Alice ouvrit les yeux. Elle se sentait un peu perdue, mais pas trop, juste comme-ci elle sortait d'un bref moment d'égarement. Elle comprit d'abord que la voiture était à l'arrêt puis elle surprit son psychiatre lui sourire comme si il attendait son réveil depuis longtemps.
« Nous sommes arrivés. »
Mais ça, Alice le voyait bien à l'énorme bâtisse victorienne qui s'étalait devant elle.
« C'est bien plus qu'un manoir... Il y a autant de détraqués ? Demanda-t-elle s'empêchant de rire.
- Détraqué n'est peut être pas le mot qui leur correspond tous. Es-tu toi même une détraquée ?
- Non.
- Tu semblais le penser, Alice fuya le regard de l'homme et roula des yeux lorsqu'il ne la vit pas.
- Il y a-t-il des gens dangereux ici? Non pas qu'elle eut peur mais que tout ceci était nouveau et intriguant. Elle se dit qu'il serait vraiment étrange de manger à la même table que des criminels jusqu'à se rendre compte qu'elle en était une elle aussi.
- As-tu peur Alice? Je ne laisserai personne te faire du mal, n'y à mes patients.
- Pour cela, attendons de voir les méthodes que vous employez. »Mr.Manson sortit de la voiture et ouvrit la porte à Alice en lui adressant un sourire poli. Il prit les deux petites valises et en confia une à Alice. Ils passèrent une grande porte, deux fois plus grande que le docteur lui même. Alice fut éblouie. Il y avait de nombreux lampadaires dans un grand couloir où le papier peint de fleurs pastels l'accueillait chaleureusement. Elle s'attendait à un endroit décrépit et miteux. Loin de là, la "maison de repos" méritait sa renommée. Mais à la fin du couloir son enchantement redescendit. Il y avait une grille métallique mécanisé qui les attendait. À la vue du docteur, la personne qui s'occupait des ouvertures la fit se dévérouiller. Une fois passés, elle se referma accompagné d'un "bip" strident. Il y avait un comptoir et derrière celui-ci s'affairait des femmes strictement habillées. Elles saluèrent toutes leur patron d'un bonjour plein d'hypocrisie. Une attira l'attention d'Alice, elle était vraiment vieille, si vieille que son visage n'était qu'une masse de plis et ses cheveux un nid de paille grisâtres. Mr.Manson lui adressa alors la parole :
« Madelaine ? Pourriez-vous vous occuper de la demoiselle s'il vous plaît?
- Aucun soucis monsieur, je m'occupe de tout. C'est bien celle dont vous m'avez parlé? Il parut gênée et fit les gros yeux à la vieille, Alice aussi fut gênée d'apprendre qu'elle était déjà si célèbre avant même son arrivée.
- Merci Madelaine, vous êtes la meilleure. »Alice se demanda s'il parlait aussi amicalement à tous ses employés. Visiblement celle-ci était spéciale. Le psychiatre ne dit plus rien à sa patiente et se précipita au pas de course en montant les escaliers de gauche tandis que la vieille femme emmenait Alice vers celui de droite.
Tout était majestueux. Mais les nombreuses grilles sur le chemin venait entacher toute cette luxure. La femme les ouvrait en se débattant avec le trousseau qui étouffait tant il y avait de clés. Le couloir lui semblait ne jamais se terminer, il y avait parfois des tableaux accrochés au mur ou des commodes où trônaient des bibelots anciens. Elle se laissa même à croire qu'elle allait vivre dans un merveilleux parc à thème, mais la réalité était bien loin de là. Alice était dans une bulle d'eau et n'entendait pas la vieille femme lui parler, quoique si, mais c'était un brouhaha indistinct et elle n'y prêta pas attention, le femme non plus, bien qu'Alice ne répondait pas elle continua à lui parler. Mais le monde était muet.
« La pauvre. Elle est si jeune. Quoiqu'on puisse dire ça n'est pas sa faute. Ça ne peut pas. »
Mais ça, Alice ne l'entendit pas. Elle continua à marcher machinalement, admirant ce fichu papier peint à fleurs. Elles arrivèrent alors devant une porte de taille importante. Là Alice comprit qu'elle devait écouter la dame puisque celle-ci insista :
« Mademoiselle Liddell? Mademoi...
- Oui? répondit Alice le regard détaché.
- Nous allons passer dans la salle commune pour aller aux chambres, ne vous laissez pas intimider. »Alice acquiesça. Non ce n'était pas un parc à thème, pas un show burlesque au sujet un peu malsain, pas un film ni un livre, elle le vivait même si elle aurait voulu que ce fut une fiction ignoble crée par son cerveau. Elle n'avait pas peur mais appréhendait, elle allait bien sûr être la plus jeune, parmi des gens qu'elle ne connaissait pas mais avant tout parmi des personnes dérangées (tout comme elle, il fallait qu'elle se le précise encore). Alice entendait le bruit de l'autre côté de la porte. La dame l'ouvrit, elles entrèrent. Alice fut surprise. Il y avait d'abord des grandes tables de bois, des personnes étaient attablées mais elle ne s'attarda pas sur eux. Les murs étaient sublimés à nouveau par du papier peint d'un beau et puissant vert anglais, des motifs baroques d'un vieux blanc se croisaient chacun en de sublimes fleurs d'un blanc immaculé. Des roses. Il y avait des fauteuils en velours, et une scène rehaussée à droite de la pièce, elle était fermée par des rideaux bleus aux fioritures dorées. Tout était magnifique. Alice adorait la décoration, elle avait toujours adoré les choses anciennes, elle sourit presque mais elle se rappela que ce n'était autre qu'une maison de fou et que quelques décorations victoriennes ne suffiraient à faire son bonheur. Elle sentit également les regards se poser sur elle, entre les rires et les plaintes effrayantes et pourtant bien humaines. Elle pu même entendre quelqu'un la siffler. Elle se dépêcha même si elle ne savait où aller, la dame accéléra alors son rythme de pas, elles montèrent par un escalier à la moquette rouge et arrivèrent aux chambres. Des petits numéros gravés dans des plaques dorées ornait les portes. Elles marchèrent jusqu'à arriver au 106.
« Les chambres possèdent chacune leurs clés. Voici la votre, la femme lui tendit alors une merveilleuse clé de de fer, une clé ancienne arborait des courbes s'entrelaçant comme des ronces.
- J'ai une chambre?
- Tout le monde en a une. »Le femme lui désigna la serrure, Alice ouvrit la porte et découvrit sa chambre, un doux bleu céleste caressait les murs, il y avait une grande fenêtre qui pouvait être dissimulée par des rideaux blancs. Un bureau d'un bois imposant, un lit au matelas de nuage, une lampe à l'abat-jour saumon et d'autres choses qui l'émerveillèrent à nouveau.
Monsieur Manson a vraiment de l'argent à jeter. De telles chambres pour des fous. Pourquoi tant d'efforts pour faire paraître le lieu accueillant. C'est stupide. Maintenant je me sens toute bizarre, pourquoi cette chambre est si belle, pourquoi l'endroit semble me plaire... Il est vicieux, c'est ce que pensa alors Alice.
- ☀ -
Rien. Dîtes quelque chose.
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Alice au pays des macabres Merveilles
HorrorRéalité (nc.nf) : Caractère de ce qui est réel, de ce qui existe effectivement. « Tout ceci est dans ma tête, donc cet endroit est réel puisqu'il existe au biais d'une réalité. »