Chapitre 1 - Jour & Nuit

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CHAPITRE 1 Jour & Nuit
Londres - 2014 - Clara

Dans le noir, tout change. Nos certitudes les plus profondes sont ébranlées par l'étrangeté de notre imagination enfantine.

On ne peut plus se fier à nos sens qui se retrouvent handicapés par l'obscurité ambiante et les vains subterfuges que notre inconscient use afin compléter les manques. On imagine, on pense, on déforme la vérité en la faisant résonner avec l'atmosphère qui nous entoure. On s'imagine qu'il y a quelqu'un derrière une ombre, un bruit... Et puis on se rappelle qu'il n'y a rien et qu'il ne faut pas s'inquiéter.
Cependant ce n'est pas toujours vrais. La chance n'était pas à mes côtés cette fois-là, car pour une fois le danger rodait dans la nuit. Bien réel et obstiné.

Certains lieux semblent destinés à nous faire peur, nous inquiéter. Et c'est lorsqu'ils sont privés de leurs effervescences habituelles, puis plongés dans le silence pesant de la nuit que cela devient une évidence.

Et pour provoquer tant de doutes et d'effrois, il n'y a rien de pire qu'un internat. Un lieu entouré de mystère, qui renferme les secrets des gens et aussi, nos propres souvenirs. Les anciens racontent des histoires, ces lieux sont hantés à ce que l'on dit. Je n'en ai toujours pas de preuve mais je le savais au fond de moi. Pourtant le danger qui me guettait était tout ce qu'il y a de plus vivant.

J'avais oublié mon livre, c'était ce simple fait qui m'avait ramenée sur ces lieux que je maudissais la journée. Ce qu'il y a de bien la nuit, c'est la quiétude et le silence environnant. Seulement, jamais je n'eus imaginé que ce calme angoissant puisse être troublé par une détonation.

Après une période indéterminée de vagabondage entre les murs de l'institution j'ai fini par le retrouver près de la salle d'étude. L'objet de mon attention était là, abandonné dans ce vaste endroit où virevoltaient les ombres projetée par la lune. Un lieu qui s'avérait finalement, beaucoup trop silencieux ; même pour moi. Je me saisis de l'ouvrage abandonné, dont la vieille couverture bleue effleura mes doigts avec douceur, ce live m'avait toujours inspiré une sorte de déférence.

C'est en me redressant que je l'aperçus.
L'ombre silencieuse et mouvante venait de passer pour la première foi. Un frisson glacé coula le long de mon échine. Incertaine, j'ai fait un pas en avant, observant les couloirs en quête de cette présence. Des dédales infinis rendus lugubres et inquiétants par les ténèbres nocturnes, des portes menant aux classes y étaient disséminées avec parcimonie. Je me tenais là, seule, avec pour seule protection un livre étroitement serré contre ma poitrine qui se soulevait et s'abaissait au rythme de ma respiration saccadée.
Faisant quelques pas hésitants, je me suis retrouvée face à un autre couloir que je n'avais pas encore emprunté, vaste il m'offrait une vue en contre plonger sur les casiers, sagement rangés le long du mur. Un couinement discret retentit subitement derrière moi, aussi bref et léger qu'un souffle de vent. Mais ce fut suffisant pour que je fasse volte-face, aux aguets. Pourtant il n'y avait que moi. Même si je commençais à douter de ses bruits, je restais tendue comme un arc, ma peur à fleur de peau.

Mais c'est lorsque je me suis retournée pour reprendre mon chemin qu'une détonation claire et nette coupa le silence presque palpable de ces lieux. Je ne savais pas d'où venait cette distincte sentence de mort, mais elle avait claquée dans les airs, et malheureusement j'étais seule. Il n'y avait donc qu'une cible potentiel, en l'occurrence... Moi.
Le choc ne tarda pas à arriver, précipitée sur le sol j'ai fermé les yeux en même temps que je ressentis l'impact de mon dos sur la surface lisse des dalles blanches, faisant s'échapper un souffle de mes lèvres blêmes.

Étrangement la seule douleur que je ressentais était la morsure de la pierre gelée contre ma peau. J'étais peut-être morte sur le coup. A cette idée déplaisante j'ai ouvert les yeux posant un regard améthyste aux alentours. Un visage inquiet était penché par-dessus moi, d'immenses prunelles vertes-feuilles surmontées de longs cils sombres me fixaient intensément. Des cheveux noirs mi-longs pendaient négligemment sur sa face dont les trais fins et gracieux se détendirent petit à petit en remarquant mon hébétude face à la situation et surtout que j'allais bien. Outre le fait d'être ébranlée d'avoir frôlée la mort, bien évidement.

Les Ombres Du TempsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant