the heartbreakers club✓

[08] On Purpose

MALORY ARMSTRONG

Un sentiment indescriptible commence peu à peu à m'habiter. Je n'ai pas le temps de me tourner vers les autres filles pour voir leurs réactions que mon regard s'accroche à celui des deux « inconnus » qui se tiennent devant nous. J'essaie de calmer la vitesse de battement de mon cœur, mais en vain ; je suis vraiment verwirrt. Que font-ils ici, alors que c'est à peine s'ils font partis du casting secondaire ?

— Que faites-vous ici ?, lance Sara en balançant ses longs cheveux roux derrière ses épaules.

Aiden Pieterse et Eileen Fields marchent vers nous, un rictus présent aux coins des lèvres. Je ne suis pas très proche de ses deux personnes, mais avec tous les ragots que Evie me raconte, je les connais même plus qu'ils se connaissent eux-mêmes. Aiden est membre de l'équipe de débat, joueur dans l'équipe de football de Dobson's Review et, à ce que m'a rapporté mon amie, écrit des poèmes d'amour à Eileen depuis qu'il sait tenir un crayon. Avec son ossature parfaite, ses tatouages sombres et son air de mauvais garçon, on ne se doute pas spécialement qu'il est plus ringard qu'il en paraît.

Pour ce qui est d'Eileen, est a tout de la gentille fille : un visage en forme de cœur, des yeux bleus intrigants et de longs cheveux blonds toujours bien peignés. Elle s'habille uniquement de H&M quand elle n'a pas à porter l'uniforme de Charleston et a toujours eu des notes plus élevées que la moyenne. Les rumeurs disent qu'elle entretient une relation sado-masochiste avec Aiden depuis qu'elle a découvert ses poèmes évoquant son amour pour la mort et son désir de ressentir la douleur afin de s'en sortir heureux et épanoui. Ouais, c'est ce genre de personne que sont les élèves de Charleston et Dobson's Review. N'oublions pas les garces sportives, les joueurs de football narcissiques, les anorexiques peinturées de maquillage, les intellos et les gothiques sombres. Désespérant pour notre avenir.

— Si nous le serions, nous aurions déserté ce lieu empli de désespoir et aussi dépourvu de sens que les bribes harassantes que grommellent à chaque jour les haut-gradés de la société scolaire de Hallandale Beach., affirme Aiden en replaçant une mèche blonde qui s'attardait sur son visage prit d'une position théâtrale, visiblement touché par son monologue.

Je fronce les sourcils tout en me tournant vers les trois filles à mes côtés ; tout comme moi, une moue déconcerté prend place sur leur visage et leur bouche forme un rond d'étonnement. Croyant pouvoir voir si Eileen a la même réaction que nous, je dérive mon regard en sa direction, mais elle reste impassible, comme si le discours excentrique de son « petit-ami » était tout à fait normal.

— Euh., s'ajuste Alison en déglutissant. Vous êtes ici depuis combien de temps ?

— Et quel est votre problème de voler notre nourriture ? Sachez que dès que je sors de ce trou, je vais m'assurer de faire courir les pires rumeurs sur vous., Sara marque une pause. C'est bien une première : des sado-maso intellos qui aiment réciter des poèmes tout sucre tout miel quand ils ne sympathisent pas avec des fouets.

Je regarde nerveusement autour de moi puis sursaute quand Aiden charge son arme.

— Vous allez me le payer, toi et les garces anorexiques qui te servent d'amies, poil de carotte.

Carter essaie pendant quelques secondes de calmer le jeune homme, mais celui-ci est aussi révolté que les poèmes qu'il écrit en ruminant intensément sur la vie qu'il mène. Sara, toujours ébahie de l'insulte provenant du joueur de soccer, grommelle dans sa barbe en laissant échapper à plusieurs reprises des jurons. Je croise le regard bleuté électrique d'Eileen, mais ce que je décèle me déçois ; une mer turquoise qui devient de plus en plus sombre, comme si ses soucis devenaient de gros nuages qui commençaient à la dépasser. Je lui ai seulement parlé une fois — avec comme motif un travail de mathématiques où notre enseignante avait décidé des binômes — et elle avait l'air gentille. Cela, c'était avant qu'elle se rende compte de l'admiration que lui porte Aiden.