Chapitre 4 - Cours Julia, cours !

682 98 33
                                    







Un gémissement sourd sortit de mes lèvres, tandis que je reprenais difficilement ma respiration coupée par le choc. Je restai un moment en position fœtale, cherchant la force nécessaire pour me relever. Le bruit d'un objet métallique cognant contre un autre se fit entendre. Un son répétitif et intentionnel qui dura quelques secondes avant de s'interrompre, pour reprendre presque aussitôt. Je me saisis d'un des montants de l'échelle dans un geste précipité et me relevai le plus rapidement que je le pus. Une terrible douleur me déchira le flanc droit, m'obligeant à me plier en deux, lorsque le son retentit pour la troisième fois, plus proche que la fois précédente.

Mon cerveau saturé par la peur et la panique n'était plus en mesure de réfléchir clairement. Je n'avais qu'une certitude, il était là, il m'observait, il jouait avec moi et se rapprochait de secondes en secondes. Je n'avais qu'une option...la fuite. Je commençai à courir, complètement désorientée, n'ayant aucune idée de la direction à prendre. Je me déplaçai à l'aveuglette, me retournant tous les deux pas, pour vérifier qu'il n'était pas derrière moi. Je zigzaguai maladroitement entres les cuves des citernes, me prenant parfois les pieds dans les tuyaux qui dépassaient du sol, manquant tomber à plusieurs reprises.

C'est avec un soulagement immense que je sortis enfin de ce dédale glauque et oppressant. Je m'arrêtai quelques secondes et pris le temps d'essayer de me repérer. Devant moi s'ouvrait à présent une grande étendue vide, totalement à découvert et surplombée d'une coursive qui en faisait tout le tour. C'est d'un regard avide et terrifié que je scrutai cette dernière, persuadée d'apercevoir mon tortionnaire me guettant de là-haut, un fusil à la main. Mais j'eu beau regarder encore et encore...il n'y avait rien. C'est donc d'une démarche mal assurée que je m'engageai à découvert, quand...toutes les lumières s'éteignirent., me plongeant de nouveau dans le noir et emballant mon cœur d'une insoutenable manière.

Sur le coup je paniquai et me mis à courir frénétiquement, droit devant moi, sans avoir la moindre idée d'où j'allais. C'est un mur qui arrêta ma course, mais heureusement, pas trop violemment. C'est à ce moment que je me rendis compte, que l'obscurité n'était pas si absolue que cela. Maintenant que ma vision s'était habituée à la pénombre, je distinguai la faible lueur de la lune, filtrant par les interstices du toit. 

Je me collai au mur, m'imaginant stupidement que cela me protégerai, me rendrait moins visible, ce qui bien évidemment n'était pas le cas. Je risquai enfin un pas en avant vers un rectangle plus sombre que je soupçonnai être une porte, quand le bruit retentit de nouveau. Cette fois-ci il venait clairement d'au-dessus de moi, me dis-je tandis que prenant une grande inspiration tremblante, je m'élançai quand même, dans un sprint désespéré et poussif. J'avais presque atteint mon but, qui était bien une porte, quand un coup de feu retentit et qu'une balle vint frapper le mur à quelques centimètres de moi dans un son sec et terrifiant.

— Qu'est-ce-que vous voulez à la fin, hurlai-je d'une voix à la limite de l'hystérie.

— Répondez-moi !!!! exigeai-je dans un cri de rage au bout de quelques secondes de silence.

Une nouvelle balle vint frapper le sol, à quelques centimètres de mes orteils, me figeant sur place et me faisant taire efficacement. Il jouait avec moi, commençais-je à enrager alors que la terreur qui m'avait paralysée, cédait progressivement la place à la colère.

— Tu veux me tuer, alors vas-y...qu'est-ce-que tu attends ?! le provoquai-je d'une voix tremblante mais forte à la fois. Si tu veux m'avoir...attrape-moi !

Je partis en courant aussi vite que mes jambes flageolantes et mon corps douloureux me le permettaient et atteignis l'ouverture sous une pluie de projectile sans que par miracle aucune ne m'atteigne. Je n'avais qu'une envie, m'écrouler sur le sol. Mon corps entier me faisait souffrir et ma respiration devenait plus difficile à chaque seconde qui passait, mais peu importait. Il fallait que je continus que je mette le plus de distance possible entre moi et lui. Je finis par m'arrêter, à bout de souffle, me dissimulant derrière une armoire électrique délabrée et tentai de reprendre mon souffle et mes esprits.

Je ne savais si c'était la peur, la déshydratation, la panique ou autre chose mais je commençais à avoir des vertiges de plus en plus fréquents et je peinais à garder les yeux ouverts.

— Inutile de te cacher...je te retrouverai...toujours !

L'horrible voix trafiquée retentit soudain à travers tout le bâtiment dans un murmure grésillant et pervers, semblant envahir ma conscience comme un parasite. Je repartis en titubant, regardant sans arrêt derrière moi et sentant le désespoir me gagner à chaque foulée difficile. Je me sentis soudain basculer en avant et tentai de me retenir frénétiquement, mais sans succès, tombant avec fracas dans l'escalier en métal.

Par instinct, je me protégeais la tête de mes bras et essayai de ne pas me raidir pour atténuer le choc. J'attendis quelques secondes avant de tenter de me relever, ne trouvant même plus la force nécessaire pour ouvrir les yeux. J'étais en train d'abandonner, de me laisser aller au sommeil quand quelque chose...un bruit, parvint à se frayer un chemin jusqu'à mon cerveau traumatisé. J'étais en train de rêver ou venais-je bien d'entendre le bruit lointain mais reconnaissable entre tous d'un moteur de voiture.

Au prix d'un effort considérable, je parvins à me redresser et jetai un regard prudent autour de moi. L'escalier dans lequel je venais de tomber était en acier et ressemblait plus à une échelle améliorée qu'autre chose. Elle menait à une espèce de plateforme, elle-même en acier poursuivit par un nouvel escalier et en bas, visible grâce aux rayons de lunes filtrant par une fenêtre à demi-obstruée, se trouvait une porte. Une porte menant vraisemblablement à l'extérieur, vu la configuration du bâtiment. C'est en boitant et en ayant l'impression de le sentir et de l'entendre derrière moi, que je l'atteignis et en tournai la poignée.

Qui à mon grand soulagement s'ouvrit sans résistance. Ne voulant pas me réjouir trop vite, tellement cela me semblait trop facile, je me ruai à l'extérieur, toujours sur le qui-vive, m'attendant à le voir surgir d'une ombre ou d'un buisson à chaque seconde. Je continuai sans m'arrêter, traversant une cour abandonnée, puis certainement un ancien parking dorénavant envahit par la végétation. Pour parvenir finalement à la route...qui en fait n'était qu'une petite route de campagne certainement très peu empruntée à cette heure de la nuit.

C'est à ce moment que mon corps me lâcha et que je m'écroulai une nouvelle fois, complètement découragée et impuissante, comprenant que même si j'étais près du but, je n'aurais jamais la force de faire un pas de plus. Je dus m'évanouir, car quand je repris mes esprits, la seule chose que je vis fut l'éblouissante clarté des phares d'une voiture fonçant droit sur moi.

Cry for meOù les histoires vivent. Découvrez maintenant