1 Octobre 2016
Le jour prenait naissance sur la ville des Requins. Cachés derrière la grande chaîne de montagne barricadant la petite ville côtière, les rayons du soleil tardaient leur arrivée, peinant à réveiller la ville endormie. La vie reprenait son cours, sans trop presser. Sans trop traîner. Les hommes déjà munis de leur machette, prêts à aller rabourer la terre et offrir leurs sueurs en holocauste aux forces et aux mystères de la nature qui feront venir la récolte bientôt. Les femmes en cuisine, attisant les feux des réchauds à charbon, en attendant de parer le café fort et chaud qui servira de déjeuné à la maisonnée, accompagné d'une baguette de pain achetée préalablement dans la soirée.
De parts et d'autres sous les cocotiers ou dans les cours des maisonnettes au pied de la butte, les chants cacophoniques des coqs se faisaient entendre et le bruit se propageait comme une épidémie dans toutes maisons, toutes les pièces.
Cavé ne mit pas longtemps à se réveiller. Ses pauières allourdis pesaient deux tonnes d'airs. Quatre ans qu'il subissait le même rituel tous les matins, il ne s'y habituait jamais. Il détestait tant ces bruits agaçants qui le tirait des bras de Morophée lorsqu'il s'y sentait le plus à son aise. Lorsque souvent, prêt à toucher le septième ciel dans les bras et dans les profondeurs de la belle inconnue de ses nuits, il tombait...sauvagement, dans la réalité. À son réveil, le papillon s'est déjà envolé, emportant à sa suite son doux fantasme, tout comme Cendrillon abandonnant à minuit, son prince encore avide de sa chaleur. Il détestait se réveiller ainsi, et devoir impatiemment, attendre que la nuit retombe. Attendre que son papillon revienne, assouvir son insatiable envie.
Comment cela se produisait? Il l'ignorait et cela ne l'intéressait pas tant que ça. Il en a toujours été ainsi. Avant que sa mère, Mama Dodo, ne nie la croyance des ancêtres pour s'adonner au protestantisme, elle lui a naré l'histoire d'un papillon noir, venu se poser sur sa couche, le jour même de sa naissance. On a d'abord cru à une malédiction, mais quand la mère questionna les grands maîtres, on lui dit qu'il s'agissait là d'un esprit protecteur dont nul ne connaissait l'origine. Cavé fut donc un temps considéré, comme un grand chanceux, un aimé des dieux d'Afrique, ou un enfant promis à un grand avenir, comme celle d'être initié hougan. Il en fut ainsi, jusqu'à ce que Mama Dodo trouve le Christ et abandonne le monde. Il fut alors interdit de mentionner quoi que ce soit ayant rapport aux surnaturel dans la maison. Et Cavé dut taire les visites du papillon dans sa chambre les nuits de son adolescence ainsi que ses premières voyages voluptueuses dans le corps de l'inconnue dont il ignorait aujourd'hui encore le nom, ou l'origine. Était elle seulement réelle. Des fois, il avait l'impression que cela dépassait largement le cadre de rêve ou de fantasme nocturne. Et ce matin encore il se réveillait, le membre en chaleur sous les draps; une érection en furie ne semblant pas vouloir partir de si tôt.
Des coups à la porte de sa chambre.
"Qui est ce?"
Il ne reçu aucune réponse et déjà le poignet de la porte s'était mis à tourner. Tel un enfant pris en faute, Cavé s'empressa de se mettre en position assis pour cacher la distension de son appareil génital.
Sur le pas de la porte apparut Nadine, plateau de café noir et fumant, accompagné d'une tranche de pain rassis en main. Elle jeta d'abord un coup d'oeil dans la chambre pour vérifier que Cavé était bel et bien réveillé, jeta un autre coup d'oeil en arrière pour s'assurer que personne ne se trouvait dans les parrages puis referma la porte en faisant tourner la serrure. La voilà rassurée.
Plus calme à présent, elle déposa le plateau sur la table de chevet près de la porte. Elle était pied nus, vêtue d'une longue robe en coton léger rouge, épousant à merveille sa silhouette imposante de délicieuse négresse et tombant jusqu'à ses fins mollets. Elle portait ses cheveux défrisés dans un chignon haut et à première vue, on irait jusqu'à dire qu'elle s'était parée pour ce rendez-vous matinal. À chaque enjambées, on voyait trésautter sous la robe le bout de ses mamelles arrondis tandis que le tissus venait caresser ses cuisses et s'attardait un peu sur les sillons de son entre-jambe. Nadine avait le regard coquin. Eh oui, elle avait une idée derrière la tête et se plaisait bien à attiser le feu, bien trop visible entre les cuisses de son homme.
"As tu faim?" Lui questionna t elle d'une voix innocente, pleine de sous-entendus. ".. .Je t'ai apporté à manger."
Et elle vint s'asseoir sur le petit lit, un peu restreint pour deux personnes. Ce même lit qui fut témoin de leurs souvenirs de prés-adolescents fous. Lui qui connut leurs premières timides relations, lors de leurs jeux "manman papas", avant que l'âge ne fasse tourner les jeux en réalités et que s'en suive l'amour, les jalousies et la distance. Dix ans de séparation... Le matelas s'enfonça sous son poids. Elle lui sourit. De ces sourires qui voulaient dire ce qui ne se disaient avec les mots.
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Papillon Noir
ParanormalElle lui a appris l'amour... Elle lui a appris l'ivresse... Elle a été la première... Mais il n'est qu'un homme comme les autres. Et elle, un rêve inaccessible. Qu'arrive t il alors, quand nos plus doux fantasmes deviennent... Réalité!!! -Papillon n...