FORCE D'AME (Tome II FORCE D'ESPRIT)

CHAPITRE :

PDV WILL 

La souffrance, c'est le maitre mot de ma vie depuis huit longs jours. Huit jours que j'ai retrouvé Charlie, huit jours qu'elle ne se réveille pas. Les médecins, mes collègues, ne savent guère la raison de ce coma, d'autant plus que tout semble aller chez elle, mis à part son cerveau qui a pris des vacances, elle ne se réveille pas, pire on a dû l'intuber !

Comme si le fait de devoir supporter l'état incertain de cette fille, je comprends maintenant que j'ai un frère... Je pose la tête dans mes mains à bout de nerfs, je suis avachi sur l'un des murs de la chambre de Charlie. J'observe son thorax monter et descendre avec l'aide de l'assistance respiratoire. Je suis impuissant. Ben ne cesse depuis huit jours d'inspecter sa fille sous toutes les coutures, comme si une blessure m'avait échappé et pourrait être la cause de ce sommeil forcé. Mais non, je l'ai soigné, mon frère aussi, mon frère...

Ce nouveau frère que j'ai détesté, que je déteste ? Cet homme qui me fait tant penser à moi durant les années précédentes de ma vie. Celui qui a aimé Charlie, qui aime Charlie. Dans quel pétrin m'a-t-on foutu ! Je ne sais pas si je pourrai me sortir de tout ça. Je n'arrive pas à déterminer les sentiments étranges qui m'habitent. Un certain soulagement à la découverte d'une potentielle nouvelle famille ? Une colère mêlée à de la jalousie de savoir que mon frère et la femme que j'aime, s'aiment ? Le choc de toutes ses nouvelles découvertes me laisse un gout amer au travers de la gorge. Je ne vois pas comment cela pourrait au final bien passer. Je reste un homme, pire, un homme possessif et je ne compte pas partager Charlie, avec qui que ce soit d'ailleurs. C'est pour ça que dès que j'aperçois le changement de rythme cardiaque de Charlie tout mon corps le sens. Je me précipite à son chevet alors que le visage de son père s'illumine aussitôt. Il passe ses mains sur son front, presse sa main et lui chuchote des paroles intangibles. Elle semble vraiment en train de revenir. Mon cœur palpite dans ma poitrine et l'espoir gonfle en moi avec puissance, je n'ai pas le temps de le réfréner qu'il explose en moi quand son corps rejette l'intubation, signe qu'elle peut respirer à nouveau par elle-même. Je me hâte de lui enlever le tube qui obstrue sa gorge avec des gestes professionnels. Elle s'agite dans son état transitoire, comme pour lutter contre un voile qui tenterai de la retenir prisonnière. Elle gagne le duel, ses paupières se froncent et ses mains se serrent sur celles de Ben. Elle déglutit difficilement et essai de répondre aux paroles de son père. Il est si soulagé qu'il trépigne d'impatience de l'entendre. Je ne peux que comprendre son état étant moi-même suspendu à ses lèvres. Pourtant j'ai l'impression qu'elle me brise lorsqu'un son infime sort de ses lèvres :

- Tyler ?

Elle l'a chuchoté si faiblement que je doute de l'avoir entendu, mais mon corps me fait comprendre que je n'ai pas rêvé. Mon cœur se fend en deux, représentant mon amour pour elle et la haine que je ressens envers elle à ce moment. Je suis abattu, aussi soudainement que mon amour pour elle est apparu, je me sens trahi. De la pire des manières. Je recule du lit, ne supportant pas d'être là à son chevet alors qu'elle ne réclame que lui ! Elle ouvre enfin ses magnifiques yeux noisette et les fixe sur son père à la recherche de sa réponse. Je ravale ma colère et essai de trouver le bon côté à la situation, son réveil. Mon cerveau me dit de vérifier ses constantes, de voir si tout va bien chez elle afin d'éviter une quelconque rechute, mais sa question suivante m'arrache une nouvelle fois à la raison :

- Ou est Tyler?

Son père semble perdu, il ne souhaite pas informé Charlie de l'état de son petit ami et me regarde pensant qu'elle me demande, pourtant je sais que ce n'est pas le cas. Elle suit son regard avec espoirs et ce que je lis dans ses yeux me plante comme un idiot non désiré. Elle me méprise, je ne sais pour quelle raison valable elle se permet de m'accorder ce regard de reproche et de haine, mais je me redresse alors qu'elle détourne aussitôt le regard.