de moi.

Je m'arrête en face de lui et le salue.

- Salut. Je vois que tu restes rouge.

Je parle avec un ton froid, mais il le sait. Plus nous sommes haut classés aux couleurs, moins nous montrons nos sentiments. Et bien que ma main ne soit pas encore colorée, je vis dans une société rouge, je prends donc les même habitudes.

- Ouais. C'est cool.

Il me tend son poignet gauche, et je vois une petite bosse.

-Ils t'ont mis une puce !

Je lui attrape la main. C'est assez inhabituel. Les puces sont normalement destinées aux verts (aux blancs, maintenant), et parfois aux bleus.

-Oui. Tous ceux qui vont avoir 17 ans cette année en auront une. Je ne sais pas pourquoi.

Je ne me pose pas plus de questions.

-J'y vais. Bonne chance pour demain. On se revoit.

Je lui souris.

-Oui. A un de ces jours !

Il me sourit puis continue sa route.

Avant de rentrer chez moi, je passe par un vieux parc dans lequel j'allais quand j'étais petite avec mon père.

Il est mort depuis presque 9 ans maintenant. Il à été tué par un des M. parce qu'il était rentré à 2 heures du matin, pour des raisons que je ne connaîtrai sans doute jamais. Je me rappelle que ce soir là, les deux M. attendaient patiemment devant notre porte que mon père arrive. Et quand ils l'ont vu au coin de la rue, ils ont tiré. Ma mère et moi n'avons pas pleuré. Les règles Premières sont plus importantes que tout.

Je m'assois sur la vielle balançoire, et observe la rue. Les gens marchent au même rythme, dans la même direction, silencieusement, ne se saluant qu'avec de discrets hochements de têtes. Ils portent tous le même uniforme. T-shirt gris et pantalon noir. Chapeau à large bord.

C'est triste.



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