Une adolescente, un adolescent. Des pensées en vrac, saupoudrées de philosophie, d'envies et de longs discours sur la vie. Un éloge de l'être humain, un réquisitoire contre l'incertitude de notre fin. Rien de bien différent de ce que l'on a l'habitu...
- De pouvoir rêver pour toujours, répond Judy sans hésitation, comme une évidence, une envie d'évasion.
- C'est un drôle de rêve... Je ne sais pas si je peux accepter cette réponse, dit-il tout en laissant un sourire moqueur se dessiner sur la finesse de ses lèvres.
Elle laisse échapper un rire furtif suite à sa remarque des plus futile, mais suffisamment intrusif pour entraîner son voisin de toit dans les méandres d'un fou rire gelé dans l'instant. Des éclats de sons joués par le frottement de leurs cordes vocales, font raisonner les prémices de ce qui s'apparente à une symphonie musicale. Mais leurs échos finissent par se perdre dans le noir firmament, pour retrouver l'accalmie du début et chacun, leur isolement.
Puis, les deux êtres se dissipent, ils profitent de la fraîcheur du moment et du morceau de liberté qu'ils ont chacun choisi d'attraper aujourd'hui indépendamment. Nate plisse les yeux pour laisser ses pupilles s'accrocher au mince filet de lumière qui se balance sur le phare des voitures passantes. Il trouve cela drôle, tout paraît plus beau vu d'en haut. Les faisceaux de lumière deviennent jets de poussières, les rues arpentées par les habitants deviennent labyrinthe géant.
Tandis que Judy balance vertigineusement ses jambes dans le vide, sans se laisser impressionner par la hauteur qui la sépare du sol humide. Son regard reste accroché aux points minuscules qui s'avance dans les rues dans un rythme presque ternaire, le monde lui paraît alors plus vaste que d'ordinaire.
- La vie est bien plus belle en rêve, tu ne trouves pas ? finit-elle par dire.
- Je dois admettre que oui. Mais ta vie, tu ne l'aimes pas ?
- Ma vie est un enfer, elle l'a toujours été, et je ne vois pas comment ça pourrait changer...
- C'est si terrible que ça ?
- Si tu savais...
- Alors, je ne veux pas savoir.
Il avait prononcé ces mots avec une telle appréhension, ne pouvant cacher sa compassion, il tentait d'être compréhensif envers sa nouvelle amie, sans pour autant être intrusif dans sa vie.
- Et toi, c'est quoi ton rêve ? l'interroge à son tour Judy, cassant ainsi la gêne qui commençait à s'installer entre eux.
- J'aimerais pouvoir rester ici, sur ce toit avec toi.
- Moi, toi, le ciel et le toit. Je trouve cette perspective plutôt géniale.
- Génial ? Tu m'as habitué à de bien plus beaux mots.
- Tu rigoles j'espère ?
- Difficile de rester sérieux avec toi.
– T'es un cas, Nate.
– Un cas intéressant j'espère ?
– Non, je dirais plutôt... surprenant.
– Ça me plaît bien ça.
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