- UN -

330 13 2
                                    

Je marche dans les couloirs en compagnie d'Hazel. Nous ne parlons pas. Elle me tient la main, je sais qu'elle y tient. Elle veut me montrer qu'elle est présente. Qu'elle me soutient. Je sais qu'elle veut que je lui parle. Mais je ne lui dirai rien. Elle s'arrête, m'arrêtant par la même occasion.

— Je dois aller voir Maxime. On se voit après.
— À plus, dis-je.

Elle m'embrasse la joue et me laisse pour faire marche arrière. Je hausse les épaules et continue de marcher. Je regarde mon téléphone pour ne pas passer pour une sans amis. Je marche sans faire attention où je marche, ce qui fait que je me prends quelqu'un. Je tombe par terre.

— Putain, râlé-je.
— 'Scuse.

Je lève la tête et aperçois un garçon. Jack Gilinsky, pour être précise. Un beau garçon. Très beau même. Capitaine de l'équipe de basket, musicien, petit ami parfait. Il est parfait. C'est probablement ce qui le rend tellement détestable. Ou du moins c'est pourquoi, moi, je le déteste. Je soupire et ramasse mon portable avant de me relever.

— Ça va, il me demande.
— Oui, je me suis ramassée mais tout va bien.

Je range mon téléphone et lève les yeux vers lui, tentant de lui lancer un regard noir. Au lieu de l'expression à laquelle je m'attendais, il sourit. Je fronce les sourcils et plonge mes yeux dans les siens, afin de voir si il comprend que je veux être méchante. Il sourit encore. Je lève les yeux ciel et le contourne pour aller en cours. Je ne me retourne pas pour voir si il me regarde ou si il est parti, de toute façon, je m'en fiche. J'arrive en cours d'histoire et m'installe au fond. Le coach arrive, nous raconte dix minutes de sa vie et commence son cours. Il parle, nous écrivons, il nous explique quelque chose, nous écrivons et enfin, il s'arrête à cinq minutes de la fin.

— Je veux vous voir samedi au match de basket. Si vous n'y êtes pas, ce sera un F. Merci beaucoup.

Je roule des yeux et range mes affaires quand la cloche sonne et annonce la fin du cours.

— Reeves, m'appelle le coach.

Je m'approche de son bureau pendant que la salle se vide.

— Tu ne veux toujours pas reprendre le basket ? Tu étais un bon élément dans mon équipe féminine.
— Ça me dit plus rien.
— Tu avais de grandes chances de réussir. Tu aurais pu te faire remarquer par un entraîneur.
— Je suis plus trop emballée, coach.
— Qu'est-ce qu'il s'est passé pendant tes vacances pour que tu deviennes si renfermée d'un coup !
— Rien, c'est juste que... Le basket ne m'intéresse plus.
— Il y a des sélections la semaine prochaine, passe nous voir.

Je hausse les épaules et quitte la salle avant de me rendre à la cafétéria. Il s'est passé un tas de trucs ces vacances. Je ne suis pas prête à en parler. Je m'assois à une table dans un coin où sont assis les reclus de la société, ce dont personne ne veut. Ou alors ce sont ceux qui, comme moi, ne veulent pas être avec d'autres personnes. Je mange mes petits pois en lisant un livre que j'ai emprunté à la bibliothèque. Je suis plongée dans ma lecture quand un plateau se pose en face du mien. Je lève les yeux vers Hazel.

— Tu ne veux pas manger avec nous ?

Je secoue la tête.

— Qu'est-ce que t'as ? Depuis la rentrée t'es... t'es toute bizarre.
— Je veux lire tranquille.
— Depuis quand tu lis, Vee. Sérieux. Ça t'es jamais arrivé de lire le midi. Pas avant cette année en tout cas.
— J'ai passé l'été chez ma grand mère, pas de réseau, pas de wifi, j'ai découvert les joies de la lecture. C'est hyper intéressant.
— Très bien... Tu sais où nous trouver.

Je hoche la tête et elle s'en va me laissant reprendre ma lecture. C'est vrai que j'ai énormément changé cette année. Avant, j'étais le genre de fille populaire, jolie que tout le monde enviait. Mais cet été... cet été j'ai perdu toute confiance en moi, j'ai arrêté de me maquiller aussi. J'ai d'affreuses cernes, j'ai pris du poids. Je suis devenue horrible. J'avais tellement confiance en moi avant. Je tourne la page de mon livre et prends une bouchée de mes petits pois puis je pose ma fourchette. Je pousse un peu mon plateau pour avoir plus de place. Mon téléphone vibre dans ma poche. Je ne le prends pas tout de suite. Au bout de ce qui me semble assez de temps, je l'attrape, histoire de faire comme si j'étais occupée.

jackgilinsky vous suit désormais.

Je fronce les sourcils et lève les yeux à la recherche de l'intéressé. Je le trouve à l'opposé de moi, avec ses amis. Il rigole avec son groupe. Il semble détendu mais il n'arrête pas de regarder son téléphone. Il lève les yeux et semble chercher quelque chose. Je baisse instinctivement la tête et fais comme si je lisais mon livre. Je lève discrètement les yeux et vois qu'il me fixe. Je tente de me concentrer sur ma lecture, en vain. Je lève finalement la tête pour voir qu'il me fixe. Lui et une bonne partie de ses amis. Je me lève et quitte la cafétéria en passant malheureusement devant sa table. Je marche sans me retourner ni m'arrêter pour aller devant le lycée où je m'assois sur un banc et continue ma lecture. Je jette quelques regards furtifs à droite et à gauche pour voir si il m'a suivit. Il ne semble pas l'avoir fait. La sonnerie retentit annonçant la reprise des cours. Je range mon livre et me dirige vers la salle de musique. J'ai une heure de libre et je sais qu'à cette heure là, personne n'y est. Enfin, il n'y a pas de cours dans cette salle, ce qui signifie que je vais pouvoir être tranquille. Normalement.

J'entre dans la salle vide et m'installe sur une chaise après avoir prit une guitare. Je sors les partitions que j'ai dans mon sac et les pose devant moi. Je m'entraîne en faisant quelques accords puis je commence à jouer ce que j'ai écrit sur mes partitions. Je fais glisser mes doigts sur les cordes, je les gratte. Je laisse les notes se répandre dans mon corps et je ne sais pas par quelle étrange pulsions, je me mets à chanter. À chanter des mots qui me viennent. Sans le faire exprès, je fais des rimes, je donne un sens à mes notes. Les mots glissent sur ma langue, je ferme les yeux et me laisse entraîner.

— Je savais pas que tu jouais de la guitare. Et que tu chantais.

Je sursaute et m'arrête, ouvrant les yeux par la même occasion. Jack se tient là. Il est contre la porte fermé. Qu'il a probablement dû ouvrir sans que je ne m'en aperçoive.

— Je savais pas que tu écoutais aux portes.
— Je venais m'entraîner un peu. Tu sais, la musique c'est mon truc.

Je hoche la tête et n'ajoute rien. Il n'ajoute rien non plus et se rapproche jusqu'à s'assoir à côté de moi.

— C'est de toi, il me demande.
— De ?
— Les partitions ?

Je hoche à nouveau la tête. Il tend la main vers mes feuilles et tourne son visage vers moi.

— Je peux ?
— Euh... je préfèrerais pas, en fait.
— Ah... Je comprends.

Il range sa main pendant que je ramasse mes affaires.

— Tu peux rester, tu sais.
— Non... Je... je ferais mieux de te laisser.

Je m'apprête à me lever quand il pose sa main sur mon poignet.

— Avant, t'étais pas comme ça. T'étais la première à vouloir que les garçons viennent te parler. Et maintenant tu me fuis.
— Les gens changent.

Je range la guitare et quitte la pièce avant d'aller à la bibliothèque pour lire.

Je range la guitare et quitte la pièce avant d'aller à la bibliothèque pour lire

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.
gone // jgOù les histoires vivent. Découvrez maintenant