Chapitre 7

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Kagan réfléchissait

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Kagan réfléchissait. Accroupi en face de Nassim, il semblait captivé par le spectacle qui avait lieu à ses pieds – un insecte inconnu creusait de ses petites pattes le sol infertile. Mais il n'en était rien.

Cela faisait deux jours que l'inconnu encapuchonné hantait les rêves du garçon, que l'inconnu rôdait aussi dans son ombre pendant la journée. Il était partout.

Plusieurs fois, alors que Kagan traînait dans les rues, il avait cru entrapercevoir la silhouette droite et élancé de l' « homme à la poigne de fer » – tel était le surnom qu'il lui avait donné. Il avait à chaque reprise demandé à Nassim si lui aussi avait bel et bien vu le sombre personnage, ce à quoi il répondait « en fait t'es vraiment un gros paranoïaque ! » ou « tu pourrais au moins faire l'effort de repérer de belles nanas à la place de t'inventer des trucs ». Alors, Kagan avait arrêté de faire part à son ami de chacune des apparitions chimériques de l'homme à la poigne de fer.

Kagan leva discrètement les yeux vers son camarade. Nassim, lui, était réellement intéressé par l'insecte et ses préoccupations. Ce qui le faisait rester, c'était qu'il trouvait marrant que la bestiole se retournât, tentât de creuser le sol ou qu'elle s'arrêtât pour recommencer encore. Il s'amusait de l'aspect étrange de ce qui ressemblait à un dard au bout de sa queue, de ses sortes de crochets de part et d'autre de sa tête carapacé.

- Oh tu as vu la cabriole qu'il vient de faire ? s'extasia Nassim.

Kagan émergea difficilement du flot de ses peurs ;

- Hein ?

- Tu es à la ramasse mec, tu viens de rater quelque chose.

- Ça ne va pas changer ma vie.

Pas comme la présence de l'homme à la poigne de fer, pensa-t-il, étonné lui-même d'être aussi perturbé par cette rencontre houleuse. 

- C'est ce que tu crois ! Mais peut-être qu'un jour où tu t'ennuieras à mourir, tu regretteras de ne pas avoir le souvenir de l'insecte bizarre pour te remonter le moral.

- Possible. Je vais regarder plus attentivement alors.

La carapace noire, les pattes, les crochets... Kagan avait beau essayer d'y trouver un intérêt, il pensait toujours qu'observer cet insecte était une occupation futile.

Nassim se leva en scrutant les alentours.

- Trop tard, il me saoule l'insecte maintenant. Je suis en manque de présence féminine, singea-t-il.

Kagan décida de jouer le jeu, comme d'habitude. Nassim lançait les idées, les vols, les jeux, les occupations futiles. Kagan, lui, suivait. Il imitait son ami.

- Ça doit être horrible ! Que je te plains.

- Je suis le plus malheureux du monde.

Soudain, Nassim se redressa et ouvrit la bouche d'un air béat. Intrigué, l'autre tourna la tête : une jeune femme pulpeuse venait dans leur direction, traversant la rue. Pas pour leur parler bien sûr, mais pour aller dans la boutique d'épices derrière eux. Oui, ils avaient passé dix minutes accroupis devant un insecte, en plein milieu de la rue de terre battue.

- Excusez-moi, mais pouvez-vous vous écarter de mon passage ? dit-elle, l'air hautain.

- Bien sûr ma jolie, fit Nassim avec emphase en lui adressant un sourire qui se voulait charmeur. Veux-tu venir avec nous ? Une telle beauté ne se rencontre qu'une fois en une vie, tu sais.

L'orgueil surdimensionné de la jeune fille se sentit flatté, mais celle-ci remarqua les vêtements sales et troués de son interlocuteur. Le menton haut, elle ne se donna même pas la peine de répondre et poussa sans ménagement le jeune garçon aux yeux bleus avant de continuer son chemin.

- Il va falloir que tu améliores ta technique de drague, rigola Kagan en se relevant. Tu t'es pris un de ces vents !

- Moi qui me croyais subtil. Tu m'apprendras à devenir un tombeur ?

- Avec plaisir ! Mais pas aujourd'hui d'accord ? allégua Kagan avec sérieux. Je ne me sens pas très bien...

Nassim s'esclaffa tout en se retournant furtivement pour regarder une dernière fois la belle demoiselle, qui franchissait la porte de la boutique.

- Je parie que c'est à cause de ton homme noir, celui dont tu m'as parlé hier. Te fais pas de mauvais sang ! Je ne sais même pas pourquoi tu t'es inventé un personnage comme ça.

- Oui, on se le demande...

*

Le jour suivant, la nervosité gagnait Kagan. Elle le colla d'abord lorsque Maliya lui rappela que les épreuves se dérouleraient le lendemain. Elle s'agglutina à lui quand Nassim lui certifia qu'il n'y participerait pas malgré ses sollicitations. Enfin, elle l'absorba tout entier au moment où il se rendit compte du nombre impressionnant de bourgeois venus pour épouser la princesse. Les passants étaient quatre fois plus nombreux et ceux en provenance de la cité étaient sur leurs gardes. L'agitation régnait de toutes parts, des chaises à porteurs et des chevaux pure race parsemaient désormais le cœur de la ville.

Les deux garçons ne rapportèrent rien à la maison pour le dîner du soir.

Après un maigre repas fait de restes, où Daria s'était jointe, tout le monde partit se coucher, Nassim suivit sa mère boiteuse et autoritaire, et rentra donc dormir chez lui pour une fois.

Kagan eût beaucoup de mal à trouver le sommeil. Pendant des heures, il ressassa les mêmes idées déprimantes « je n'ai aucune chance, il y a trop de concurrence », « je suis trop bête pour espérer réussir les épreuves » et se posa les mêmes questions une multitude de fois « quelles seront les épreuves ? » ou « la princesse se souviendra-elle de moi ? ». Son cerveau bouillonnait, Kagan remuait sans fin sur sa paillasse, se tortillait sous sa couverture déchirée. Mais il ne se sentait pas seul – c'était impossible avec les ronflements de Maliya. Il sourit en imaginant la tête de Nassim quand il apprendrait que la fille de ses rêves possédait cette caractéristique.

Kagan avait peur. Certes, ce n'était plus à cause de l'inconnu mais ça n'en était pas moins désagréable. Etre un voleur était une tout autre chose que devenir un prétendant. Il ne se sentait pas prêt à jouer ce rôle-ci. Néanmoins, la fatigue du métier l'accablait et laisser sa vie prendre un nouveau tournant se révélait angoissant mais aussi excitant. Qui sait, peut-être Samina se souviendrait-elle de lui, peut-être l'épouserait-il, peut-être serait-il roi.

Finalement, les bras de Morphée l'emportèrent. Il se laissa bercer, s'abandonna à la douceur du sommeil. Il dormit paisiblement.

***

Bonjour !

Je publierai la suite dans une semaine (impossible de publier avant '--) 

Que pensez-vous de ce chapitre ? De Kagan ? 

Pourriez-vous (s'il vouuus plaaaaaaît) me dire ce qui d'après vous arrivera dans la suite ? ;)

En tout cas, merci d'avoir lu, je vous aime et bon week-end ♥

The Captain's Secrets [En Réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant