Chapitre 5

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Le lendemain, quand les grandes grilles s'ouvrirent devant elle, Emma en resta bouche bée. L'impressionnante demeure à l'architecture typiquement italienne élevait fièrement sa haute façade au milieu d'une végétation luxuriante. Emma remonta de sous son bras le matériel professionnel de Sergio en avançant au ralenti.

Un grand et large escalier en encorbellement donnait sur une terrasse magnifique bordée d'une piscine. La façade du Palazzo était ancienne si bien qu'elle lui donnait des allures d'un manoir. La brise fraîche du matin ramena toutes les senteurs fleuries qui ornaient le domaine. Emma s'arrêta un moment sur une jonquille et tenta de la toucher avant d'être expressément rappelée à l'ordre par la compagne du maître des lieux. Car si elle tentait jusque-là d'ignorer l'évidence, dès qu'elle entraperçut l'homme dans l'encadrement de la porte principale sculptée en chêne massif, Emma se savait plus que jamais en danger. Son visage la trahissait, chacune de ses émotions pouvait se traduire dans son regard. Et à cet instant, il exprimait de la peur mélangée à la honte de se montrer ici, devant cet homme implacable qui ne se doutait pas une seule seconde qu'elle portait son enfant. Le soulèvement de son cœur lui fit rater une marche elle fut rattrapée de justesse par une main qui avait trouvé le temps de se faufiler entre Sergio et Sharon. Comme s'il avait prévu de la voir chuter. Sa poigne de fer se resserra autour de son poignet avant qu'il ne fasse claquer sa langue.

— Auriez-vous la gentillesse de faire attention à vos employés, monsieur Lishiny.

Dérouté, le photographe prit un air désolé et se retourna vers elle.

— Mi scusi mia bella donne-moi le sac. S'enquit de dire Sergio en joignant le geste à la parole.

La main D'Azzario Dantes relâcha enfin son poignet. Emma se le massa en montant les marches sans lui accorder un regard.

Ils entrèrent dans la demeure et c'est seulement à ce moment-là qu'elle décida de relever les yeux.

La demeure était véritablement incroyable, très raffinée, tableaux de maître et meubles précieux, pas de doute, Emma se trouvait au cœur de la riche et puissante Dynastie Italienne. Soudain, elle eut l'impression de se jeter dans la gueule du loup. Surtout quand ce dernier se mit à la dévisager sans se cacher des autres. La situation était aussi surréaliste que terrifiante. Et elle en était l'unique responsable.

— Bienvenue chez moi, Déclara-t-il en les invitant à le suivre.

Elle resta un instant en retrait pour les laisser le suivre, elle avait besoin de reprendre sa respiration pour affronter ce shooting photo et surtout affronter cet homme.

— Je suppose que ce salon sera parfait ? Éluda Azzario en retroussant les manches de sa chemise.

— C'est parfait en effet, affirma Sergio en posant son matériel. Monsieur Dantes votre Palazzo et magnifique.

— Merci...se contenta-t-il de dire brièvement en plissant des yeux quand la jeune femme anglaise se faufila entre eux, les mains derrière le dos.

Elle était si timide que c'était presque tout nouveau pour lui, il voulait plonger dans l'intimité de la jeune femme et comprendre son comportement inédit pour lui.

Il avait l'habitude des femmes sûres d'elles et entreprenantes.

— Emma ? Les parapluies s'il te plaît.

Aussitôt, elle déplia l'un d'entre eux soigneusement pour le mettre derrière le fauteuil. Azzario la suivit du regard et surtout, observa son ventre, avec un arrière-goût amer dans la gorge.

— Où est le reste de votre famille ? Demanda Sergio.

— Ma mère sera malheureusement absente ainsi que mon frère, je serai le seul sur cette photo.

— On pourrait peut-être installer le fauteuil près de la fenêtre pour la lumière ? Proposa la jeune Anglaise d'une voix mal assurée.

— Oui c'est une idée Emma...

Sergio déplaça le fauteuil.

Azzario s'ordonna d'être un peu plus chaleureux et prit place sur le fauteuil, sa mauvaise humeur devait sans aucun doute être perceptible sur ses traits, cette colère qui ne quittait quasiment jamais était en train de le dévorer de l'intérieur.

Emma s'éclipsa lentement vers l'arche qui séparait en deux la salle à manger et observa la séance photo de loin. Azzario Dantes était si tendu qu'aucun sourire s'afficha sur son visage. Elle se demandait à présent ce qui lui était arrivé pour être aussi froid et insensible. Était-il comme ça depuis l'enfance ?

— Souriez monsieur Dantes.

Peine perdue, l'homme resta de glace au plus grand désespoir de Sergio.

— Je ne souris pratiquement jamais. Dit-il froidement d'une voix de gorge.

Sergio ne pipa pas un mot et reprit son travail sans s'attendre à recevoir un sourire de la part de l'homme, figé comme une statue.

Emma baissa les yeux et entoura son ventre de ses bras puis s'éclipsa dans le couloir pour tenter d'échapper à une nausée. Une nausée provoquée par la honte qui l'a submergé. Rien de ce qu'elle s'était imaginé se passer comme prévu, elle avait honte d'être dans cette demeure devant cet homme qui lui avait donné la chance d'avoir un bébé, et qui de par sa froideur l'empêchait de lui révéler les véritables raisons de sa présence. Et ce regard posé sur son ventre hier, ce regard austère qui lui avait clairement fait comprendre qu'il n'avait pas dans ses projets avenir, l'intention d'avoir un bébé. C'était sans doute pour cela qu'il avait donné cet échantillon, dans le seul but d'avoir un enfant quand il n'aurait plus d'autre choix que d'assurer une lignée.

Au dernier moment.

Emma se retint de pleurer et s'avança vers le tableau magnifique aux couleurs pourtant sombres. Il ne représentait pas l'ombre d'une joie, seulement la silhouette d'un homme face à la mer peinte d'une couleur aussi sombre que la profondeur de l'océan.

Elle s'approcha du tableau et jeta un coup d'œil curieux sur le meuble en bois. Elle toucha du bout des doigts l'éventail aux dorures anciennes, les yeux illuminés.

— Faites attention, il est fragile...

Emma réprima un sursaut qui aurait pu casser l'objet et se retourna pour affronter l'homme appuyé sur le mur avec une expression énigmatique.

— Je suis désolé je ne voulais pas le toucher...

Il s'avança vers elle et se pencha pour décrocher l'éventail de son socle.

— Il appartient à ma mère, elle attend de pouvoir le transmettre à la future madame Dantes. Expliqua-t-il d'une voix presque amère. Comme si cela n'allait jamais se produire.

Il le déplia et lui mit dans les mains.

Soigneusement, Emma toucha les bordures.

— Pourtant vous avez Sharon, elle ferait une épouse parfaite. Ne put s'empêcher de dire Emma timidement.

Il partit d'un rire amer.

— Jamais je ne pourrais épouser une telle femme.

Quand elle leva la tête vers lui, une ombre voila son expression déjà grave.

— Vou...vous n'avez pas envie d'avoir une...une famille pour remplir le Palazzo de joie ?

Sa question n'était pas sans arrière-pensées.

— Cette conversation est terminée, mademoiselle Brok. Dit-il sèchement en lui reprenant l'éventail des mains.

Emma avait eu la réponse à sa question.

L'Héritier secret D'azzario Dantes Tome 1 ( Saga des frères Dantes )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant