NINA

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Je me retourne et croise le regard de monsieur Finnigan, qui semble avoir couru.

- Hum... Je voulais savoir où vous comptiez vous rendre ? Fait-il en se passant une main sur la nuque, l'air embarrassé.

- J'ai pris assez d'argent pour quelques nuits dans un motel, j'improviserai par la suite.

Il s'avance un peu. J'avais à peine progressé dans la rue quand il est arrivé. Je n'avais d'ailleurs même pas compris qu'on m'appelait, j'étais trop occupée à m'imaginer Jessica dans son quartier, dans le parc en face de chez elle, ses cheveux blonds dans le vent. Elle aurait pu continuer à vivre cette vie presque trop parfaite, sans problème, avec ses parents, qui semblaient et semblent toujours l'aimer d'un amour inconditionnel.

- Nous avons une chambre d'ami à l'étage, si ça vous intéresse, à la place d'un endroit inconnu et dangereux...

- Le danger est partout vous savez, pas que dans un motel, il est là quand je me rends au lycée, quand je vais courir. Vous n'êtes pas obligé de faire ça, je peux me débrouiller.

- Je ne me sens obligé en rien, sachez-le. Et puis, j'aimerai que vous me parliez d'elle, de son vivant... car si j'ai bien compris, vous étiez ensemble, et vous, vous en êtes sortie.

Je le regarde un instant, ne sachant pas s'il est énervé que les rôles ne soient pas inversés, puis je remets la lanière de mon sac correctement sur mon épaule.

- Ce n'est pas une très bonne idée, et puis je ne pourrai rien vous apprendre de plus. Je ne sais pas non plus si elle s'en est sortie, mais en vous en parlant je ne ferai que de remuer le couteau dans la plaie, j'insiste, prête à partir d'un moment à un autre.

- Nina, Jessica a disparu il y a de cela trois longues années. Et aujourd'hui, j'en viens à me demander si c'est vraiment moi qui l'ai accompagné à sa première soirée pyjama, si j'étais vraiment là le soir quand elle se réveillait en panique à cause d'un cauchemar, si je l'ai vraiment amené à son premier match de baseball à ses huit ans, si j'ai été le père qu'il fallait. Vous êtes mon dernier espoir d'entendre parler de ma fille, d'une manière plus récente, même horrible soit-elle. Alors s'il vous plaît, restez.

Il a raison, ce serait égoïste de le priver de mes souvenirs avec son enfant. Je ne compte pas tout dire, du moins pas nos moments les plus sombres, mais il a le droit de savoir. Sa fille a vécu un enfer, et on s'est soutenu mutuellement, comme des sœurs, même si la parole n'était là, les actes oui. Mais je suis époustouflée. Elle aura tenu trois ans dans la douleur, alors que moi, au bout d'un an j'étais déjà prête à céder. Elle a fait preuve d'un courage hors paire, sans jamais se plaindre. Elle a et aura toujours mon respect pour ça.

- Vous avez le droit de savoir, alors j'accepte. Par contre, est-ce que ce serait possible que vous me tutoyez ? Parce que j'ai seulement dix-sept ans, je rie doucement, tandis qu'il me rend un sourire.

- C'est d'accord, mais seulement si tu m'appelles Evan.

Je hoche la tête et le suis. Nous rentrons dans la maison, et il s'arrête près du canapé où nous étions.

- Je vais te faire une petite visite guidée de la maison, comme ça tu pourras circuler librement.

J'acquiesce, et nous commençons par la cuisine, qui se trouve sur notre droite. Elle est spacieuse, gris métallisé, avec un garde mangé, un réfrigérateur immense, un plan de travail dans le ton des murs. Puis nous regagnons le salon, pour monter à l'étage par l'escalier en face de la porte du lieu que nous venons de quitter. Une fois en haut, je connais déjà la première pièce sur notre droite, puis je découvre celle d'en face, qui s'avère être la chambre d'ami. Nous continuons en diagonal, et il ouvre la porte qui se trouve renfermer leur chambre, à lui et sa femme, Madeleine si j'en crois ce qu'il me dit, puis à côté le « cabinet » d'Evan, qui contient un bureau en marbre, une immense bibliothèque qui me fascine déjà, et puis une fenêtre donnant sur le fameux parc pour enfants.

- Ici, c'était... la chambre de Jess...

Je ne lui demande rien, je lui souris simplement et je me permets alors de redescendre, car je ne pense pas qu'il veuille me la montrer, pas maintenant du moins.

- Ma femme va rentrer vers dix-huit heures, donc d'ici deux petites heures. Elle n'est pas au courant, et je ne veux pas qu'elle le soit. Elle a eu beaucoup plus de mal que moi à faire son deuil, et elle vient à peine de s'en remettre, je ne veux pas qu'elle souffre plus qu'elle ne souffre déjà...

- Je comprends, et je respecte votre choix, mais du coup vous voulez m'héberger sans lui dire qui je suis ? Je demande un peu perplexe.

- Je vais lui dire que tu es une stagiaire de l'université. Je travaille à l'Université de Virginie, aussi connue sous le nom de la UVA, et toi, tu en es dès aujourd'hui membre.

Je vais devoir me faire passer pour une autre pendant mon court séjour ici, d'accord.

- Mais vous avez pensez aux médias ? J'ai été affichée sur une dizaine de chaînes locales, elle risque de me reconnaître, non ?

- Je ne pense pas, mais tu resteras Nina, sauf que je te rajoute quelques années de plus, dit-il simplement, en s'asseyant sur le sofa en cuir. Ah et aussi, il y a une salle d'entraînement en bas, en prenant les escaliers.

Je le regarde avec des étoiles dans les yeux. S'il me le dit ainsi c'est que j'ai le droit de m'y rendre aussi ! Je suis surexcitée à l'idée de pouvoir m'entraîner souvent. Depuis que je suis rentrée, il n'y a que ça qui me permet de tenir, et les livres, et les films aussi, mais surtout le sport.

- Tu penses qu'on pourrait en parler plus tard ? Je vais devoir aller travailler dans mon bureau pour l'université. Si ma femme arrive préviens-moi, qu'elle n'ait pas une mauvaise surprise, rit-il, tout en montant par la suite.

Je pose mon sac près du canapé et sors de la maison. Je me dirige vers le parc et m'installe, seule, sur l'une des balançoires rouges. Tout est calme et paisible, et j'adore ça.



ALORS ? J'aurai du poster hier mais bon je crois que le vendredi j'ai toujours quelque chose à faire qui m'empêche de poster donc.. désolée ? Bref j'espère que vous avez aimé et puis vous allez découvrir pas mal de chose d'ici quelques chapitres 😌

Tell me the truth...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant