Bonus: Frontière floutée

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Résumé: Alfred et Mathieu sont des frères jumeaux mais fait exceptionnel, l'un est Alpha et l'autre Oméga. Depuis leur treize ans, ils s'attirent malgré eux mais à l'aube de leur majorité et à la pointe de leurs instincts, il est temps de se décider à avancer.

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Alfred et Mathieu venaient d'avoir dix-sep ans début juillet et ils allaient entrer en première à la rentrée de septembre. Al en première S et Matt en première L, chacun ayant prit la filière qui lui plaisait le plus. Cependant, si leur vie au lycée se passait bien, il y avait quelques autres petits soucis à gérer à la maison.
Mathieu profitait des quelques jours de vacances restant, soulagé que ses chaleurs aient eut lieu avant la rentrée. Cependant, il était chagriné que Al recommence à s'éloigner de lui. Profitant d'un jour où ils étaient seuls à la maison car Francis et Arthur étaient en ballade en amoureux, Mathieu prépara un plateau télé composé de deux glaces et deux canettes. Il frappa à la porte de son frère et entra, sourire aux lèvres. Son jumeau se détacha à peine de son jeu vidéo, un truc genre Saints Row ou il ne savait quoi. Il s'assit en posant le plateau.
- Ça se passe bien Al?
Un borborygme lui répondit et Mathieu soupira. Il prit son pot de glace au caramel et commença à le manger silencieusement. Au bout d'un moment, Alfred se sentit coupable de l'ignorer et laissa son jeu en pause une fois la mission en cours terminée. Il attaqua sa glace triple chocolats et aperçu le sourire de son frère, le rendant moins coupable.
- Merci Matt.
- J'avais envie de passer du temps avec toi. Après tout à la rentrée, on n'aura pas le même emploi du temps, on ne se verra peut-être plus autant.
La culpabilité d'Alfred revint à la charge et même au triple galop. Il se doutait que Matt n'avait pas apprécié qu'il le fuit sans explications, surtout qu'il n'y avait pas eut de disputes entre eux, donc pas la moindre raison valable à son comportement.
- Je suis désolé Matt...
- Ah, je peux donc avoir une explication à ta nouvelle lubie de me fuir? J'ai fait quelque chose?
- Non tu n'as rien fait. Enfin si mais... c'est pas ta faute. C'est moi qui suis con de réagir comme ça.
- Je ne comprends rien. Explique toi mieux.
Alfred reposa sa glace, l'air clairement mal à l'aise. Il était rouge jusqu'aux oreilles et se dandinait sur sa chaise à roulettes. Son jumeau se contentait de le regarder, attendant patiemment que l'autre veuille bien déballer ce qui lui pesait sur le cœur. Finalement, Al se dressa comme un ressort et commença à faire les cent pas dans sa chambre, une main passant nerveusement dans ses courts cheveux dorés.
- Al... Qu'est-ce qui ne va pas?
- Tes chaleurs... Elles me rendent fou Matt... De plus en plus, elles me rendent dingue! Tu sens si bon et je n'arrive même plus à m'empêcher de me branler pendant ces trois putains de jours!
- ...
- J'en suis quasiment à griffer le mur qui nous sépare, quand je passe devant ta porte j'ai envie de la défoncer, j'ai envie de me perdre dans ton parfum et de...
Il se prit la tête à deux mains, shootant la poubelle d'un grand coup de pied, renversant son contenu sur le parquet.
- C'est pas ta faute Matt! Mais j'ai peur... J'suis un Alpha, un putain d'Alpha! Je pourrais te faire du mal, je pourrais te...
Ses grands yeux bleus étaient écarquillés de peur, brillants de larmes contenues. Mathieu se leva et s'approcha de son frère, tendant la main vers lui mais ce dernier la claqua violemment, l'éloignant ainsi. Il ramena sa main à lui, la serrant contre sa poitrine.
- Je suis désolé Al... Pour moi aussi c'est dur, je te sens et j'ai envie de toi... Mon propre frère me donne envie de me frotter contre le mur, de venir couiner à ta porte... Je ne savais pas que c'était aussi difficile de ton coté...
Alfred regarda son frère, qui était lui aussi au bord des larmes mais il n'osa pas s'approcher, il avait peur de le toucher. Il se l'avouait à lui-même, il avait peur de ce qu'il pourrait faire. Matt ne s'embarrassa pas de telles pensées et s'avança à nouveau, cette fois l'autre ne recula pas. Hissé sur la pointe des pieds, il passa sa main sur la nuque de son jumeau et l'obligea à se pencher pour qu'ils soient front contre front, comme lorsqu'ils étaient enfants et que l'un des deux se glissait dans le lit de l'autre pour ne pas dormir seul.
- Al écoute moi. Je crois qu'on a atteint l'âge où il faut qu'on évacue nos pulsions avec une autre personne. Tu dois te trouver un partenaire et moi aussi. Je porterais l'odeur d'un Alpha, ça te tiendra à l'écart et toi, tu seras enchanté par celle de ton Oméga. Ça ira mieux, d'accord?
Alfred ne dit rien, se contraignant à faire taire la jalousie qui se pointait à la mention qu'un Alpha ne lui vole son frère. Mais il avait raison, ils devaient se détacher l'un de l'autre, laisser leurs instincts se complaire avec quelqu'un d'autre. La situation redeviendrait alors vivable à la maison. Il ferma les yeux puis serra son frère contre lui, l'enlaçant enfin en retour.
- D'accord frangin. T'as toujours été le cerveau de toute façon.
- Ne te fais pas passer pour plus idiot que tu ne l'es.
Ils se fixèrent l'un l'autre pendant quelques instants puis un sourire apparu avant que ce dernier ne se transforme en rire, une rire bienfaiteur, apaisant les tensions de ces derniers temps.

A la fin du premier trimestre, Alfred finit par ramener quelqu'un à la maison. Une personne à la fois étonnante mais pas tant que ça. En effet, Alfred avait toujours entretenu une relation assez conflictuelle avec Nikolaï Arlovskaya mais c'était le genre de relation qu'on pouvait avoir quand on taquinait une personne qui nous plaisait pour avoir son attention. Alors Mathieu ne fut pas si étonné que ça, au final. Il avait sourit à Nikolaï, lui avait proposé à boire puis l'avait laissé monter avec Al dans sa chambre sans plus de questions. Francis, rond de ses cinq mois de grossesse vint aux renseignements.
- Qui est-ce?
- Avec de la chance, le futur petit-ami d'Alfred. Comment va notre petit frère?
- Oh je vois, tant mieux. Et très bien, je t'en remercie. Il semble agité.
Francis était finalement tombé enceint de Roderich, qui n'arrivait pas à faire d'enfants à sa femme, Alpha tout comme lui. Après concertation, Francis allait bien évidemment élever le bébé mais celui-ci serait prénommé d'après Roderich et portera aussi son nom, en faisant ainsi son héritier. Arthur n'avait plus sourcillé à partir du moment où on lui avait dit que le gamin grandirait auprès de son père Oméga et de ses grands frères.
- Je vais préparer des cookies. J'ai des envies de cookies.
- D'accord Papa, appelle si tu as besoin d'aide.
- Oui mon grand, aller va.
Matt fit un grand sourire à son père puis s'éclipsa à son tour.
Nikolaï devait s'avouer qu'il pensait que la chambre du blond serait largement plus bordélique que ça. Quelques jeux vidéos traînaient et un ou deux tee-shirts aussi mais c'était bien rangé malgré tout. Il s'assit sur le bord du lit, sur les draps à l'image de New York pendant que le propriétaire de la chambre s'affalait sur sa chaise à roulettes. Alfred se sentait gêné d'avoir Nikolaï dans sa chambre, son imagination d'adolescent sous hormones lui faisait miroiter mille choses. Nikolaï était d'origine biélorusse et il était Oméga, du coup, Alfred se posait des questions sur son éducation, il avait entendu pas mal de choses sur l'éducation slave des Omégas. Bon, l'Union Européenne était censée chapeauter la Biélorussie aussi mais les traditions avaient la vie dure non? Il sursauta légèrement en se rendant compte du regard bleu cobalt rivé au sien d'un clair bleu d'azur.
- Tu penses à des choses stupides.
Il ne pu s'empêcher de rougir.
- Désolé, je me demandais... Tu sais, en tant qu'Oméga tout ça...
- Ma famille ne m'a pas élevé pour être un esclave sexuel, espèce d'Alpha pervers.
Alfred rougit encore plus et se tortilla sur sa chaise, gêné au possible. Il rêvait de pouvoir disparaître sous terre tant il se sentait ridicule. Cliché à la con, Nikolaï était né et avait grandit en France. Bien sûr qu'il n'était pas l'un de ces Omégas devenus des poupées sans volonté autre que celle de plaire à leur Alpha en réalisant toutes ses demandes et en le glorifiant comme si il était un dieu vivant tout en se traitant eux-mêmes comme de simples animaux dépendants de leurs maîtres si généreux. Nikolaï finit par tapoter la place près de lui et Alfred comprit le message, se levant pour s'installer à ses cotés. Le jeune homme posa sa tête contre son épaule, ce simple contact rendit tout chose Alfred.
- J'ai toujours cru que tu me détestais.
- Non, j'aime embêter ceux que j'apprécie. Demande à mon frère.
- C'est stupide comme approche amoureuse.
- Le plus stupide c'est celui qui essaye de cette façon ou celui qui succombe?
Nikolaï lui mit une petite tape sur la cuisse mais ne bougea pas de sa position. Il se sentait bien près de lui. Alfred osa finalement bouger son bras et enlaça son camarade, le tenant encore plus proche de lui. Il prit une grande bouffée de son parfum, adorant l'odeur de mûres sauvages qui se dégageait de Nikolaï. Ça lui faisait penser à un sorbet. Machinalement il le lui dit et le concerné ne pu s'empêcher de rire.
- Toi tu as une odeur plus chaude. Le cuir et le soleil... C'est difficile à dire. Tu ressembles au Far West.
- Tu rigoles?
- Non.
Le visage de Nikolaï restait sobre la plupart du temps mais là, Alfred ignorait si il s'agissait d'un compliment, d'une plaisanterie ou de la vérité. Dans le doute, il ne dit rien d'autre et se contenta de câliner son camarade qui apprécia le traitement en silence, sa main traçant des arabesques sur la cuisse de l'autre, à travers son jean.

Mathieu mâchouillait son stylo tout en réfléchissant à sa situation, il se sentait un peu seul maintenant que son frère roucoulait avec son biélorusse. Même si du coup, leur relation s'en portait mieux, ça il ne le niait nullement! Il était dans un coin à l'écart dans un café, n'avançant guère dans son commentaire de texte, il devrait le finir avant la rentrée de Janvier. Mais il n'était guère motivé.
- T'en fais une tête!
Il releva enfin les yeux de sa feuille de brouillon pour tomber dans deux prunelles brunes fort jolies.
- Tiens j'ai un cadeau pour toi.
L'autre posa une coupelle de glace devant lui. Vanille avec sirop d'érable et supplément de noix de pécans caramélisées, sa préférée.
- Merci Juan... Comment tu as su?
- Disons que j'ai mit les moyens qu'il fallait pour apprendre à te connaître.
Juan Machado était un garçon cubain, sa famille avait emménagée dans le coin au début des vacances d'été. Il était grand et costaud, la peau bronzée, de lourdes dreadlocks sur la tête retenues par un bandana rouge en général. Il s'assit en face de Mathieu, commençant à manger sa propre coupelle de sorbet au fruit de la passion. Mathieu entama alors la sienne, un peu intimidé d'être en face de cet Alpha qu'il ne connaissait pas vraiment mais qui lui, savait sa glace favorite. Juan avait été de suite attiré par l'autre garçon, sa peau de lait, ses clairs yeux mauves, sa pâle blondeur. Mathieu avait beau être le frère jumeau d'Alfred, il ne lui ressemblait pas vraiment, pas juste par sa nature Oméga qui lui offrait des traits fins et une allure délicate, il se démarquait surtout par sa personnalité gentille, généreuse mais il ne se laissait pas monter sur les pieds pour autant. Puis son odeur... A croire qu'il avait tant mangé de sirop d'érable que cela en était devenu son parfum naturel. Une odeur indéniablement sucrée et attirante, enivrante. Mathieu croisa les jambes et se recula légèrement, ce n'était pas une réaction consciente mais son corps avait sentit le léger pic d'excitation de l'Alpha en face de lui et il s'était éloigné pour se protéger. Hormis son père, Romulus Vargas, son frère et le nouvel Alpha de Francis, Mathieu n'en côtoyait pas si souvent. Bien sûr il y avait certains camarades de classe mais la plupart étaient des Bêtas malgré tout.
- Je t'embête Mathieu?
- Non, ne t'inquiète pas. Encore merci pour la glace.
- Ça me fait plaisir. J'ai envie de te connaître mieux, je vais être honnête Mathieu, tu m'intéresses beaucoup mais ton frère m'a mit des bâtons dans les roues dès la rentrée.
- Vraiment?
- Alfred ne m'aime pas beaucoup, semblerait-il. Il est toujours aussi protecteur avec toi?
- Oui, depuis notre dévoilement...
- Il s'est mit en tête d'être l'Alpha protecteur de son Oméga de petit frère.
- C'est ça. Mais nous n'avons que quelques minutes de différence, nous sommes jumeaux après tout.
- Et donc? Ça t'ennuie que je m'intéresse à toi?
Mathieu rougit et Juan le pensa absolument adorable. A croquer même. Il reprit une cuillère de glace pour se donner contenance mais le regard brun se fixa sur ses lèvres et il rougit d'autant plus. Il toussota légèrement pour se reprendre, ramenant les yeux de l'autre sur les siens au passage.
- Je suis d'accord pour qu'on apprenne à mieux se connaître.
- Je serais ravi d'être ton ami mais j'espère plus, je ne veux pas te faire peur ou te faire sentir oppressé, je veux juste être d'une transparence irréprochable. Cela dit, je ne te toucherais pas de quelque façons que ce soit sans que tu ne le veuilles. Je méprise ces Alphas violents.
- Ça me rassure. Mais si ça arrivait, ma famille te tomberait dessus et c'est pas sûr que Alfred soit le pire en la matière.
Juan ne pu s'empêcher de rire et cela fit sourire Mathieu. L'autre sentait les fruits exotiques et le soleil, un parfum qui l'attirait pour la bonne humeur qu'il semblait dégager. Mais effectivement, aussi enceint soit-il, Francis n'hésiterait pas un instant à aller défendre l'honneur de son bébé sans compter Arthur qui était loin d'avoir toujours été un gentleman irréprochable. Non vraiment, Alfred n'était pas forcément le seul à craindre. Et tout ça, c'était sans même compter l'Alpha en chef à savoir Romulus! Se mettre un millionnaire à dos, quelle idée stupide!

Mathieu rentra à la maison et posa ses patins, lui et Juan passaient souvent leurs week-ends à la patinoire depuis leur rencontre à la fin des vacances de Noël. Matt adorait patiner mais Juan n'était pas très doué donc ils se tenaient souvent par la main, un doux début de rapprochement pendant ces quelques semaines. Ça le mettait sur un petit nuage! Il sursauta quand Alfred fit claquer la porte de sa chambre. Soupirant, il termina de ranger correctement ses patins à glace, remettant la glissière en plastique sur les lames.
- Al, n'entre pas ici comme dans un moulin!
- T'as intérêt d'arrêter ce que tu fais!
- Quoi donc?
L'étonnement était sincère. De quoi son frangin pouvait-il parler? Il ne faisait rien de particulier, il faisait ses devoirs, le lycée se passait bien, il aidait à la maison... Tout allait bien, donc quoi?
- Arrête de fréquenter Juan!
- Je te demande pardon?
- Ce type ne doit pas être ton Alpha! Faut vraiment arrêter la casse. Je sais mieux que toi.
- Et pourquoi tu sais mieux? Parce que tu es un Alpha et moi un pauvre Oméga?! Je suis stupide tu penses?!
- Non! Mais lui est infréquentable!
- Je ne veux pas quitter Juan!
- Parce qu'en plus vous êtes ensemble?!
Le ton ne cessait de monter entre les deux et bientôt tout le premier étage se mit à résonner de leurs cris. A l'étage du dessous, Francis commença à s'inquiéter. Il se cala mieux dans sa chaise à bascule, jetant un œil à Arthur qui avait cessé de broder la couverture qu'il préparait pour le futur bébé.
- C'est la première fois que je les entends crier aussi fort...
