New Reset ( CharaXSans )

Partie 13

Je reste là toute la nuit, la tête posée sur les genoux, mes bras entourant ceux-ci.
Enfin, toute la nuit...
Je ne sais pas exactement. Plusieurs heures, à jouer avec mes cheveux, tapoter le mur ou le sol, fredonner des airs dont je ne me souviens plus la provenance...
Le temps passe très vite. 
Et, lorsque le poids du silence commence à m'exaspérer, une voix retentit :
《 - Mais qu'est-ce que tu fiche là ?! 》
Je sursaute comme jamais.
《 - Oh mon Dieu, mais t'es partout ou quoi ?! 》
Sans se tient devant moi, abasourdi.
《 - Tu peux parler ! Il est même pas 7h et je te retrouve loin de chez toi, en pyjama. Qu'est-ce que t'as foutu ?
- Rien, c'est pas important. 》
Il se radoucit.
《 - Si ça t'as poussé à fuir de chez toi, c'est forcément un peu important.
- T'as pas besoin de savoir. Laisse-moi...
- Dis-moi, tu sais que je te jugerai pas ! 》
Lui ?
Lui qui m'en voulais à mort ?
Il ne me jugerai pas ?
J'ai vraiment du mal à le croire !
《 - Bien sûr que si, toi plus que quiconque. Et toi, qu'est-ce que tu fais là ?
- Dévie pas le sujet. Bon, si tu ne veux pas m'en parler je comprends, mais rentre au moins chez toi. Tu es plus que vulnérable ici...
- Non ! 》Je serre les dents. 《 Je... Je peux pas rentrer, d'accord ? 》
Il a l'air un peu inquiet, et perdu.
Je continue.
《 - Et je ne suis pas vulnérable.
- Chara... Qu'est ce que tu as ? 》
Je me mord la lèvre,  si fort qu'un goût de sang me pique la langue.
Le sang... J'adore ce goût métallique.
C'est vraiment... Agréable.
Mais c'est exactement la raison pour laquelle je suis bloquée.
《 - Sans... Je... Je ne peux pas t'en parler. C'est pas une question de volonté ou... Je sais pas... 》 Je laisse ma tête tomber sur mes genoux.
D'une petite voix qui ne me ressemble pas, je lui dis :
《 - Juste laisse-moi tranquille... 》
Des larmes poussent contre mes paupières, mais elles ne s'échapperont pas. Je le regarde, à travers les mèches de cheveux qui me dissimulent aux yeux du monde.
Il se passe la main derrière la nuque, l'air... Impuissant.
《 - Bon, écoute gamine. Tu me laisse pas le choix. 》
Qu'est-ce qu'il va encore inventer ?
《 - Tu te sens pas bien. Tu es sortie de chez toi la nuit, sur un coup de tête. Ça laisse supposer que c'était un cauchemar. 》
Je sursaute et relève la tête. Il réfléchit en me regardant. J'avais oublié qu'il était foutrement intelligent.
《 - Arrête...
- Un cauchemar qui te fais sortir de chez toi. C'est donc soit que la source de ta frayeur se trouve chez toi...
- Stop.
- Soit c'est l'inverse, tu as peur de faire quelque chose de mal chez toi.
- Ferme la...
- En outre, tu as dis que je t'en voudrais plus que quiconque. Donc... 》
Avant qu'il ne termine sa phrase, je me lève et lui plaque la main contre sa bouche.
Je sens un nouveau flot de larmes remonter. Je respire très fort et lentement.
《 - S'il-te-plaît. Juste tais-toi. 》
Mais sais qu'il a compris.
Pourquoi il fait ça, sinon pour me faire souffrir encore plus ?
Pourquoi il me pousse à bout comme ça ?!
Une seule larme. Une seule larme coule sur ma joue.
《 - Tu... T'as compris, hein ? T'es pas si con que ça ! Et donc maintenant tu vas me laisser réfléchir tranquille. Parce-qu'on sait tout les deux de quoi je suis capable. 》Je respire de plus en plus difficilement. 《 On le sait !! Et on l'a assez expérimenté. Alors laisse-moi. Je n'ai pas besoin d'aide. Je ne veux pas d'aide. Je veux juste comprendre, seule, comment je fonctionne, pourquoi je suis moi ! Pourquoi... 》
Je n'en peux plus. De toute manière, il m'a vu pleurer plusieurs fois maintenant...
Alors je recule de plusieurs pas, jusqu'à m'adosser au mur, et j'enfoui mon visage dans mes mains, pour cacher au monde l'évidence : le barrage à cédé, et c'est une véritable cascade d'eau salée qui s'échappe de mes yeux.
《 - Pourquoi je suis comme ça ?  》
Je secoue la tête.
《 - Incapable d'être heureuse alors que tout va pour le mieux. Incapable d'être satisfaite de ma situation. 》
Je m'écroule au sol.
《 - Incapable... D'aimer...? 》
Je ne sais même pas si c'était une question ou une affirmation.
Je ne sais plus.
Est-ce que ce dont j'ai besoin pour être heureuse c'est de tuer, ou d'être entourée ?
La réponse est peut être évidente pour certains. Mais pas pour moi.
Sans s'approche.
Je relève la tête et lui fait un pauvre sourire.
《 - Tu sais, je crois que la méthode du câlin marchera pas cette fois. 》
Il sourit et s'accroupit, pose ses mains sur mes épaules.
《- Je peux toujours essayer ! 》
Et ses bras se referment autour de moi, de nouveau.
J'enfouis mon visage dans son épaule.
Il me parle à voix basse, comme on le ferait à un animal blessé, pour le rassurer.
《 - C'est faux. Tu n'es pas incapable d'aimer. Tu aimes ta famille. Et plus que tout, tu aimes ton frère. 》
Je relève un peu la tête.
《- Mais je ne peux pas ! Je suis dangereuse...
- Et ça aussi c'est faux. 》
Je lui lance un regard incrédule.
《 - C'est faux car tu as peur. Peur de ce que tu peux faire. Et ça prouve que tu en es incapable. Si tu as peur de faire une connerie, tu ne la fais pas, pas vrai ? C'est exactement la même chose. Alors ça ne sert à rien de te torturer comme ça. 》
C'est bon d'entendre ça, mais je ne suis pas sûre d'être tout à fait convaincue. Et je pense qu'il me surestime.
《 - Sans... Je peux pas rentrer... 》
Je lève les yeux vers lui, en le suppliant presque silencieusement de ne pas me renvoyer chez moi.
《 - Sûre ?
- Je suis juste... Pas prête.
- Alors viens. 》
Il tend la main vers moi.
Je la regarde quelques secondes avant de la saisir.
Il me traîne presque.
《 - On va où ?
- Chez moi ! 》
Je le regarde comme s'il était devenu fou.
《 - Ah oui mais en fait non ! Enfin je veux dire... Il y a ton frère, et puis je veux pas... Déranger. 》
Il se retourne, avec un sourire.
《 - Tu sais je commence à te connaître. Je sais que tu ne veux pas qu'on te voit comme ça. C'est pour ça que je ne te proposerais pas de venir si Papyrus était là. Mais il est chez Undyne. Soit disant pour peaufiner son entraînement, mais je crois qu'Alphys est avec eux, alors à tous les coups ça s'est transformé en soirée animes. 》
Je le laisse donc m'emmener chez lui, tout de même pas trop sûre que ce soit une bonne idée.
Lorsque nous entrons, la maison est étrangement calme, et plutôt accueillante.
《 - Fais comme chez toi. 》
Je me laisse tomber sur le canapé,  dans un grincement de ressorts rouillés.
《 - Euh au fait... T'as dormi, un peu ?
- Oui. 》
Il me lance un regard sceptique.
《- Un peu...
- Attends moi ici. 》
Il monte à l'étage et revient avec un plaid.
《 - C'est pas la peine...
- Mais si, allez. Faut bien que tu dormes pour être en forme ! 》
Je soupire mais accepte tout de même la couverture. Je m'allonge sur le canapé.
Et il ne me faut pas longtemps avant que la fatigue ne l'emporte.

《 *Il n'y a rien. Juste une voix. La voix aiguë et retentissante de celui qui prétendait être mon frère.*
- Tu verras, Chara... Tu verras. Est-ce vraiment le bon choix que de te faire tout ces amis si à la fin tu les tues ?
*Je ne peux pas parler.*
Car oui tu vas les tuer. C'est dans ta nature.
Tu peux essayer de le nier tant que tu veux, ça te rattrapera.
Tu n'es pas heureuse avec tous ces imbéciles... Il y a bien plus amusant... 》

Je me redresse, quelques gouttes de sueur perlant sur mon front.
《 - Heh, on se réveille ?
- J'ai dormi longtemps ?!
- 2, 3 heures. 》
J'ai l'impression de m'être à peine allongée...
Sans me regarde, l'air attendri.
Il m'a regardé dormir ou...?
Mes joues chauffent un peu, mais je ne rougis pas.
《 - Oh, tant que j'y pense, je suis allé acheter ça. 》
Il sort de sa poche un objet rectangulaire. En m'approchant, je m'aperçois que c'est une tablette de chocolat.
Je ris.
Il hausse les sourcils, amusé.
《 - Ça ne te plaît pas ? 》
Pour toute réponse, je lui prends la friandise des mains.
Je détache une barre et mange un carré.
《 - Pas du tout ! 》
Son sourire s'agrandit.
《 - Cool. 》
Il y a quelque chose dans ses yeux qui pétille. Ça me fait sourire.
Je pince les lèvres et lui tend un carré.
《 - Euh... Tu en veux ?
- Bof, c'est trop sucré.
- Dis le mec qui m'as limite forcée à prendre une glace, la dernière fois !
- C'était pour te faire patienter !
- Mouais. Bah, ça en fait plus pour moi ! 》 Lui dis-je en mangeant un autre carré.
Il rigole, avant de reprendre son sérieux.
《 - Ça va mieux ?
- Ouais...
- J'ai contacté Toriel, tu sais.
- Tu as quoi ?!?
- J'ai prévenu une mère inquiète que son enfant était en sécurité...? 》 Sa phrase sonnait presque comme une question.
《 - Ouais, évidemment que dis comme ça...》 Je me prends la tête dans les mains. 《 Elle va tellement me tuer...
- Non, t'en fais pas, je lui ai juste dis que tu étais sortie ce matin et que je t'avais croisée. Je ne lui ai pas... Tout raconté.
- Mais si elle me voit rentrer... Comme ça ? 》Je fais un geste large pour désigner mes " vêtements ".
《 - Bah... Je vais te prêter un haut, et sinon... C'est short, non ?
- C'est pas vraiment le genre de short que je porterais la journée, mais, je suppose que j'ai pas le choix... 》 Dis-je en soupirant.
Je me change et nous partons donc vers chez moi.
J'appréhende la réaction de mes parents...
Je secoue la tête.
Sans commence à marcher vers Waterfal.
《 - Tu veux y aller à pieds ? 》
Il semble très mal à l'aise.
《 - Bah, ça va te réveiller.
- Non, mais toi, Sans, reconnu pour sa flemmardise à toute épreuve, accepte de se taper un chemin de quelques heures ?! Tel que je te connais, j'aurais pensé que tu voudrais encore te téléporter, ou...
- Ah oui ? Eh bien ce n'est pas le cas. 》
Tiens, c'est bizarre.
Pourquoi il se braque, d'un coup, comme ça ?
《 - Euh, Sans ? Je t'ai vexé ou... Non, parce-que je t'ai pas insulté non plus ! 》
Il ne prend même pas la peine de se retourner.
Quel caractère...
Nous marchons en silence quelques minutes jusqu'à ce qu'il lance, d'un coup :
《 - Je peux pas. 》
Je sursaute, mais l'invite à continuer.
《 - Tu peux pas quoi ?
- Me téléporter. Je peux plus. 》