Chapitre 3: Lumières crépusculaires

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Voir au-delà de sa conscience. Exister au-delà du réel. N'est-ce pas un but louable pour l'Homme ? Dissocier son âme de son corps pour être pleinement conscient. Mais la conscience ne s'exprime t-elle pas à travers l'imagination ? L'imagination est l'essence même de la création. L'imagination est à l'origine de notre évolution. L'imagination s'appuie sur nos perceptions et c'est ainsi que nous pouvons les changer. Dans ce cas, être conscient, c'est savoir manipuler ses perceptions, aller au-delà des frontières du réel et de l'imagination ?

Tu vois, ces lumières qui apparaissent dans le ciel à la frontière du jour et de la nuit, tu peux en faire ce que tu veux, elles t'appartiennent.

-Sais-tu te battre ?

-Je n'ai jamais eu besoin de le savoir.

Arthur avait le profil d'un combattant, je pouvais le voir rien qu'à sa démarche qui évoquait une certaine rigueur militaire. Chaque muscle de son corps était activé à bon escient dans un effort mesuré. Je ne pouvais pas m'empêcher d'être admirative devant tant de maîtrise de soi.

La salle taupe faisait partie d'une petite maison au style japonais appartenant au « Vénérable Wu », à ce qu'il disait. J'en étais sortie avec mon nouveau compagnon de route et devant nous s'étendait une plaine verdie par la saison printanière à perte de vue. Cette plaine était coupée par une rivière bleue, translucide et chatoyante qui semblait chanter. Le ciel était envahit de la lumière d'un soleil lointain couvert de nuages blancs qui tiraient sur le gris. Notre chemin se perdait dans des montages qui avec l'âge s'étaient couvertes d'un duvet vert.

-Ne crois pas à tout cela, c'est un leurre.

Cette phrase me tira de ma contemplation.

J'avais beaucoup de mal à marcher tout en gardant mon équilibre puisque l'accident avait causé des lésions assez importantes au niveau de mes jambes qui n'avaient pas encore tout à fait cicatrisé. Le vieux avait soigné les blessures que j'avais infligées à Arthur et lui avait versé son salaire. C'était sûrement la dernière fois qu'ils se reverraient.

Dès les premiers pas, une douleur terrible avait incendié mes membres. J'avais honte de ma faiblesse mais cela n'allait pas m'aider à la surmonter. Heureusement pour moi, Arthur était un garçon très intuitif. Il tendit une main derrière lui tandis que je vacillais et je pus m'y agripper de toutes mes forces.

-Je suis désolée, je suis déjà un boulet.

D'un mouvement souple du poignet il m'attira devant lui.

-Peu importe à quel point ça peut être vrai, ne t'excuse jamais. Me dit-il avec un sourire avant de me soulever pour me porter.

C'est ainsi que notre périple débuta.

Il était plus fort qu'il n'en avait l'air. De loin, il n'était pas musclé, pourtant je sentais la contraction de chacun de ses muscles contre ma peau. Je pouvais sentir tout à fait son odeur d'iode et de soleil.

-Tu as l'odeur de la mer.

Il ne broncha pas.

J'étais serrée si près de son torse que je pus remarquer un détail qui m'avait échappé jusqu'alors. Il portait lui aussi un pendentif sur sa peau halée.

-Est-ce que c'est un fossile d'ammonite ?

Je saisi la pierre entre mes doigts tout en soutenant son regard couvert de deux sourcils blancs froncés. Enfin ! Ça changeait de son regard de poisson mort !

-Comment tu sais ça ?

-Mon père est... était joaillier et gemmologue, il m'a appris tout ce que je sais. C'est pour ça que je devine que tu as quelques soucis avec... le temps qui passe ?

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