- Arthur, je n'ai pas envie de monter les escaliers et le bébé est toujours aussi agité. Tu peux aller calmer ses grands frères?
- J'y vais.
Arthur se pencha et embrassa le front de son compagnon qui lui sourit en retour. L'anglais adorait voir l'Oméga enceint, ça le rendait encore plus beau. Quand il l'avait rencontré, les jumeaux étaient déjà grands. D'ailleurs, ils continuaient à hurler ces deux là! Il monta donc l'escalier quatre à quatre et ouvrit en grand la porte de Mathieu, découvrant celui-ci plaqué contre un mur, le poing de son frère près de son visage et vu la tronche du papier peint, ce n'était pas le premier coup.
- Ça suffit!!
Il s'approcha à grands pas et tira en arrière Alfred, l'éloignant de son jumeau. Il le fit asseoir sur le lit et fit asseoir Mathieu sur la chaise de bureau, restant bien au milieu des deux.
- Qu'on me fasse un résumé et vite fait j'entends!
Après un récit embrouillé des deux, il comprit le nerf de la guerre. Alfred était jaloux que son frangin se soit trouvé un mec, ni plus ni moins. Arthur croisa les bras, sourcils froncés.
- Al, tu n'as aucuns droits concernant les relations de ton frère. Tu as ton propre Oméga, couche avec lui si ça aide ton instinct erroné à se la fermer. Sans te lier, ne fais pas le con! Quant à toi Matt, on va en parler avec ton père mais te trouver un collier pourrait t'aider à profiter de ta relation avec ce Juan sans avoir le risque de vous lier par accident.
- ...Je suis plutôt d'accord, concernant le collier.
- Quoi?!
- Shut up Al! Vas y Matt, je t'écoute.
- Pour un Oméga, se lier est vraiment une grande peur. C'est aussi le risque de tomber enceint et tout un tas de bordel. Je me sentirais plus protégé et je sais que Papa ne le prendra pas mal. Juan non plus. Et tu sais Al, peut-être que tu pourrais le demander à Nikolaï aussi. Et passer plus de temps avec lui, il va finir par croire que tu ne l'aimes pas vraiment.
- J'aime Nikolaï, vraiment. Mais je sais pas pourquoi, j'aime pas te voir avec ce type... Je ne l'aimais déjà pas avant.
- On ne te demande pas d'aimer le copain de ton jumeau, juste le laisser rendre ton frère heureux. Et si il fait une connerie, je t'aiderais à lui casser la gueule.
Mathieu roula des yeux à ces paroles mais sourit malgré lui, il allait enfin pouvoir profiter de sa relation avec Juan sans le parasitage coléreux de son frère. Merci Papa et Arthur!

Nikolaï regardait l'écrin avec un air neutre qui n'aidait pas Alfred à savoir si il s'était foiré ou pas. Il avait voulu acheter ce collier seul et l'offrir à son petit-ami. C'était un ras le cou très simple, une bande de tissu noir sans fioritures, hormis l'inscription du prénom de Nikolaï en cyrillique et en fil argenté, sur la face intérieure. Finalement, le concerné releva les yeux vers son Alpha.
- Tu ne m'as pas mordu mais tu m'offres un cache-cou.
- C'est pour te prouver que je suis sérieux vis à vis de toi. On est trop jeunes pour se lier mais je voudrais vraiment approfondir ma relation avec toi et ça, c'est un moyen qu'on aille plus loin sans ce genre d'accidents.
- Je ne prends pas encore la pilule.
- Je peux prendre des capotes si tu préfères... Elles coûtent plus chères que les normales mais pour toi, c'est ok.
- J'ai dit «pas encore», je vais prendre rendez-vous. J'ai l'âge de m'en préoccuper de toute façon.
Le blond lui sourit puis détacha le collier de l'écrin et le prit, il lui passa autour du cou et l'attacha. Al posa un baiser tendre sur l'attache solide, faite pour résister aux crocs d'un Alpha, pendant ce moment de jouissance de l'accouplement où il ne pensait qu'à se lier. Il frotta son nez contre les courts cheveux gris, humant le parfum de mûres sauvages si caractéristique de son Oméga. L'écrin posé, il fini par enlacer l'autre jeune homme, ne se lassant pas de parcourir sa nuque de baisers légers, descendant jusqu'à son épaule qu'il dénuda.
- Al, pas maintenant...
- Je ne veux pas faire l'amour... Enfin si, mais pas maintenant. Je veux juste te découvrir un peu...
- D'accord...
Nikolaï avait toujours eut un fort caractère mais seul à seul avec Alfred, il se montrait doux et c'était cet aspect caché qui avait fait fondre son partenaire. Il se laissa tomber sur son propre lit et accueilli contre lui le poids de son petit-ami, l'enlaçant fortement. Ils s'embrassèrent longuement, tendrement. Alfred ne cessait de caresser cette peau lactée sous le pull gris que l'autre portait, il se repaissait de la chaleur, de l'odeur de son Oméga. Oui le sien, le seul qui lui appartenait. Qui lui appartiendrait.
- Reste avec moi Nikolaï... Je ne veux pas vivre sans toi...
- Je ne vais nulle part... Plus tard, je porterais ta marque et tes enfants. Je reste si tu me gardes.
Front contre front et les yeux dans les yeux, ils se sentaient calmes, sereins, complets. Alfred était allongé contre son compagnon, installé entre ses jambes mais il n'en tirait aucune supériorité, juste un profond bonheur. Et si Mathieu pouvait ressentir ça aussi avec cet enfoiré de cubain, alors d'accord. Mais en attendant, il avait envie de jouer avec la sublime créature en dessous de lui, de lui donner du plaisir et d'en recevoir en retour.

Juan haussa un sourcil quand à leur prochain rendez-vous, il découvrit Mathieu avec un joli collier mauve, jusque là bien caché sous l'épais manteau d'hiver et sa grosse écharpe en laine. Après autorisation, il le caressa du bout des doigts et il se surprit à trouver ce morceau de tissu vraiment érotique. Ce n'était pas censé être le contraire? Les Omégas se faisaient acheter ce genre de choses pour cacher la marque de leur morsure mais aussi pour montrer qu'ils étaient liés et donc, plus sur le marché. Tous les Omégas portant un collier n'étaient pas liés mais un Alpha devait en être le garant ce qui demandait une procédure afin d'éviter les abus et chaque collier était enregistré, sinon, tous les Omégas se trimbaleraient avec des bouts de tissus quelconques autour du cou. Concernant l'achat de celui de Mathieu et celui de Nikolaï, ils étaient au nom de Romulus en tant qu'Alpha en chef, puisqu'il était le père du premier Oméga et le père de l'Alpha mineur du second. Tout ceci avait demandé presque deux semaines de procédure avant de pouvoir arborer ces colliers dans la rue. Juan était vaguement au courant de ces faits, on apprenait les droits de base des Alphas et des Omégas pendant les cours d'éducation civique à l'école. Il n'avait pas vraiment de cas dans son entourage, il était un Alpha né d'un couple de Bêtas, tout simplement. Et il n'y avait pas d'Oméga dans son entourage hormis les quelques uns à l'école mais plus on avançait en grade, plus il était rare d'en trouver. Au lycée, ils faisaient presque figure d'exception. Il revint au présent et sourit de toutes ses dents.
- Il est vraiment très beau.
- Je l'ai choisit avec Papa.
- Cette couleur pâle te va à merveille. Je n'ai jamais bien comprit comment ce système fonctionnait exactement mais tu es encore plus beau qu'avant.
- Tu penses?
- Je le trouve érotique, je ne peux m'empêcher de penser à ta nuque en dessous de ce tissu soyeux...
Mathieu rougit mais il ne se déroba pas sous les caresses, tant celle de la main câline que celle des yeux le dévorant de haut en bas. Il s'avança vers le cubain, posant sa main sur son torse large et ferme sous sa paume. Il sentait le battement lourd et régulier de son cœur en dessous. Comme toujours, Juan portait une chemise hawaïenne hyper colorée et Mathieu glissa ses doigts sous le tissu fin décoré de palmiers. L'autre retint inconsciemment son souffle alors que la main délicate passait entre les poils de torse sombres de l'autre, ce qui était assurément le contact le plus intime qu'ils n'aient jamais eut. L'Alpha ne bougea pas même quand il sentit une deuxième main posée sur son ventre, jouant près de son nombril. Mathieu s'approcha et se hissa sur la pointe des pieds, ses lèvres se déposant tranquillement sur celles de l'autre. C'était un contact nouveau lui aussi, tendre et chaud. Juan ferma les yeux, laissant sa bouche être bécotée et savourée par cet adorable Oméga. Comment pourrait-il le lui refuser?
