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14 mai

"Tu sais, Sara commence à se poser des questions."

J'ai fusillé Alice du regard.

"On n'a dit qu'on n'allait pas parler de ça, aujourd'hui" lui ai-je rappelé.

"Côme, je suis ton amie. Je veux juste que tu ailles mieux et que tu saches que tu inquiètes pas mal de gens, dont Sara. Elle pense qu'il y a un problème avec ton père et que tu ne veux pas lui en parler."

J'ai soupiré, et ai tendu de la monnaie au caissier du Subway. Alice avait décidé de me changer les idées à sa façon : faire une journée shopping. Non pas que j'adorais dépenser mon argent dans des vêtements, mais le bonheur d'Alice à chaque achat effectué méritait de faire sourire n'importe qui d'autre à deux cents mètres à la ronde. Il était à peine dix-neuf heures et elle trainait avec elle sept sachets provenant de magasins différents. J'ai posé notre plateau sur une table sur la terrasse, et ai commencé à manger mon sandwich sans quitter du regard Alice qui essayait de s'en sortir toute seule avec ses sachets.

"Tu n'as vraiment pas besoin d'aide ?" lui ai-je demandé en souriant malgré moi.

"Mais non, ça va aller."

Puis elle a commencé à se justifier pour chacun de ses achats. Je l'écoutais distraitement, observant les passants dans la rue. Il y en avait de toutes sortes : des jeunes, des moins jeunes, des hommes d'affaires qui venaient de finir leur journée de travail et des familles occupées. Mon regard était accroché à une femme assez grande qui claquait ses talons sur les pavés, son sac dans une main et téléphone dans l'autre, quand j'ai entendu mon nom dans la foule. Alice s'est tournée vers la voix masculine et Olivier s'est approché de nous, le sourire aux lèvres et la housse de son ordinateur à bout de bras.

"Olivier ?"

"Comment tu vas ? Ça fait longtemps que je ne t'ai pas vu."

Je lui ai serré la main et lui ai présenté Alice, qui a du se lever et se mettre sur la pointe des pieds pour lui faire la bise.

"Vous avez fait les magasins ?" a deviné Olivier en remarquant les sachets d'Alice amassés au pied de notre table.

"On s'est changé les idées" a répondu Alice. Puis elle s'est tournée vers moi. "Vous vous connaissez d'où, tous les deux ?"

"Euh, eh bien..." ai-je bégayé.

Alice m'a interrogé du regard.

"Je suis un coloc' de Diane."

Alice a fait les gros yeux et a décrit Olivier de la tête aux pieds.

"D'ailleurs, en parlant de ça, je pourrais te parler, Côme ?"

J'ai lentement hoché la tête, et Alice est partie en prétextant qu'elle devait aller aux toilettes. Elle m'a donc laissé seule avec Olivier, qui me dépassait d'une tête, voyait Diane comme sa petite sœur, et qui me dépassait d'une tête. Diane m'avait déjà dit qu'il était trop protecteur et qu'elle avait peur qu'il soit prêt à tout pour la protéger, et il me dépassait d'une tête. Diane était en colère et triste par ma faute, et il me dépassait d'une tête.

"Tu es courant que Diane te déteste, maintenant ?"

J'ai ravalé ma salive. J'étais surtout au courant qu'Olivier allait m'en faire voir de toutes les couleurs, oui. J'ai donc décidé d'être honnête avec lui.

"Olivier, je sais que je lui ai fait du mal, qu'elle m'en veut et que toi aussi, tu m'en veux, mais écoute : je m'en veux à moi aussi. Je suis con, terriblement con, je n'ai même pas réfléchi à ce que je lui ai dit et à cause de ça, je l'ai perdue. Et crois-moi que c'est la pire des choses qui pouvait m'arriver, et je n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi."

DianeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant