the heartbreakers club✓

[06] Dark Necessities

MALORY ARMSTRONG

Cela fait plus de deux heures que nous déambulons dans les rues vastes et désertes de Fearville et mes mains tremblent toujours aussi fréquemment qu'à notre arrivée. Notre but en ce moment est de trouver un endroit où se loger ; la fatigue gruge plus d'énergie à chaque pas que nous entreprenons et nous aimerions aussi manger un peu. Ici, il n'y a aucune notion du temps ; les mêmes nuages gris ornent toujours le ciel, alors qu'il devrait faire nuit à cette heure-ci. Alison surprend Sara en répliquant à ses piques mesquines alors que Carter se fout un peu de leur situation et essaie de trouver un plan avec moi. Je sens la tension dans l'air, et au fil des minutes qui s'accumulent, nos différences se font de plus en plus grandes.

— Et si nous allions dans cet hôtel ? C'est quand même le seul qui a l'air en bon état., propose Ali en rejetant sa crinière dorée ondulée derrière ses épaules.

— C'est toujours comme cela que s'amorce les films d'horreur. Je n'ai pas confiance en cette décision., s'oppose Sara.

— Tu n'es pas obligée de rester, alors. Je pense que Malory et Carter seraient aussi contentes que moi si tu prendrais la décision de te creuser les méninges et faire ta propre exploration des lieux.

Je lance un regard à Carter puis à la blonde. Bien que Sara est plus qu'agaçante, elle pourrait se révéler utile... Si nous décidons de troquer nos plans de survie pour faire des ateliers de manucure. J'essaie de me calmer en prenant de grandes respirations mais rien n'aide. La situation me rend complètement folle ; sa nature est aucunement prouvée selon aucun raisonnement sensé que je puisse prendre dans un tiroir caché de ma tête. Il doit y avoir quelque de logique dans le tout, sinon, je ne sais pas dans quoi nous sommes foutues. Les visages des personnes avec qui j'ai échangé quelques mots avant que tout devienne noir me viennent à l'esprit : Evie, Matt, Ezra, Wyatt, ma mère, l'agent de police... De plus que ma génitrice est accusée du meurtre de mon père, j'ai l'impression que mon cerveau est sur le point de surchauffer.

— Je pense que nous devrons se contenter de dormir au..., Carter lit le nom de l'hôtel qui s'étale devant nous marqué en gras sur un panneau couleur bronze, Knocking Hotel. Ce n'est pas le meilleur des noms, mais bon.

Je fixe les quatre étoiles accrochées au-dessus des grandes portes d'entrée. J'espère qu'elles ont été méritées. Nous entrons dans l'immeuble et le hall autrefois magnifique est rongé par l'abandon et quelques insectes. Je déglutis comme une odeur âcre de javellisant à l'arôme de citron parvient à mes narines ; j'aime mieux ne pas savoir d'où cette substance provient. Alison se dirige vers la réception et disparaît, cachée par le bureau où une sonnette dorée entourée de fragiles toiles d'araignées est posée sur le coin, puis réapparaît avec un trousseau de clés tenu par son majeur. Elle esquisse un sourire en le brandissant, savourant le bruit que créer la collision entre les quelques clés accrochée à l'anneau argenté. Nous nous engouffrons dans un couloir jonché de feuillets publicitaires défraîchis et Ali nous guide jusqu'à la chambre numéro 96.

Elle insère une clé marquée comme « n°96 » dans la serrure en-dessous de la fente pour les cartes magnétiques puis tourne la poignée. La chambre est meublée modestement ; deux lits dont les draps sont bien placés, un petit canapé rouge, une table de travail, une télévision, un garde-robe, un frigidaire miniature et deux tables de chevet, en plus de la salle de bain à notre droite. Les immenses fenêtres nous offrent une vue sur le « centre-ville », nous montrant quelques bistros et restaurants, un Macy's et une parcelle d'un parc public devant une étendue spectaculaire d'eau. Mais cela ne fait qu'abaisser notre sourire ; des déchets reposent quasiment partout sur le sol, les vitres des établissements voisins sont cassées, l'herbe du parc a tournée au jaune et des objets inconnus encombrent les rues avoisinantes.