- Touche moi aussi...
Une supplique chuchotée contre ses lèvres et il fondit. Une main se posa sur l'arrondi d'une fesse, délicieusement moulée dans un jean blanc, et l'autre posée au creux du dos. Juan finit par s'asseoir et Mathieu se hissa sur ses genoux, confortablement installé sur ses cuisses. Il leur suffirait de bouger juste un peu pour que cette position déjà équivoque devienne carrément sexuelle mais aussi emplit de bonne volonté soit-il, Juan n'était pas certain de se retenir si son charmant Oméga commençait à se frotter contre lui. Il quitta à regrets ses lèvres pour le lui expliquer.
- Oui, tu as raison... Excuses moi.
- Non, je suis vraiment heureux que tu as envie de moi.
- Tu ne prends pas ce fait pour acquis?
- Je ne crois pas au mythe qui dit que les Omégas sont avides de sexe et ne pensent qu'à ça en permanence. J'veux dire, je te vois bosser au lycée, je te vois rire comme n'importe qui. Si tu sentais pas si bon et que tu devais pas t'absenter une fois par mois, on ne le saurait pas.
- Pourtant Juan, il a été difficile de faire accepter que le viol existait bel et bien chez les Omégas... Faire comprendre qu'agiter un pénis Alpha ne suffisait pas pour avoir notre consentement a été long et certaines personnes y croient encore...
Sans le savoir, ils avaient glissé sur un terrain particulièrement malaisant. Juan enlaça plus chastement son vis à vis, celui-ci ayant sorti ses mains de sous sa chemise pour les poser sur les épaules larges et fortes de l'autre.
- Matt, il y a toujours des abrutis qui pensent que les femmes ont le fantasme pur et dur de se faire violer.
- Je sais. Mais la situation des Omégas dans le monde rassemble l'esclavage et la discrimination. Pour certains pays, les Omégas sont des animaux sans intelligence ni volonté autre que d'obéir et se reproduire. J'ai horriblement conscience d'être protégé à la fois par mon pays et par mon père. Parce que même en France, certains emplois sont interdits aux Omégas pour des raisons dites de Santé Publique.
- C'est vrai que ton père est un magna des affaires.
- Oui. J'ai plombé l'ambiance, je suis désolé.
- J'aime t'écouter et discuter avec toi. Moi, je ne te vois pas comme un imbécile guidé par ses hormones, je dirais même qu'il y a plus de cas de ce genre chez les Alphas.
Mathieu ne voulait pas non plus faire dire que les Alphas étaient tous des monstres avides de violence sur les Omégas qui seraient de pauvres choses fragiles. Le schéma existait, certes c'était un fait mais il n'était plus le seul schéma existant et ça, c'était l'information à retenir. Finalement, ils s'installèrent plus confortablement et ils visionnèrent quelques films, dans une ambiance songeuse. Quand Mathieu aura fini le lycée, il ignorait ce qu'il allait faire comme métier. Du coté d'Alfred, c'était tout réfléchit, il allait passer des concours de police. Il voyait bien son frère en uniforme, il fallait l'avouer. Lui, il se cherchait encore et manque de bol, son horizon professionnel était limité.

Le printemps arrivait et avec lui, les premiers bacs blancs avant le vrai. Mathieu lui, restait cloué au lit, se tortillant dans les draps. Il espérait vraiment que ces foutues chaleurs se termineraient avant les dates d'épreuves. Bien sûr, son médecin pouvait justifier la chose et il aurait droit à des rattrapages mais il voulait faire les choses comme tout le monde. Alfred n'était plus vraiment dérangé par cette période, bien entendu ça le titillait mais puisqu'il couchait avec Nikolaï, ça le dérangeait moins et il ne ressentait plus le besoin impérieux de sauter sur son frère. Cependant, il ne prenait pas le risque de rentrer dans la chambre de celui-ci, laissant Arthur le faire. Francis ne montait plus à l'étage, étant désormais à huit mois de grossesse, il préférait rester dans son nid, un comportement normal pour un Oméga proche de l'accouchement. Mathieu lui, n'avait toujours pas franchit le pas avec Juan. Le cubain était adorable, quand ils passaient un moment intime, il se cantonnait à ce que son compagnon lui autorisait.
- Juan...
Mathieu gémit à nouveau, son corps s'arquant et se tordant de désir. Il entendit son portable vibrer et il soupira, tendant la main pour le saisir, peinant à décrocher.
- Hola! Comment tu vas Matt?
Un long gémissement lui répondit, l'Oméga n'ayant pu se contrôler en entendant la voix de l'Alpha qu'il désirait si ardemment. Inconsciemment, il descendit sa main jusque sous les draps, ses doigts s'enroulant autour de son sexe, toujours aussi raide et désireux.
- Juan... J'ai besoin de toi...
L'Alpha ne pu s'empêcher de réagir et béni le fait d'avoir une heure de trou pour pouvoir se remettre de ses émotions. Il aurait mieux fait d'envoyer des textos plutôt que d'appeler mais il était inquiet pour son partenaire.
- Je voudrais t'aider Matt mais je ne peux pas.
- Je n'attends que toi... Juan, viens...
Marie, Jésus, Joseph! Il lui était difficile de décider de ne pas céder. Un collier aidait à ne pas se faire mordre pendant une relation sexuelle lambda entre Alpha et Oméga mais là, il s'agissait des chaleurs. Juan n'aurait aucun contrôle, pas plus que Mathieu en fait. Leurs instincts seraient les plus forts, ils voudront plus que tout coucher ensemble et se lier pour de bon, quitte à moitié étrangler Mathieu en tentant de lui arracher le collier pour parvenir à mordre sa nuque si tentante. Juan se secoua, littéralement. Ne pas penser à ce scénario.
- Tu en es à combien de jours?
- Deux... Mon ventre est si chaud Juan, ça brûle... Aide moi...
Dieu qu'il se sentait l'âme d'un tortionnaire en le lui refusant! Heureusement qu'il avait cours et se devait de rester au lycée pour ne pas subir les foudres de ses parents.
- Te amo, Mathieu.
Ces mots sortirent Mathieu de son état enfiévré pour quelques secondes, son cœur battait toujours aussi fort et aussi vite mais ce n'était plus pour la même raison. Le silence se prolongea un peu mais finalement, l'Oméga réussit à esquisser un sourire malgré sa fatigue croissante.
- Je t'aime aussi Juan. A bientôt.
Il raccrocha et laissa tomber le téléphone, l'esprit ailleurs. Le jeune homme passa une main sur son visage, trempé de sueur, le corps lourd de désir inassouvi.
Mathieu revint au lycée la semaine suivante, pile pour pouvoir passer les épreuves de l'examen blanc. Alfred prenait soin de lui comme toujours, les quelques jours après les chaleurs entraînaient de la fatigue. Habitué depuis ses treize ans, Mathieu gérait plutôt bien. Lorsque Juan le vit arriver, il ne se priva pas de le serrer dans ses bras avant de l'embrasser à lui en voler le souffle. Profitant que Alfred soit enfin libre, Nikolaï vint vers ce dernier pour profiter de sa présence. Le blond le prit avec possessivité par la taille, le biélorusse leva les yeux au ciel mais ne fit rien pour se dégager. Alfred savait que les chaleurs de Nikolaï approchait car son odeur s'était faite encore plus forte et suave, l'attirant davantage. Cependant, lui aussi ne pourrait pas combler les envies folles de son Oméga puisque leurs parents craignaient un lien accidentel. A leur majorité, à eux de se débrouiller là dessus. Encore un an donc.
- Aller Matt on y va!
- J'arrive Al!
C'est donc côte à côte que les deux couples se dirigèrent vers les salles d'examens, plaisantant et pariant sur les résultats. Ils étaient jeunes, ils avaient encore la possibilité de changer les choses, seuls ou à deux. Mais plus que tout, Alfred était rassuré que sa relation avec Mathieu soit restée saine et sauve, chassant ses plus grosses inquiétudes et questions existentielles. Son frère resterait son frère, point à la ligne.  

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