Loser [ k.nj ]

Jour 32

Le surlendemain

«- NamJooooon !»

Je me retourne en entendant mon nom, venant de la bouche d'AeCha. Elle n'est plus en uniforme, comme nous sommes dimanche, et son style faussement je m'en foutiste m'avait manqué. Avant-hier, après avoir été à la N Séoul Tower, je l'ai raccompagnée chez elle, et nous avons refait le monde, à voix basse, sur tout le chemin. Nous nous sommes à peine vus hier, et je l'ai aidée à faire ses devoirs, assis dans un parc. L'hiver arrive, alors je me suis mis en quête d'un café ou nous pourrons aller, chaque après midi.
Encore une fois, elle arrive devant moi essoufflée.

«- Je viens d'avoir une petite altercation avec un chieur.»

Je hausse un sourcil, lui demandant de continuer.

«- En fait, chez moi, il y a actuellement ma tante et son fils. C'est un chieur de 8 ans.
- Donc tu comprends enfin ce que c'est que quelqu'un de plus petit que toi te colle.
- Laisse tomber, ça m'atteint pas, déjoue-t-elle.
- Mouais, dis-je dans un soupir.
- Bref. Il s'est assis à ma place, ce midi. Ma place, c'est ma place, je l'aime bien tu vois, en plus je peux voir la fenêtre. Et ce sale gosse s'assied là. Je le dégage, et il me sort "y'a pas ton nom marqué dessus.".»

Je sens la merde arriver, du genre elle jette le gamin par la fenêtre...

«- Du coup, tu me connais, j'allais pas rester passive. Donc j'ai été chercher un marqueur indélébile et j'ai marqué mon nom.
- Oh. Et tes parents ont réagi comment ?
- "Je trouve le E un peu raté."»

J'explose de rire. Ses imitations sont toujours hilarantes, elle prend un ton vieillot et se baisse, peu importe la personne. Elle prend même un accent campagnard, des fois.

«- Et là, j'ai réfléchi et-
- Je suis impressionné.
- Bon ta gueule. Et je me suis dit, que si quelqu'un nous prenait notre banc, parce que c'est le notre, soyons clair, on devrait avoir nos noms dessus, comme ça pas moyen de nous faire chier.»

J'acquiesce. Elle a de la suite dans les idées, quand même. AeCha me sourit donc, et sort d'une des poches intérieures de sa veste un compas, un tipp-ex et le marqueur indélébile dont il était question.

«- Tu graves, et moi je repasse au blanco ! m'ordonne-t-elle.
- Tu appelles ça du blanco..?
- Oui, pourquoi ?»

Je lui montre la marque, inscrite sur le sticker collé sur le tube.

«- Tipp-ex. Ah. C'était drôle de dire blanco. Adieu blanco.»

Je souris, en gravant du mieux que je peux mon nom et mon prénom, et m'arrête au moment d'écrire le nom de famille d'AeCha.

«- Ton nom de famille ?
- Lim.
- Lim ? C'est assez rare non ?
- Oui, je crois.»

Elle me fait un sourire que je lui rend, puis me tourne vers le banc et écrit son nom puis son prénom. Je me tourne vers mon œuvre, qu'elle est en train de repasser au tipp-ex. Je suis pas peu fier, pour le coup.

Quand nous avons terminé, je me tourne vers AeCha et lui fait un high-five. À force d'être avec elle, j'ai l'impression de le transformer moi aussi en gamin. Nous nous asseyons en face de notre banc, pendant que notre œuvre sèche. On doit sûrement avoir l'air un peu étranges, assis sur le sol, devant un banc. Mais cela nous importe peu.