Chapitre 10

43 12 81
                                    


Le jeune homme referma la porte derrière lui. Il venait de réussir une épreuve et ce maigre succès lui arracha un sourire infime. Cependant, il ignorait toujours le nombre total d'épreuves. Désireux de connaître ce nombre, il déduit qu'il devait s'agir de trois, comme dans les histoires racontées aux enfants par les anciens.

Alors qu'il passait l'ouverture dans le mur – un bel arc voûté –, il tomba nez à nez avec l'homme-vache aux bajoues. Il avait l'air d'humeur revêche. Très mécontent. Effrayamment mécontent. Il venait à coup sûr d'échouer à la première épreuve. Et croiser le gamin de la file indienne ne faisait qu'augmenter son irritation. Ne restons pas là, qui sait ce dont est capable une vache en colère, se dit Kagan. Il tourna les talons sans plus tarder. Une envie de vomir le saisit lorsqu'il huma le parfum nauséabond de l'homme. Pendant des heures, il avait souffert de l'odeur infecte que dégageait ce prétendant dégoûtant. Heureusement, ce calvaire avait pris fin !

Kagan était soulagé maintenant. Tous les possibles s'offrait à lui, ses rêves prenaient racine doucement. L'amour, la richesse, le bonheur et le pouvoir lui ouvraient leurs bras, à l'image des portes ouvertes du palais, resté fermé au peuple de Saturnis depuis de longues années.

Il se rendit soudain compte qu'il avait marché sans réfléchir où il allait, pris dans le dégoût que lui inspirait l'homme-vache, l'envie de s'en éloigner et ses pensées. La terreur se répandit en lui. Il s'était égaré.

Un fois encore, il essaya de se calmer par de profondes respirations et de raisonner. Il se dit que revenir sur ses pas – quitte à revoir le suricate rondouillard qui puait – serait la meilleure solution. Il fit donc demi-tour. Hélas, il ne rencontra sur son chemin aucune trace de l'homme-vache ou de son parfum. Complètement perdu, il paniqua. Il regardait partout autour de lui, à la rechercher de la moindre présence humaine. Maudit palais ! jura-t-il. C'était la même chose partout : mosaïque, sculptures, couloirs, ouvertures, impasses... Il regretta de ne pas avoir mémorisé la forme des sculptures ou les dessins représentés par les mosaïques qui décorait les couloirs. Il transpirait. La sensation de quiétude qui l'avait apaisé lorsqu'il était passé par les jardins du palais avait entièrement disparue. Une boule de douleur naquit dans son ventre, celle de la faim et de la soif. Il n'avait rien mangé depuis le dîner de la veille. Son cœur tambourinait dans sa poitrine, les murs ornementés du palais étaient semblables à une cage immense et trompeuse. Une goutte de sueur coula de ses tempes tandis qu'il accélérait le pas. Ses yeux balayaient l'espace de manière sporadique. Il courrait presque maintenant, prenant tous les couloirs qu'il voyait, vérifiant chaque ouverture, toutes identiques – de petits arcs voûtés. Il fonçait tête baissée, sans croiser âme qui vive. Bon sang, il n'y a donc personne ici ? C'est quoi ce labyrinthe ? s'affolait-il. Désorienté, il finit par crier :

- Ohé ! Est-ce qu'il y a quelqu'un ?

Il répétait cette même phrase en boucle, tourna en rond, transpirant de plus en plus tandis que le temps s'écoulait. Sa voix était teintée d'angoisse. La crainte de manquer la seconde épreuve l'étreignait.

Il ne savait pas combien de fois il était passé dans ces couloirs analogues, il cherchait la salle de la deuxième épreuve en vain. Il ne prenait même plus le temps de regarder où il allait, la panique brouillait ses sens. Il n'en pouvait plus de l'horrible impression de tourner en rond depuis le début.

Soudain, il entendit un froissement d'étoffes. Et aussi des bribes de discussion. Il se dirigea, plein d'espoir, vers l'endroit d'où il supposa que le bruit venait.

- Ohé ! Attendez !

Le silence revint. De potentiels sauveurs venait de s'évaporer. Non, non, non, non, non, s'alarma-t-il, ce n'est pas possible ! Sa chemise était trempée de sueur. Il se prit la tête dans les mains et s'accroupit, comme pour faire taire des voix que seul lui pouvait entendre. Il devait trouver cette fichue pièce ! Il devait aller à l'épreuve.

The Captain's Secrets [En Réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant