15.

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Un sentiment étrange envahi mon être tout entier. Je fixe avec insistance ma dernière phrase avec une immense crainte. Je l'avais emprisonné dans mon esprit depuis tellement longtemps que je me sens désormais semblable à une coquille vide. Le souvenir de cette soirée m'a habité pendant des années si bien que je ne me rendais pas compte à quel point il a gâché ma vie. Mes nuits sont peuplés d'horribles cauchemars, je n'arrive plus à parler et j'ai la phobie de toutes formes de violence. J'ai naïvement cru que tout garder pour moi me permettrai d'avoir toujours un contact avec ma mère. Je ne me suis jamais faite à l'idée de la laisser partir de la sorte. Je laisse quelques larmes couler sur mes joues encore humides à cause de mes derniers pleurs. Avec nervosité, je rebouche maladroitement le feutre en m'écrivant sur les doigts. Tremblante, je le pose sur le bureau du prof afin de sécher mes larmes. Tout à coup, Mia apparait devant moi, le visage remplit de douceur. Délicatement, elle me serre contre elle en me chuchotant un « je suis désolée ». Je lui rends son étreinte comme si nous étions amies depuis longtemps. Mais pour dire vrai, je crois que j'ai grand besoin de réconfort surtout avec tout le stress que nous avons accumulé précédemment. Elle finit par s'écarter de moi avec un petit sourire d'encouragement.

« Je comprends ta peur maintenant, dit soudain Ethan. Et c'est à cause de ça que tu voulais aller chercher Lexie ? »

Je hoche doucement la tête.

« Je suis désolé de n'avoir rien pu faire pour elle. Ça a dû être horrible de vivre deux fois la même chose, » ajoute-t-il.

Je n'ai pas le temps de lui répondre, des pas pressés se font soudain entendre dans le couloir. Jasmine court vers Mia et moi afin de nous cacher dans le labo des profs. J'ai juste le temps d'apercevoir Ethan effacer ce que j'avais écrit avant de le perdre de vue un instant à cause du mur. Terrassées par la peur, nous nous recroquevillons le plus possible contre le mur. Ethan n'a pas le temps de nous rejoindre que déjà la porte s'ouvre. Il s'abrite à deux petits mètres de nous, derrière le bureau du prof. Je ne sais même pas si Josh et Caleb ont réagi à temps. Toujours dans un état second après ma révélation, je suis pétrifiée par la peur. Mes yeux fixent ceux d'Ethan apeurés. La main de Jasmine est crispée autour de mon bras et me fait mal. Je grimace légèrement. Dans mon dos, j'entends Mia émettre de petits bruits de sanglots étouffés, comme si elle était entrain de retenir sa respiration. Des larmes me piquent soudain les yeux alors je les ferme rompant tout contact visuel avec Ethan. Je ne veux pas le voir mourir parce qu'il est hors de question que ce soit la dernière chose que je vais voir. Attentive à tous les bruits, je me prépare à sentir une ou plusieurs balles me traverser de part en part. J'entends une arme se charger. Je serre la mâchoire. Tout à coup, une voix grave s'élève :

« Qu'est-ce que tu fous ?

- Je crois que j'ai entendu du bruit. A mon avis, les gosses que l'on cherchait se cachent là. »

Mon cœur se serre. J'ai dû mal à respirer tellement la pression est forte. Mia ne va pas rester silencieuse très longtemps. Je crois que c'est la fin.

« On n'a plus le temps de jouer à cache-cache. Qu'ils restent là, on s'en fout. De toute façon, ils finiront comme tous les autres. Il faut juste les empêcher de sortir, réplique le premier. Gardes tes balles et allume la lumière. »

Après un instant, la porte se referme alors je rouvre les yeux. Ethan risque un œil et se relève en tremblant. Jasmine limite en s'appuyant sur mon épaule dénuée de force, suivit de Mia plus ou moins remise de ses émotions. Cette dernière m'aide me lever afin de pouvoir s'agripper à mon bras. A mon plus grand bonheur, je vois Josh assoir Caleb sur une chaise. Ils sont vivants... Je sais qu'aucune balle n'a été tirée mais il fallait que je les vois pour être sûre de moi et de mes sens. Cependant, j'ai l'impression que Caleb est de plus en plus pâle et son visage est inondé de sueur. Le fait de devoir bouger aussi rapidement pour se cacher ne doit pas être une partie de plaisir pour lui. Mais il ne dit rien, il intériorise sa douleur avec courage.

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