L'éveil

1.

Mon stylo marqua le dernier point et je pris enfin la peine de relever la tête pour la première fois après plus de trois heures d'épreuve. Le dernier partiel de la dernière semaine de ma dernière année de fac. J'étais mitigé entre la joie et la tristesse. La fin de plus 18 ans d'études et le début d'une toute nouvelle vie. La question qui se posait maintenant était de savoir ce que j'allais faire de ma vie. J'ai plus ou moins suivie ces études en biologie après mon bac S car je ne savais pas quoi faire, et depuis j'ai continué et j'ai réussi à m'en sortir sans vraiment trouver un jour la motivation.

C'est dur vous savez, de se lever chaque matin et de poursuivre un but qui n'est pas vraiment le sien. Mais d'un côté je me demande bien ce que j'aurais fait à la place ? Rien de m'attire, ou plutôt si TROP de choses matière et il m'est impossible de choisir vraiment ma voie.

Je posa donc mon stylo, rangea mes affaires et sorti de cet amphi qui avait animé mon quotidien depuis bientôt cinq ans. À l'extérieur du bâtiment, je retrouvais Mathilde, c'est la première personne à qui j'ai parlé en arrivant dans cette fac et c'est celle qui ne m'a plus jamais quitté depuis.

- Tu te rends compte, me dit-elle ça y est on a enfin fini ! À nous la vie d'adulte, à nous la vie tout court.
- J'arrive même pas à y croire, j'ai encore l'impression que lundi matin on sera encore là à écouter Monsieur Martin déblatéré sur la génomique fonctionnelle !

Mathilde commença à rire.

- T'es complètement folle ! Bon pour ce soir ça tient toujours alors on se retrouve à 21h au Marcaza ?

- Oui Mathilde, ça doit faire la 5ème fois que je te confirme. Je serai là ce soir à 21h!

- Eh du calme ma petite, c'est pas parce que tu es diplômée maintenant que tu peux me parler comme ça!

- Ne me porte pas l'oeil, on sait même pas si on a validé le dernier semestre je te rappelle!

Elle leva les yeux au ciel comme pour me dire que c'était qu'une futilité cette validation.

- Bon je te laisse, je rentre et j'en profite pour appeler Mathias en route!

Mathilde me regarda d'un air inquiet.

- Il vient ce soir?

- Je sais pas, il verra je pense. Bon j'y vais à ce soir, love love.

Je rebroussais chemin vers chez moi, et en 15 minutes me voilà arrivée. Avachie dans mon lit, profitant des vacances qui commencèrent et essayant de ne pas trop m'inquiéter de l'avenir.
Mon téléphone sonna alors.

Matthias -
Alors ça s'est bien passé? Tu m'as pas envoyé de message? Tout va bien?

Je décida de l'appeler directement.
- Oui mon coeur ça va?
- Oui et toi? Alors ce dernier partiel?
- Ecoute je sais pas trop, on verra bien! Tu fais quoi toi?
- Pas grand chose, je suis devant la télé.

Matthias avait arrêté les études après un BAC+2, il enchaînait les petits boulots. Rien de bien sérieux. Il ne se préoccupait pas de son avenir, et attendait de voir où la vie le mener. C'est un gros sujet de dispute pour nous. Je ne supporte plus cet état d'esprit, cet état de larve. J'ai envie de le secouer, de lui dire que la vie a des millions d'opportunités à saisir si on s'en donne la peine. Mais je me ravise. On a eu cette discussion mille fois, et rien n'a changé. Aujourd'hui je nous préserve et lui et moi en n'évoquant pas le sujet.

- D'accord.Bon ce soir je vais au Marca avec les filles pour fêter la fin des partiels. Tu viens ?
- Uhm non je vais vous laisser entre filles je pense.
- Ok, comme tu veux 🙄.Bon je te laisse, mes parents viennent de rentrer. A plus tard mon coeur, je t'aime.
- Je t'a..BIP.

Je raccrocha sans même entendre la fin de sa phrase. J'avais du mal à être courtoise et investie dans notre relation ces derniers temps. Je me sentais perdue dans ma vie, perdue dans ma tête, perdue dans mon couple. Je me sentais vide. J'arrivais tellement pas à avoir de contrôle sur quoi que ce soit, que depuis plusieurs mois, c'est comme si je me regardais d'en haut. Et rien, rien n'est plus frustrant que de vivre sa vie en tant que spectateur. J'en arrivais à me détester et à détester tout ce qui m'entourait.

- Chérie, on est là descends!

Je me leva de mon lit et alla rejoindre mes parents en bas. Ils se tenaient tous les deux, dans le salon, des sourires en coin plaqués sur leur visage.

- Bah alors la brigade du crime, qu'est-ce qu'il vous arrive? Leur dis-je amusée.

-La brigade du crime a un truc pour toi, me dit mon père.

Ils me tendent alors une enveloppe. Rien n'est inscrit dessus. Je l'ouvre et découvre 2 billets d'avion. Destination Paris.

- Paris?

- Oui, Paris! On vous paye le voyage à Mathilde et toi pour fêter la fin de votre scolarité! Ma mère était limite plus excitée que moi quand elle m'annonça la bonne nouvelle.

- Mais vous êtes malades!! Mais je vous jure vous êtes fous! Je.. je sais même pas quoi dire.. Merci merci merci!

- L'hôtel est réservé, à deux pas de la tour Eiffel, me precisa mon père.

Je crois qu'ils arrivaient à lire la joie et le bonheur dans mes yeux. Cela faisait un moment que rien ne m'avait emballé et excité comme ça.

- Allez, va préparer ta valise !
- Hein mais je pars quand ?

A peine le temps de répondre, et je fonça dans ma chambre et composa le numéro de Mathilde.

- Ouais?
- Annule le Marca ce soir et prépare ta valise, je viens te chercher dans 15 minutes. Ce soir on s'envole pour Paris.

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