Chapitre XXIII

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De nouvelles larmes emplies de tristesses et de colère coulèrent le long de mon visage sale et maculé de sang.
Pourquoi ? J'avais fait tout ça pour rien ! Pourquoi ça ne pouvait pas bien se terminer pour une fois ?
- Nous pouvons la sauver, murmura Vulpo.
Je lui lançai un regard interrogateur et remarquai qu'il ne s'adressait pas à moi . Il parlait à la Lune.
La jeune femme hocha silencieusement la tête.
- C-comment ? demandai-je d'une voix étranglée.
Le renard soupira.
- L'énergie vitale d'un être vivant lui permet de vivre. Sa quantité détermine donc le temps qu'il lui reste à vivre.
- Tu...veut qu'on transfert notre énergie vitale en elle.
- Oui, mais il faut que tu saches qu'en faisant ça tu perdras, des mois voire des années de ta propre existence.
Je restai muet. Étais-je prêt à faire cela ? Échanger ma vie contre la sienne ? Est-ce que je l'aimais assez pour ça ?
La Lune s'approcha lentement du corps sans vie de Neïla et posa son index contre son front. Un flot vaporeux azur entoura sa silhouette et pénétra dans la tête de la jeune fille.
Vulpo vint s'asseoir à ces côtés. Son flot à lui était orangé.
Petit à petit, chacun des animaux vint se positionner autour de Neïla, créant un arc-en-ciel de couleurs toutes plus éclatantes les unes que les autres. Écarlate, vert pomme, bleu marine, violine, rose pâle, gris clair. Aucun n'était noir. Mon énergie vitale devait sûrement être noire. Je baissai les yeux vers mes mains et remarquai qu'elles tremblaient. J'étais donc si lâche que ça...Non. J'allais le faire. Pour prouver à ce foutu destin qui depuis toujours s'amuser à me tourmenter que j'avais changé.
Je m'approchai, la boule au ventre, du champ multicolore d'âmes. Je m'assis et fermai les yeux.
Soudain je senti quelque chose quitter mon corps, quelques chose qui semblait s'accrocher à mon âme.
J'avais l'impression d'être un sablier qui se vidait lentement, très lentement. Chaque grain représentaient un jour, une semaine, un mois, une année de ma vie. Ce temps qu'on m'avait accordé, je le lui donnais. Lorsque que j'ouvris enfin mes paupières ce fut un flot d'un blanc pur que je vis s'écouler de mon être. J'aperçu quelques corps d'animaux morts. Ils lui avaient donnée tout ce qu'ils leur restaient. Soudain un toussotement déchira le silence mortuaire qui régnait dans l'étang.
Elle se redressa, sortit de l'étang et ouvrit les yeux.
Ses prunelles, d'habitude si bleues, mélangeaient à présent l'azur, l'orangé, l'écarlate, le vert pomme, le bleu marine, le violine, le rose pâle, le gris claire et...le blanc pur.
Elle dévisagea tous ses compagnons sans un bruit. Puis, elle posa son regard sur moi.
Il paraissait vide mais fut bientôt animé par une ardente flamme de haine. Elle dégaina son poignard et se jeta vers moi. Je ne bougeai pas. La fatigue, la peur, la tristesse, l'espoir et la joie paralysaient mon corps et mon esprit.
Voir la fille que j'aimais se ruer vers moi armée d'un couteau faisait l'effet du coup de poignard en plein cœur que j'allais bientôt recevoir. Elle s'arrêta soudainement devant moi. Ses main tremblaient et des flots de larmes coulaient le long de ses joues.
- Pourquoi ? murmura-t-elle.
Pourquoi je l'avais abandonné ? Je n'en avais pas moi même la réponse.
- Pourquoi je n'arrive pas à te détester ?! cria-t-elle en relevant ses yeux multicolores vers moi.
Délicatement, j'enlaçais ce petit être tremblotant contre moi. Je pouvais de nouveau ressentir la chaleur de son corps, la douceur de ses cheveux, son parfum de lavande.
J'aperçu alors une lueur argentée et leva la tête vers la lune. L'astre semblait sourire et murmurait ces mots : "L'amour est le remède à tous les maux."

Elle avait raison...

FIN

La Larme de LuneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant