Chapitre 1 : folie et saint esprit

158 3 1
                                    

J'ai grandi enfermée dans un lieu verrouillé. Et quand j'ai ouvert la porte, j'ai compris que c'était ce qu'il y avait derrière la porte qui était enfermé. Si la folie est une vue de l'esprit, alors le saint d'esprit n'est pas celui qui s'en protège, mais celui qui y a survécu.

Mais qui est capable d'embrasser la folie, sans en tomber amoureux ?

J'ai ouvert les yeux, et un vieil homme étrange était en train de caresser mon corps. J'aurais voulu hurler ou me débattre mais mes membres engourdis m'interdisaient le moindre mouvement. Je le voyais, mais je ne sentais rien... je ne sentais rien...

Voilà ce que c'est d'être malchanceuse dans la vie...

J'étais dans une pièce peinte dans de très inspirantes nuances de taupe, sûrement pour inciter à la détente. L'endroit devait servir à la méditation ou quelque autre discipline dont le rôle était de vivifier le corps et l'esprit. Un doux fumet d'encens flottait dans l'air comme un insidieux rappel du lieu dénué de meubles. Ce qui était assez pour me desservir car j'étais allongée à même le sol, au vu de la distance plutôt moindre qui nous séparait.

L'homme avait du entendre mes hurlements indignés intérieurs puisqu'il leva vers moi un visage bienveillant.

-Croyez vous vraiment que si j'avais eu de telles pensées, je serais en train de tenter de sauver votre vie ?

J'aurais pu dire qu'il marquait un point. Le fait était que je ne savais pas ce qu'il faisait du tout.

-Je ne sais pas comment vous êtes tombée de cette falaise mais vous n'avez pas raté votre coup ! Heureusement que ce garnement était là !

Hein ? Qui ? Quoi ? Quelle falaise ? Quel garnement ? Ralentis le vieux, tu m'as déjà perdue !

Je me souvenais seulement du moment où j'avais entendu mon père discuter avec ma mère de mon enlèvement imminent. Ils parlementaient dans le salon me croyant dans ma chambre en train d'étudier. Pour une fois dans ma vie, je peux remercier mon estomac vorace pour m'avoir guidé jusqu'à la cuisine au bon moment.

-C'est la meilleure chose à faire, je peux te le garantir. On peut toujours avoir un autre enfant si tu veux.

Je savais que mon père ne faisait pas dans la dentelle mais de la à prononcer des mots si durs... Je n'avais pu m'empêcher d'en éprouver un léger pincement au cœur. J'avais alors préparé des bagages rudimentaires et avais attendu patiemment qu'à la sortie de chez moi on me couronne d'un sac en toile pour me mener dans je ne sais quel endroit bien creepy au fond d'une forêt dont mon père a le secret. Mais je ne m'attendais pas, mais alors PAS DU TOUT à me faire jeter d'une falaise. Enfin, selon la version du vieux pervers.

Ledit pervers s'arrêta soudainement dans sa séance de palpation pour me fixer avec l'air alarmé d'une chouette.

-Vous êtes pas normale vous.

Merci, c'est gentil.

Que répondre à cette courtoise affirmation ? à part merci ? Sinon, le vieux avait vraiment l'air choqué, il faisait la même tête, je pense, que celle que j'aurais faite à mon réveil si je n'étais pas autant dans les vapes.

-Vous savez, commença t-il avec un ton grave...

Vous savez, ce ton grave qui précède les bonnes nouvelles dans le style : je t'ai trompé, tu es adopté ou vous êtes une arme magique extrêmement puissante et dangereuse.

-... Vous m'avez tout l'air d'être une arme magique extrêmement puissante et dangereuse.

J'aurais pu être plus surprise que ça mais j'étais déjà suffisamment étonnée par la découverte de mes nouveaux dons de divination. En même temps, tout cela semblait trop improbable, ça allait encore jusqu'au moment où je ne me souvenais de rien. C'est-à-dire au moment où le sac en toile était venu obstruer mon champ de vision.

A new world is comingOù les histoires vivent. Découvrez maintenant